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De la réglementation des Agences de Voyages

Publié le 04 juillet 2016 par Fouzi53 @fouzi53

La Loi

La profession d’agent de voyage au Maroc est réglementée depuis 1966 par des lois qui fixent les règles d’exploitation d’une agence de voyages. Au fil des années, ces lois ont évolué en fonction de l’orientation de la politique touristique du Royaume.

Ainsi, la loi 565-66 des agences de voyages qui a déjà été remaniée en 1976 (Loi 1-76-395) puis en 1996 ( Loi 31-96) s’apprête à un nouveau toilettage en cette année de grâce 2016 avec un nouveau projet ( loi 11-2016) sensé projeter la profession d’agence de voyage dans l’univers du Web 3.0 et l’ère de la digitalisation.

Cette initiative est plus que louable au vu des mutations que subit le secteur, mais tellement utopique face à l’économie collaborative qui fait de la désintermédiation son unique objectif. Je veux parler par là d’UBER, VIATOR, AIR BNB et autres plateformes dite collaboratives.

Cette refonte de la loi des agences de voyage est prévue depuis la signature de CPN Vision 2010, mais elle n’a jamais pu aboutir faute d’une véritable réflexion qui doit être portée par les professionnels et accompagnée par le Ministère de Tutelle.

Il y a bien eut une tentative en 2007 initiée par Le Ministre de l’époque en fin de mandat lui aussi, avec l’aide d’un cabinet international qui avait mené une étude intéressante dont l’objectif final devait générer des idées et identifier des business modèles soutenables sans pour autant faire du Copier Coller, mais tenter de l’enrichir avec toute opportunité spécifique et innovante pour le Maroc.

Cette initiative a malheureusement été avortée par une minorité qui ne souhaitait rien changer à l’existant, y trouvant son compte, et une grande majorité obnubilée par la rente du hadj et de la Omra au point d’occulter complètement le Tourisme et de fait devenir hermétiquement close à toute reforme.

Pour revenir à ce nouveau projet de loi, concocté rapidement, sans réelle concertation et qui risque malheureusement d’être adopté, il y a beaucoup d’inconsistance et ne répond en rien aux exigences du tourisme marocain, surtout en cette période très difficile que nous traversons et dont on ne voit pas l’issue.

Si on se réfère à la note de présentation qui promeut un système inclusif, fluide, flexible et sécurisé, on est tenté de croire en une réelle révolution du métier d’agent de voyage. Or, la lecture du texte de loi proposé ne reflète en rien ce qui a été annoncé, et semble tout au plus effleurer le sujet sans jamais approfondir.

Concernant la Gradation du système de licences, ce n’est pas une nouveauté, cela existait déjà dans la loi 1-76-395 qui prévoyait déjà des agences productrices ( Réceptifs) et des agences distributrices ( Billettistes) mais proposant exclusivement des prestations touristiques. Le fait aujourd’hui d’autoriser les agences B à exercer sans obligation d’exclusivité est à mon avis le meilleur moyen de galvauder la profession d’agent de voyage.

Ainsi, on pourra ouvrir une officine et y vendre de tout, une sorte de kiosque à journaux, bureau de tabac, vente de billet de loterie, cartes à puces pour Smartphones, glaces, cartes postales, timbres et occasionnellement du voyage.

Dans une grande surface ou une aire de repos sur l’autoroute, la loi permettra l’ouverture de points de vente voyage sans aucune qualification et surtout sans aucun contrôle de la prestation proposée au client, car je ne vois pas comment on pourra contrôler demain une multitude de points de ventes. On voudrait paupériser la profession qu’on ne s’y prendrait pas autrement.

Il faudrait maintenir l’exclusivité et ouvrir la profession vers la vente de services liés au tourisme et aux loisirs: contrats d’assurances voyages par exemple qui n’est pas autorisée aujourd’hui, billets de spectacles, billets d’évènements culturels et sportifs, excursions sous la responsabilité d’organisateurs contractuels.

Pour la vente online et à distance, la loi ne doit pas être restrictive aux seules agences nationales, mais également les agences online étrangères qui opèrent sur le territoire national sans se conformer aux lois en vigueur notamment en terme de fiscalité et de règlementation des changes.

C’est sur ce segment spécifique qu’il va falloir légiférer pour une meilleure compétitivité des agences de voyages nationales. Est il possible d’exiger des agences online étrangères d’avoir une domiciliation sur le territoire national et par là l’obligation d’avoir une licence marocaine ?

Pour les conditions d’accès à la profession d’agent de voyages, il est important d’avoir une formation selon que l’on soit en front ou en back office et cela doit être une exigence qui a été partiellement occultée dans ce projet de loi 11-16.

Une connaissance du produit est requise pour les agences B, ce qui nécessite l’organisation de voyages de familiarisation et la mise en place du E learning qui permettra d’authentifier la formation au métier de la vente du voyage, sanctionnée par au minimum un certificat d’aptitude.

Pour les licences du Type A, un Bac +3années à l’ISIT ou tout école de commerce qui propose une licence équivalente. Les lauréats de ces écoles seront nécessairement formé aux méthodes de l’économie digitale et pourront mettre en œuvre leurs acquisitions pour développer ces fameuses plateformes avec les applications qui vont avec.

Maintenant, il s’agit de savoir quel type d’agence de voyage nous souhaiterions développer pour faire la promotion de notre destination à l’ère de la révolution numérique qui privilégie le canal digital comme mode de communication incontournable.

La licence de type A devrait répondre à cette attente et nous permettre de développer des agences nouvelle génération avec une production et une distribution online, destinée à une clientèle étrangère mais aussi nationale. Ce type d’agence devra se doter de profils spécifique à même de developer des plateformes B to B et B to C.

Il est clair que les agences de type B, seront plus spécialisées dans la distribution et devront répondre à une demande interne que cela soit en matière de tourisme domestique ou de vente de séjour à l’étranger y compris le hadj et la Omra mais il faut savoir qu’elles sont d’ores et déjà frappées d’une obsolescence programmée avec la montée en puissance du digital. C’est ce qui est arrivé aux téléboutiques avec l’arrivée du téléphone mobile.

Quand à l’attribution des licences d’agences de voyages, il y a ceux qui pensent que la décision devrait être prise à l’échelon régional et prendre en compte la densité des agences par rapport au marché. Ce qui impose une régulation. Cette alternative serait en cohérence avec la régionalisation avancée, mais encore une fois, il ne faut pas oublier que nous nous dirigeons de plus en plus vers une dématérialisation et que demain une agence de voyage peut être hébergée aux Iles Caïmans et opérer au Maroc par la grâce d’internet. Dans ce cas, a t elle besoin d’une licence marocaine pour exercer ?

Devant autant de réalité, on est en mesure de se poser la question sur le bien fondé d’une tel projet de loi qui n’apporte à mon humble avis aucune amélioration par rapport à la loi actuelle et ne se projette pas dans l’avenir de notre profession. Aussi, il serait souhaitable d’y surseoir et de lancer une véritable réflexion.

Le texte en avant projet proposé sur le site du SGG appelle à nos commentaires en ligne et ce jusqu’au 18 Juillet avant son retour au Conseil du Gouvernement et son introduction au niveau des deux chambres du parlement.

Alors à vos claviers si vous voulez vraiment changer le cours des choses et prendre votre destin en main.

En attendant, je vous souhaite une bonne fin du Ramadan.


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