Magazine Humeur

Je fus un des otages

Publié le 02 août 2016 par Parolededemocrate
Chaque été, il m'est impossible de ne pas revenir sur le drame de la guerre de Bosnie. Mes souvenirs sont noyautés de plein de noms de villes et villages martyrisés, pris au piège de la haine et de l'injustice, au coeur même de l'Europe moderne, dans des actes annonciateurs de nouvelles formes de guerres et préliminaires à des atrocités à venir qui non seulement n'ont pas cessé mais se sont développées un peu partout de manière plus effroyable et plus douloureuse. Ce qu'on vit aujourd'hui en Europe, à travers les attentats terroristes qui frappent d'innocentes victimes,n'est que le prolongement sous une autre forme des conflits du début des années 90 dont on a étouffé les flammes mais pas éteint les braises toujours brûlantes. 
Au coeur de l'Europe, on a laissé faire le massacre des innocents en Yougouslavie refusant de s'immiscer dans les affaires d'un pays en pleine crise économique et dont le nationalisme serbe devenait étouffant pour des peuples qui ne trouvaient plus leur place dans la fédération Yougoslave sous une direction absolue de Milosevic. L'inévitable pris la forme d'un divorce explosif entre des peuples qui laissèrent se défouler une haine meurtrière au détriment de tous. L'union vola en éclat sous le cri des martyrisés et le fracas des destructions. 20 ans plus tard, les peuples de l'ex Yougoslavie continuent à panser des plaies encore visibles.

Aujourd'hui, j'ai voulu donner la parole à un témoin vivant de ce conflit. Une infirmière bénévole de l'ex association Equilibre qui avait voulu apporter un peu de réconfort à des populations en détresse à ses risques et périls. A cette époque, elle était belle, mère de plusieurs enfants en bas âge, épanouie avec plein de généreuses idées dans la tête. Cette infirmière a roulé sa bosse, en Afrique mais aussi en Tchéchénie lors de la première guerre. Elle avait fait partie du célèbre convoi de camions parti ravitaillé les populations civiles très meurtries par les atroces combats entre l'armée russe et les indépendantistes tchèchènes. Elle s'est retrouvée aussi en Bosnie du côté de Bosna. Les souvenirs de plusieurs mois de missions bénévoles à travers le monde ne s'effacent pas d'un coup de baguette magique, ils sont ancrés en soi et certains faits d'actualités agissent comme des déclencheurs, réveillant des douleurs psychologiques. Quand je l'ai rencontrée, il y a quelques mois alors que j'entamais mes recherches bibliographiques, je m'attendais à croiser une femme usée par l'âge, le travail et surtout les souvenirs de ses missions humanitaires. Bien au contraire!, j'ai rencontré une femme pleine d'assurance, toujours aussi belle et encore une soif d'aider son prochain mais quelque chose de profond s'était brisé en elle. La peur avait fait son nid en elle. Les missions humanitaires, c'était du passé, fini et pour cause. La discussion avait été très nourrie, intense, enrichissante jusqu'au moment où elle évoqua sa vraie dernière mission, l'ultime, celle qui vous marque pour le restant de vos jours. de longues secondes s'écoulèrent avant de poursuivre l'échange autour d'un café qui avait fini par refroidir.

Elle connut ce que les associations humanitaires redoutent par dessus tout, une prise d'otages qui dans notre cas, allait durer plusieurs mois pas en Bosnie mais au Daghestan à  Makhatchkala, plus précisément. C'était un 2 août 1997. 
Cet été 1997, la situation était tendue dans le Caucase et les finances de l'association Equilibre n'étaient pas au mieux mais elle ne voulait pas abandonné les nombreux projets mis en place en faveur des populations civiles. L'association était devenue dans le domaine humanitaire incontournable et son président Alain Michel ne s'était pas fait que des amis dans le milieu. Il était sous tous les fronts et l'annonce de cette prise d'otages qui ne fut pas tout de suite annoncée au public allait être le coup fatal qui allait précipiter l'association dans le dépôt de bilan mais en attendant, la priorité était de savoir comment prendre contact avec les preneurs d'otages pour d'une part prendre des nouvelles de l'équipe de l'association "Equilibre" et surtout trouver rapidement les moyens de faire libérer le groupe d'humanitaires.
Et ce 2 Août 1997, les choses se présentaient très mal. 1 mois avant, dans la nuit du 1 au 2 juillet 1997, 
Christophe André était enlevé dans les locaux de MSF (Médecins sans frontières à Nazran, capitale de l'Ingouchie, république de la fédération de Russie et proche de la Tchétchénie. Des bandits Tchétchenes étaient soupçonnés dans l'enlèvement. Il faut savoir qu'en ces temps là, tous les moyens étaient bons pour se procurer des armes et ça passait souvent par les braquages, enlèvements avec demandes de rançons.

Le calvaire des otages de l'association Equilibre allait durer 3 mois et demi jusqu'à leur libération sains et saufs le 17 Novembre 1997.
Si je m'arrêtais ici, chers lecteurs, vous serez en droit de vous demandez pourquoi cet article. Qu'apporte t-il de plus à la compréhension de l'évènement qui s'est déroulé entre le 02/08/1997 et le 17/11/1997 plusieurs jours après que l'autre otage Christophe André réussit à s'échapper et après surtout une visite du président Jacques Chirac en Russie.
La suite, vous l'aurez  dans la matinée, dans l'interview que j'ai donné à cet ancien otage dont je suis dans l'obligation de taire le nom et qui pour la première se livre 19 ans après son enlèvement.

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Parolededemocrate 2305 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte