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Révélation des problèmes psychologiques de l'expert psychiatre et liberté de la presse

Publié le 21 mai 2016 par Elisa Viganotti @Elisa_Viganotti

Révélation des problèmes psychologiques de l'expert psychiatre  et liberté de la presse

CEDH, 4èmeSection, Fürst-Pfeifer c. Autriche(requête no 33677/10), 17 mai 2016Madame Gabriele Fürst-Pfeifer est une ressortissante autrichienne née en 1964 et résidant à Mödling (Autriche), psychiatre, enregistrée depuis 2000 comme expert auprès des tribunaux, en particulier dans les affaires familiales : résidence des enfants et de droit de visite et d’hébergement. En décembre 2008, un article à son sujet fut publié sur un site internet d’informations régionales géré par une société privée de médias ayant son siège à St-Pölten ainsi que dans un hebdomadaire distribué gratuitement dans toutes les boîtes aux lettres du district, qui était publié par une autre société privée basée à Innsbruck. Une partie du titre de l’article se lisait ainsi : « l’expert judiciaire en matière de gardes d’enfants devrait se faire soigner ». L’article énonçait en particulier que Mme Fürst-Pfeifer souffrait de problèmes psychologiques tels que des sautes d’humeur et des accès de panique, alors qu’elle travaillait comme expert auprès des tribunaux depuis de nombreuses années. L’article renvoyait ensuite à un rapport d’expertise psychologique de Mme Fürst-Pfeifer effectué dans le cadre d’une procédure la concernant.En janvier 2009, Mme Fürst-Pfeifer saisit le tribunal régional de St-Pölten contre la société qui avait publié l’article en ligne, demandant des dommages-intérêts pour violation de sa vie privée et pour atteinte publique à sa réputation. En avril 2009, le tribunal accueillit son action, et ordonna à l’éditeur de lui verser des dommages-intérêts et de publier le dispositif du jugement. Mais la juridiction d’appel  infirma le jugement en novembre 2009, débouta Mme Fürst-Pfeifer,  confirma que les passages de l’article sur l’état mental de la requérante touchaient à sa vie privée mais estima le contenu de l’article véridique étant donné qu’il rapportait simplement des informations qui n’avaient pas été contestées par l’intéressée. La cour d’appel  ajouta que l’article était directement lié aux fonctions publiques de Mme Fürst-Pfeifer en tant qu’expert auprès des tribunaux.En parallèle, Mme Fürst-Pfeifer saisit le tribunal régional d’Innsbruck contre la société qui avait publié l’article dans l’hebdomadaire, demandant également des dommages-intérêts. Le tribunal régional d’Innsbruck accueillit son action mais la cour d’appel, en février 2010, infirma le jugement et la débouta.Devant la CEDH, Mme Fürst-Pfeifer reprochait aux juridictions autrichiennes de n’avoir pas protégé ses droits au titre de l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l’homme.Sur ce, La CEDH a dit pour droit : « Les juridictions internes ont fondé leurs décisions sur le fait que la requérante, en tant qu’expert psychiatre fréquemment désigné dans des affaires très sensibles de psychologie et accueil des enfants, devrait être considérée comme un fonctionnaire exerçant une fonction officielle afin d’évaluer si une balance attentive a été observée entre les intérêts publics et privés en conflit.La Cour ne voit pas de raison pour se substituer aux juridictions internes sur ce point, mais observe que les personnes qui assument une fonction publique doivent jouir de la confiance du public dans des conditions libres de toute perturbation injustifiée afin de pouvoir accomplir leur tâche avec  succès et que parfois il peut se révéler nécessaire de les protéger des attaques verbales offensives et abusives lorsqu’elles sont en service… Dans la présente affaire, toutefois, il n’y a  point besoin d’opérer une pesée entre les besoins de cette protection et les intérêts de la liberté de la presse, d’une discussion ouverte concernant des questions  d’intérêt général, étant donné que l’article en question ne contenait pas d’attaques offensives ou abusives.Pour cette raison, la CEDH est satisfaite des décisions des Cours d’Appel  de Vienne et d’Innsbruck, qui ont assuré une balance équitable entre les intérêts conflictuels en présence.En conséquence la Cour conclut qu’il n’y a pas eu violation de l’article 8  de la Convention ».
 Pour aller plus loin : Arrêt FURST-PFEIFFER c. Autriche (en anglais uniquement)


+Viganotti Elisa
Avocat de la Famille internationale 
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