Avec leur prolifération inexorable dans le monde « digital » et les moyens de plus en plus puissants que les technologies dites « big data » procurent pour les exploiter, les données sont en train de donner naissance à une économie spécialisée. Pour la première fois, une banque – l'australienne Westpac – prend position sur ce marché.
Naturellement, les institutions financières font partie des premières entreprises disposant d'une masse d'information extrêmement riche sur leurs clients, susceptible d'attirer les convoitises de bien des acteurs de tous secteurs. Ce n'est pourtant pas dans une optique de commercialisation de ces données que s'oriente l'initiative de Westpac, probablement trop inquiète, comme la plupart de ses consœurs, de possibles réactions négatives, potentiellement virulentes, de la part des consommateurs concernés.
Au contraire, la démarche de la banque s'inscrit profondément dans le cœur de son ADN, en capitalisant notamment sur ses valeurs de confidentialité et de confiance. Il s'agit en effet pour elle de prendre en charge la ségrégation et la conservation sécurisée des informations personnelles pour le compte de la plate-forme d'échange de données d'entreprise Data Republic (dans laquelle elle a investi – aux côtés de de sa concurrente NAB et de Qantas – pour un total de 10,5 millions de dollars, en mai dernier).
En pratique, l'infrastructure mise en place, baptisée Westpac Databank, hébergée dans les centres informatiques de l'établissement et bénéficiant de la sorte de toutes les protections en vigueur pour son activité bancaire, accueillera les données sensibles des partenaires de Data Republic. Elle leur apporte ainsi la meilleure garantie possible contre les risques de vols d'identité, de violation de la vie privée ou, simplement, en matière de gestion des accords de confidentialité avec les individus impliqués.
Pour mesurer l'intérêt de la séparation des données entre les deux acteurs, il faut comprendre que, pour les cybercriminels, des informations de « comportement » (de quelle que nature que ce soit) ont peu de valeur si elles ne peuvent être liées à une personne identifiable. Aussi, quand Data Republic attribue un code non significatif à chaque individu et que celui-ci ne peut-être associé à des données d'identité que dans la base détenue par la banque, les détournements deviennent beaucoup moins profitables.
Alors que, contre vents et marées (y compris la crise de 2008), les institutions financières continuent de jouir d'une confiance presque inébranlable de la part du grand public, loin devant (entre autres) les géants du web, elles possèdent par essence une position privilégiée pour devenir les garantes de la protection des données personnelles (dont les ressorts sont finalement proches de leur métier d'origine). Il est donc surprenant que des modèles du type de Westpac Databank ne soient pas déjà généralisés, quand l'économie de la donnée est actuellement en pleine expansion, parfois anarchique…