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Skyrim remastérisé, mais pas Morrowind?

Publié le 10 juin 2016 par _nicolas @BranchezVous
Skyrim remastérisé, mais pas Morrowind? Exclusif

Les nostalgiques des jeux de rôle de Bethesda risquent d’avoir droit à leur remake, mais pas celui espéré par les purs et durs.

Skyrim, sorti en 2011, recevra un coup de pouce sous la forme d’une version HD selon les rumeurs. Pour les adeptes de Morrowind, paru en 2002, c’est peine perdue. La raison? L’importance du marché des consoles. Sans oublier la solution de facilité préférée par l’éditeur et développeur.

Selon le vice-président marketing de Bethesda, il n’y a aucune chance que Morrowind soit adapté pour les consoles modernes.

Chez GamesRadar, on est formels : plusieurs médias rapportent qu’une version remastérisée du cinquième volet de Elder Scrolls est en chemin – avec contenus supplémentaires et mods, s’il vous plaît. Par contre, selon le vice-président marketing de Bethesda, Pete Hines, il n’y a aucune chance que le même traitement soit accordé au troisième opus de la série.

La raison? Il faudrait bien plus que des textures plus détaillées pour y arriver. «Prendre Morrowind et le rebâtir entièrement? C’était un jeu sur Xbox. S’il fallait le reconstruire pour lui faire respecter les normes de conception contemporaines? Il serait nécessaire de disposer d’une vaste équipe abattant un sacré boulot», explique Hines.

Contradictions

Dans une industrie où les joueurs réclament bien souvent, paradoxalement, de nouveaux jeux et des versions remastérisées des classiques qui ont bercé leur enfance, cette décision de Bethesda fait peine à voir.

Une capture d'écran de Morrowind. Non, ce n'est pas pour rien que je souhaite une version remastérisée.

Une capture d’écran de Morrowind. Non, ce n’est pas pour rien que je souhaite une version remastérisée.

D’abord parce que l’on semble considérer que seul le marché des consoles mérite l’attention des développeurs et donc une nouvelle sortie. Ensuite, parce que l’un des arguments avancés par Hines pour étayer sa réflexion, le fait que «les gens venant de finir Skyrim se diraient «c’est quoi ce bordel» en voyant le système de dialogue de Morrowind», représente sans doute l’exemple le plus frappant du lent déclin de Bethesda et de ses deux principales franchises.

Les limitations techniques de l’époque n’ont permis d’enregistrer qu’une poignée de dialogues. Pour le reste, il fallait s’en remettre au texte.

Réglons ce dernier point en premier : Morrowind est un jeu complexe. Il tient d’ailleurs bien plus du jeu de rôle traditionnel que du mélange d’action et de jeu de rôle qu’était Skyrim. Les limitations techniques de l’époque (le jeu tenait sur un seul CD) n’ont permis d’enregistrer qu’une poignée de dialogues. Pour le reste, il fallait s’en remettre au texte. Très minimaliste, oui, mais cette méthode pour communiquer de l’information permettait aussi de mieux s’imprégner de l’univers et de comprendre les motivations des personnages. C’était également l’outil idéal pour développer les choix de réponse offerts au joueur. 

Dans Fallout 3, sorti en 2008, ce système donnait souvent lieu à des situations cocasses s’articulant autour des caractéristiques du personnage créé par le joueur. Hélas, en voulant simplifier cette mécanique dans Fallout 4 l’an dernier, Bethesda est allé à l’extrême et a transformé le système en une parodie de lui-même. Pas étonnant que des mods offrant des dialogues plus complets soient légion.

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Skyrim est de loin plus beau et «réaliste» que Morrowind. Finis les jets de dés comme à Donjons et Dragons se transposant sous la forme de combats où tout le monde tape dans le vide. Finis les trop nombreux talents à exercer pour monter de niveau. Et surtout, finie la possibilité de «tricher» et de monter de niveau rapidement en sautant constamment pour maximiser la compétence acrobatique. Skyrim s’éloigne de ses racines de jeu de rôle pur et simple pour tendre les bras à un plus grand nombre de joueurs. Une démarche qui a du bon, il faut en convenir. Mais cette simplification tient aussi d’une certaine paresse.

Favoritisme

Ce qui fait mal, aussi, avec ce refus de revisiter officiellement Morrowind et de remettre le jeu au goût du jour, c’est que Bethesda balaie sous le tapis tous les efforts de la communauté PC pour parvenir au même but de façon bénévole. 

Déjà, à la sortie d’Oblivion, le quatrième Elder Scrolls en 2007, des codeurs amateurs (et entêtés) avaient lancé Morroblivion, une transposition de l’univers de Morrowind dans le moteur graphique de son successeur. Quand Skyrim vit le jour, le projet Skywind en fit tout autant. Et comme l’écrivait jeudi PC Gamer, la démarche se poursuit encore aujourd’hui. Un véritable travail d’orfèvre. Ce ne sont pas non plus les seuls moyens d’obtenir une modernisation des visuels et des fonctionnalités de Morrowind, tant s’en faut.

Faut-il aussi parler des centaines de modifications disponibles pour Morrowind, Oblivion et Skyrim, gracieuseté de Nexus Mods ou du Workshop de Steam? Pour être bien honnête, cette rumeur d’une remasterisation de Skyrim pour consoles de nouvelle génération devrait laisser froids les joueurs PC. Nous avons déjà notre version en haute définition, et ce pratiquement depuis la sortie même du jeu. Suffit d’installer les mods désirés (malgré un petit accrochage de triste mémoire). 

Je t’aime, moi non plus

Tout cet engouement pour les versions remastérisées soulève le problème de l’originalité dans la création culturelle. Ce phénomène touche les jeux vidéo, soit, mais aussi le cinéma. D’un côté, on annonce une version retravaillée d’un jeu qui a bien venu en espérant renouer avec le succès. De l’autre, on relance des franchises. Blanc bonnet et bonnet blanc.

Ces remakes, la nouvelle plaie d’Égypte? Un agacement, une solution de facilité pour bien des développeurs et des éditeurs qui ne veulent pas tenter le coup d’une nouvelle franchise.

Le mois dernier, GameInformer publiait la liste définitive (mais évolutive) des remasterisations pour la nouvelle génération. On y trouve huit pages de jeux retravaillés, ni plus ni moins, qui doivent sortir ou qui sont déjà sur les tablettes. Final Fantasy, Resident Evil, Valkyria Chronicles, Dead Island, Call of Duty, Kingdom Hearts, Dishonored, Gears of War, God of War… la liste est pratiquement interminable.

Ces remakes, la nouvelle plaie d’Égypte? Un agacement, une solution de facilité pour bien des développeurs et des éditeurs qui ne veulent pas tenter le coup d’une nouvelle franchise. Il ne se passe pas une semaine sans que quelqu’un annonce un tel retour aux sources. Et sur Reddit, par exemple, les appels à la sortie d’une nouvelle version d’un classique tournent rapidement à la masturbation intellectuelle. Mais il serait difficile de dénigrer l’ensemble du phénomène comme la manifestation d’un désir cyclique de se faire constamment servir la même chose.

On aura beau chialer – que ce soit sur les remakes comme tels ou les franchises semi-annuelles au contenu répétitif –, un jeu vient parfois faire vibrer la corde sensible. Je n’ai pas honte d’avouer que j’ai dépensé le plein prix pour acheter Black Mesa, la refonte-reconstruction de Half-Life, ainsi que pour Homeworld : Remastered. Et quand Full Throttle trouvera une deuxième vie en 2017, je me laisserai sans doute tenter. Idem pour Morrowind, si les dieux numériques sont cléments.

En attendant, continuons d’être grognons. Tant et aussi longtemps que ce seront les jeux des autres, et non ceux que l’on souhaite, qui recevront le traitement de faveur.


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