Marcella // Saison 1. 8 épisodes.
BILAN
Portée à bout de bras par Anna Friel, Marcella est une série policière qui tient du registre du crime noir, et qui parvient à faire triompher une histoire intelligente, trouée de bonnes idées ici et là. Créée par Hans Rosenfeldt (The Bridge), la série reprend donc les codes du crime noir scandinave à sa sauce et met en scène l’une des actrices les plus prolifiques de sa génération dans ce genre policier qui lui sied à merveille. C’est donc derrière une ambiance poisseuse, une lumière toujours blafarde, des corps qui s’amoncellent et tout un tas de personnages avec des petits secrets, que se cache Marcella. Cette série est plus ou moins venue de nulle part car je ne l’attendais pas du tout. J’ai enchaîné les huit épisodes sans pouvoir m’arrêter et je comprends pourquoi. Hans Rosenfeldt récidive après l’excellent The Bridge (Bron/Broen en VO). Cette série, située à Londres, tente de donner un aperçu différent de la capitale britannique. Cela permet de voir les choses autrement et de retrouver un peu de ces histoires polaresques qui parfois me manquent. En effet, ces derniers temps on a plus tendance à voir des séries centrées sur les émotions et les personnages, pas forcément sur l’ambiance policière et les décors poisseux. C’est un truc qui n’est plus trop à la mode apparemment mais comme The Fall il y a quelques temps et beaucoup de séries scandinaves, Marcella touche là où il faut.
L’une des choses les plus fascinantes dans ces huit épisodes c’est la façon dont le récit nous conduit à ce cliffangher donnant forcément envie de revenir. Bon, ce n’est pas un cliffangher à proprement parler mais disons que c’est une bonne piste pour une toute nouvelle saison qui pourrait plus que jamais mettre notre héroïne en danger. Marcella Backland est un personnage très intéressant qui marche un peu en dehors des lignes (et on le sait encore plus par rapport à ses diverses actions tout au long de la saison). Elle est notamment capable de déplacer un corps, de mettre un sac plastique et regarder un suspect suffoquer, elle n’est en somme pas très bien dans sa tête. Mais c’est ce qui fait le charme de ce personnage complexe que Marcella tente de nous faire comprendre au fil des épisodes. Le retour d’Anna Friel à la télévision britannique est donc le bienvenu, changeant de ce qu’elle a pu faire de très mauvais dans American Odyssey (NBC) qui était juste une tarte du début à la fin. Mais peu importe, Marcella a l’occasion de prouver rapidement qu’elle ne compte pas nous décevoir. La série utilise alors un langage intelligent et une façon de faire plus que soigneuse afin de ne jamais laisser passer aucun détail.
Cependant, s’il y a bien un problème dans cette série, je pense que c’est justement les personnages. Je disais plus haut que les personnages sont de plus en plus au coeur des histoires avec les émotions qui vont avec. Peut-être bien que l’erreur de Marcella est de ne pas avoir su être une série très centrée sur les personnages. Du coup, le concept est ce qu’il y a de plus important apparemment. Mais cela ne veut pas pour autant dire que l’on n’en apprend pas sur Marcella. Cette dernière nous permet de naviguer au travers de sa vie qui n’est pas forcément ce qu’il y a de plus heureux au monde non plus. Elle a un mari qui la trompe, un tueur en série qu’elle doit arrêter et qu’elle va arrêter de façon assez singulière, et elle ne peut même pas se souvenir si elle a tué la maîtresse de son mari dans un excès de colère. C’est en grande partie pourquoi il y a largement de quoi mordre là dedans et ce n’est pas plus mal. Comme l’héroïne de The Bridge qui a un problème pathologique (elle est autiste), l’héroïne a ici un trait psychologique qui la différencie des autres. Elle souffre de black-outs, de moments où elle perd la mémoire. Les trous noirs qu’elle vit vont souvent de paire avec des excès de violence assez étonnants. Tout au long de la saison, Marcella tente de nous emmener dans les recoins les plus sombres de son personnage.
Et ce n’était pas forcément ce qu’il y a de plus facile à arpenter. Mais la série ne s’en sort pas trop mal non plus. Aidé par un scénariste qui s’y connait, le récit fait alors monter la pression crescendo. Si les trous noirs de l’héroïne auraient dû être des moyens de donner à Marcella un peu plus de punch, je regrette que la série n’arrive pas à capitaliser dessus afin de transformer son héroïne. Au contraire, on a l’impression que c’est surtout là pour justifier un trait psychologique du personnage et rien de plus, ce qui est en soi assez dommage. Le seul truc que je trouve terrible tout de même c’est le destin de Matthew qui jusqu’au bout se retrouve dans une situation assez peu enviable. Rien que de voir Henry lui enfoncer le bout d’une bouteille dans la joue était intense mais justement, le côté un peu terrifiant de certaines séquences de ce genre là apparait comme nécessaire. Finalement, Marcella est donc une agréable petite surprise qui sort un peu du lot et qui nous permet de voir les choses autrement dans le monde des séries policières britanniques. On retour au noir scandinave était donc une très bonne chose. En espérant en voir plus de cette Marcella.
Note : 7.5/10. En bref, un récit savamment orchestré du début à la fin.