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C maligne : la technosatisfaction SNCF

Publié le 20 juin 2007 par Argoul

A leaflet given in local trains around Paris shows how the French railway enterprise SNCF is technocratic and old style in management. Bureaucracy and hierarchy govern, clients are considered as ‘users’ and assessed by a battery of calculable criteria. Such attitude remains, in spite of a law of orientation giving SNCF a status of industrial and commercial firm, voted par the Leftwing in 1982 yet…

Dans le Transilien ce week-end traînait sur une banquette le n°2 de « C’ma ligne », une feuille d’information de la ligne C du RER en Ile-de-France. Elle porte sur la qualité, répertoriant à fin mars 2007 les critères variés de ponctualité, accueil, propreté, confort, contrôle et information. Rien que de très louable, sauf que…

Le lecteur se demande à qui s’adresse le message :
• les quatre pages sur papier glacé quadrichromé de style officiel, sérieux, très ‘dynamique d’entreprise’ ;
• le titre folâtre visant la jeunesse branchée, entre clin d’œil lourdement démago à l’orthographe SMS (C ma ligne) et le travers générationnel pour les titres jeux de mots abreuvé à Charlie-Hebdo et Libération (C maligne) ;
• les tableaux colorés ornés de logos émoticons, puisés dans la pédago E.Nationale
• et le style techno-rare du texte…

Ah, le style ! « Le style, c’est l’homme même », affirmait Buffon. Que penser de la « personnalité SNCF » lorsqu’on lit ce jargon : « Il les expose préalablement au comité de suivi des critères assurant ainsi la traçabilité des actions entreprises dans le cadre de la certification » ? Et ce ne sont que des fragments-objets qui s’égrènent dans les phrases : « pilote concerné », « action corrective », « établissements concernés », « action entreprise »… Faut-il donc de telles pincettes pour parler de la réalité ?

Quand au fond, il n’est guère plus encourageant. Si le Transilien a transporté 632 millions de voyageurs en 2005, selon le rapport de la SNCF , ces voyageurs représentent presque le double des voyageurs grandes lignes et transports régionaux (342 millions) ! On se demande pourquoi les Iliens sont si mal considérés… Car si la SNCF se vante de sa ponctualité (93%) et pousse son niveau d’exigence de l’information à 90%, pourquoi diantre le niveau d’exigence de l’accueil n’est-il qu’à 80% et que, sur les 17 critères d’information recensés, seulement 6 sont renseignés, soit guère plus d’un tiers ! Les voyageurs resteraient-ils ces « usagers » qui n’ont qu’à prendre ce qu’on leur donne, aussi importuns et inutiles que ces kleenex qu’on jette après usage ?

A lire « comment se déroule le comité de suivi des critères », le citoyen-voyageur ne peut qu’être effaré : « Il a lieu tous les mois en présence du Directeur de ligne, du Responsable Pôle Service à la clientèle, du Chef de projet Certification, de l’animateur qualité et des pilotes de critères. » N’en jetez plus ! Vu le nombre, les titres ronflants et la hiérarchie soigneusement exposée, la SNCF reste très loin de cette souplesse moderne comme de la dynamique entrepreneuriale que l’on est en droit d’attendre d’un « Établissement public à caractère industriel et commercial », créé – sous la gauche – par « la loi d’orientation des transports intérieurs du 30 décembre 1982 ». Oui, vous avez bien lu : industriel « et commercial ». 25 ans plus tard (une génération), il est encore nécessaire que le « témoignage » d’un pilote de critère réaffirme le « service du client », comme si ce n’était toujours pas entré dans les mœurs, comme si le terme « client » était par trop anglosaxon, capitaliste, libéral - diabolique.

La SNCF rêverait, comme dans feue l’URSS, de n’être qu’un département d’Etat dépendant de l’Etat et nommé par l’Etat – sans aucune référence à un quelconque « service » à rendre aux citoyens – ces emmerdeurs – et sans penser le moins du monde aux coûts – l’intendance suivra - et à la qualité des prestations – c’est bien assez bon pour eux. Une parfaite secte d’ingénieurs révérant la Technique, une église hiérarchique avec son Dogme, ses prêtres et ses grand-messes, un circuit fermé où les trains tournent en rond, sans que jamais leur utilité ne sorte des rails.

C’fou ce que la lecture entre les « lignes » du « C’maligne » offre comme information sur un certain Etat… d’esprit.


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