Il y a presque un an jour pour jour (le 24 juillet 2016), le village d'insertion des roms de Saint-Ouen était expulsé. Le 26 juillet, ils se retrouvent de nouveau sur les trottoirs après avoir été mis à l'abri dans un immeuble réquisitionné par le DAL Paris début septembre 2015...

Bref. Ils ont néanmoins trouvé un refuge à Cara durant près d'un an. Les enfants ont pu finir leur année scolaire. Certains adultes ont vu leur situation évoluer, tel Marius qui travaille depuis fort longtemps et s'est enfin vu attribué un " vrai " logement le 15 mai dernier après des mois d'errance d'hôtel en hôtel...
A Cara, même s'ils ont pu compter sur l'aide de leurs soutiens, l'année n'a pas été des plus simples. L'immeuble n'était plus entretenu par personne. Les poubelles n'étaient pas ramassées. Il y a eu des coupures d'eau, des vitres brisées, des canalisations explosées, un incendie... Mais aujourd'hui ils sont de nouveau sur le trottoir ! Une situation inadmissible due à la politique de William Delannoy, maire de Saint-Ouen, fermement décidé à " rénover " sa ville en vendant son parc immobilier (HLM, Maisons de colonies de vacances, Cara...) au privé, ce qui engendrera inéluctablement un accroissement de la précarité pour des centaines de familles déjà très touchées.
Le 25 juillet, ils ont compris en découvrant des palettes de parpaings au pied de leur immeuble qu'une page allait se tourner...
David, soutien
Saint-Ouen. Promis à la démolition, l'immeuble a vu hier le départ de ses occupants, dont de nombreuses familles.
Les 190 chambres de la tour Cara, rue Adrien-Meslier à Saint-Ouen, ont été évacuées hier matin. En tout, au moins 292 personnes y vivaient illégalement et dans des conditions déplorables. L'expulsion a été décidée, par jugement, le 6 novembre. Elle a été menée entre 6 h 30 et 8 h 30, sous la surveillance d'une centaine de policiers. " Beaucoup d'entre nous avaient été prévenus par le bouche-à-oreille, témoigne Ahmed, l'un des occupants expulsés. Certains ont attendu toute la nuit avec leurs affaires en bas de l'immeuble. "
Cet ancien foyer de jeunes travailleurs, élevé sur 14 étages, est promis à la destruction depuis 2014. " Nous avions quasiment terminé les relogements quand l'association DAL (Droit au logement) a organisé une occupation massive ", explique le maire (UDI), William Delannoy. En septembre, l'association a investi l'immeuble pour loger une centaine de personnes à la rue, surtout des familles, notamment roms. " Maintenant que la tour a été évacuée, nous allons pouvoir reprendre les démarches de démolition. Celle-ci devrait avoir lieu avant la fin de l'année. A la place, 150 logements, dont 30 % de logements sociaux, seront construits ", détaille l'élu.
Hier, des déménageurs ont vidé l'intégralité des chambres et les entrées ont été murées pour empêcher toute nouvelle installation. La tour est " dangereuse ", selon la préfecture. L'association qui gérait ce bâtiment a été mise en liquidation judiciaire il y a environ un an. Depuis, personne ne s'occupe de l'entretien ou de la gestion des logements. Au rez-de-chaussée, une fuite a provoqué une gigantesque flaque d'eau, les parties communes sont jonchées de déchets et envahies par les rats. Tout dysfonctionne, l'électricité, la plomberie...
Les tensions entre les occupants étaient fortes. " Il n'y a aucune sécurité incendie ", ajoute encore la préfecture qui dénonce le coup de force du DAL l'an dernier : " L'association s'est totalement désintéressée de l'entretien et de la gestion de cette tour, mettant les occupants qu'elle prétend aider dans des conditions de salubrité et de sécurité inacceptables. " Le DAL se défend : " Nous n'avons pas la compétence pour gérer un immeuble... Notre objectif était de mettre à l'abri des familles qui dormaient dehors, sans aucune solution. Là, elles vont retourner dehors. "
" Maintenant, je suis à la rue, nous sommes pleins dans ce cas, sans même un début de solution pour pas rester dehors ", témoigne Lorenzo qui vivait depuis un an dans la tour Cara. Parmi les habitants expulsés, la préfecture a identifié 110 personnes " vulnérables ". Celles-ci seront accueillies en hébergement d'urgence mais la préfecture n'a pas indiqué la durée de ce relogement. Les autres ont droit à trois nuits d'hôtel.
