Le 10/08/2016
Pollution aux algues vertes dans la baie de Saint-Brieuc. - Photo Laurent Grandguillot/REA
Le phénomène est moins voyant en Bretagne, mais loin d'être éradiqué.
Il commence à gangrener une partie de la façade atlantique.
S'il y a une courbe dont l'inversion s'affirme d'année en année, c'est celle-là. Les surfaces d'algues vertes qui, aux beaux jours, se mettent à envahir les plages du littoral « costarmoricain » et effarouchent les touristes, sont en recul quasi constant depuis 2010. Le pic de 4.000 hectares, atteint un an plus tôt, s'éloigne et les niveaux observés culminent désormais aux alentours de 1.500 hectares. L'année 2016 ne devrait pas contrarier cette tendance. « On peut s'attendre à une diminution des surfaces au cours des prochains mois, si les conditions météo sont favorables », estime Nadège Rossi, chef de projet au Centre d'études et de valorisation des algues (Ceva).Les experts de cette structure, créée en 1982 et basée à Pleubian (Côtes d'Armor), commune littorale à l'épicentre des marées vertes bretonnes, mesurent au mètre carré près l'évolution du phénomène entre avril et octobre. Les surfaces relevées cette année au début de leur campagne sont très faibles. Elles n'ont pas atteint 100 hectares en mai. C'est trois fois moins que la moyenne de ce mois. Mais les chiffres ont été moins bons en juin à cause d'une pluie quasi incessante. Les cours d'eau ont gonflé et charrié davantage d'azote provenant des zones d'élevage et de culture, avant de finir leur course sur le rivage. Les experts du Ceva font le même constat pour juillet. En revanche, ils s'attendent à un mois d'août moins vert, pourvu qu'il reste sec.Des agriculteurs impliqués
D'autres indicateurs corroborent le recul de cette marée nauséabonde. Le tonnage d'ulves ramassées sur les plages du Finistère et des Côtes d'Armor diminue lui aussi. Le bord de mer de Pleumeur « produit » aujourd'hui 5.000 tonnes d'algues vertes, soit trois fois moins qu'il y a quelques années. Autre indication, les concentrations en nitrate, ce sous-produit de l'azote, relevées dans les rivières tendent lentement à baisser. En tout cas au niveau des bassins versants des huit baies visées par le plan de lutte contre les algues vertes que l'Etat et les collectivités locales mènent de concert depuis 2010. Dans leur majorité, les quelque 3.000 exploitants agricoles situés dans leur périmètre se sont impliqués. Fin 2015, presque les deux tiers d'entre eux (62 %) avaient signé une charte les engageant à modifier leurs pratiques agricoles pour réduire au maximum les « fuites d'azote ». Cela « confirme que les initiatives contractuelles, passées et actuelles, contribuent sur chaque territoire aux objectifs de reconquête de la qualité de l'eau », a salué la préfecture de la région Bretagne.Reste que l'objectif fixé, celui d'une réduction de 30 à 40 % de la concentration en nitrates n'a pas été atteint. « Les marges de progrès restent encore à conduire sur l'ensemble des huit baies », avouaient d'ailleurs les services de l'Etat. Conséquence, un nouveau plan de lutte couvrant la période 2017-2021 doit être arrêté d'ici à septembre.C'est dire si le problème des algues vertes n'est pas près d'être réglé. Pis, il ne se pose plus seulement en Bretagne. Toute une partie de la façade atlantique, de la Normandie à l'Ile de Ré, commence à être gangrenée. Et à entendre Nadège Rossi, il y a du souci à se faire. « A la différence du littoral armoricain, où elles se développent en semi-suspension dans l'eau, ces algues s'échouent sur les platiers rocheux, s'y s'accrochent et prospèrent au détriment des algues brunes qui créent des habitats et génèrent de la biodiversité », s'alarme-t-elle.Joël Cossardeaux, Les Echos
@JolCossardeauxEn savoir plus sur http://www.lesechos.fr/paris-climat-2015/actualites/0211186418812-littoral-le-lent-recul-du-front-des-algues-vertes-2019840.php?5Say1hX0SFbSIEfB.99#xtor=RSS41