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Pourquoi les producteurs de lait bio s'en sortent mieux que les autres

Publié le 26 août 2016 par Bioaddict @bioaddict
Alors que la filière du lait est au plus mal, de plus en plus d'éleveurs laitiers français veulent passer au bio. Le fait est que ceux qui ont sauté le pas s'en sortent mieux que les autres - les conventionnels - et cela pour plusieurs raisons. Explications.

Un prix du lait rémunérateur en bio

Alors que certaines années, les laitiers conventionnels vendent à prix coûtant ou à perte (lait de vache) et peinent à s'octroyer un salaire, le prix du lait bio est rémunérateur. En 2015, il s'est vendu entre 420 € et 450 € les mille litres, contre 360 € à 380 € les mille litres pour le lait non bio. En 2016, le prix du lait non bio baisse encore. Pourtant les coûts de production entre les deux systèmes ne sont pas très éloignés.

Qu'est-ce qui explique cette différence ? Le prix du lait français non bio est imposé par les industriels (pour 85% des volumes). Il est calculé à partir des cours mondiaux de la poudre de lait et du beurre fabriqués à bas prix dans certains pays (Nouvelle-Zélande, Irlande). Les coûts de revient des producteurs français ne sont pas pris en compte. Conséquences : de nombreuses exploitations sont en faillite.

Négociation en direct avec les clients

En production biologique, les éleveurs laitiers négocient avec leurs clients, qu'ils soient transformateurs (beurre, yaourts, fromages...) ou distributeurs (Biocoop et autres enseignes). Le prix du lait bio n'est pas imposé. Il est établi en fonction des coûts de production et déconnecté des cours mondiaux. Il varie peu. Une surproduction peut cependant le faire baisser. Nombre de producteurs bio transforment et vendent en direct (sur les marchés parfois). Ils ont un contact direct avec leurs clients et une plus grande connaissance de leurs attentes.

Une plus grande autonomie

Ce qui pénalise l'éleveur conventionnel, c'est encore sa dépendance à ses fournisseurs. Les éleveurs bio produisent l'alimentation des animaux par eux-mêmes et ont moins besoin de se fournir à l'extérieur de la ferme. Même si leur chiffre d'affaires n'est pas plus important, leurs revenus nets sont meilleurs.

" Les éleveurs (non bio NDLR) aujourd'hui en difficulté ont des coûts de production bien trop élevés, car ils nourrissent les vendeurs de soja, de semences, de produits phytos (pesticides NDLR), etc... Ces derniers, privés ou coopératifs, n'ont aucun intérêt à ce que les producteurs soient plus autonomes ", explique Pascal Massol, adhérent de Biolait.

Une solidarité forte entre éleveurs

Biolait, la principale organisation de producteurs de lait bio créée il y a 20 ans, doit son succès à une très forte solidarité. Les premières années, le groupement a traversé une période difficile. Il a dû provisoirement cesser de ramasser le lait des adhérents trop éloignés des laiteries en raison de coûts trop élevés. Ces adhérents ont vendu leur lait en conventionnel mais les producteurs de Biolait ont décidé de leur apporter un complément de prix en partageant leurs revenus avec eux. De ce fait, ils n'ont pas renoncé à rester en bio.
Séduits par l'engagement de Biolait, de plus en plus d'éleveurs ont rejoint le groupement rendant les collectes de plus en plus rentables. Cette solidarité et une organisation performante ont permis le développement de l'offre de lait bio en France. Le slogan de Biolait est depuis le départ " la bio pour tous ". Le succès des produits de Biolait auprès des consommateurs a ensuite forcé la plupart des grands industriels laitiers à proposer une offre bio.

Une autre relation avec les animaux

Le bien-être des animaux est prioritaire en élevage bio. Les fermes " hors-sol ", où les animaux restent enfermés de leur naissance à leur mort, sont interdites. Le plein air, l'espace, sont le premier confort des animaux. En bio, les vaches laitières ne peuvent pas être plus de deux par hectare (il faut disposer de dix hectares de prairies par exemple pour un troupeau de 20 vaches), pour avoir suffisamment d'herbe et ne pas engendrer de pollution. Les animaux sont nourris à l'herbe en été et au foin en hiver, avec un complément de céréales. Les aliments sont produits en majorité sur l'exploitation ou à proximité, ils sont exempts d'OGM (soja ou maïs). Les soins sont naturels (plantes et homéopathie). Le recours à l'allopathie (antibiotiques par exemple) en cas de nécessité oblige à écarter l'animal de la traite. A l'étable, les litières sont propres et sèches (pas de caillebotis métalliques). Les laitiers bio privilégient les races rustiques, moins productives mais mieux adaptées au milieu naturel et plus résistantes aux maladies.

Une autre relation avec la nature

Les animaux bio broutent, ils participent ainsi à l'entretien des pâturages et des bocages qui séquestrent du carbone dans le sol et font la beauté des paysages. Les éleveurs n'utilisent pas d'engrais chimiques dans les prairies mais des fertilisants naturels comme bouses, fumier, compost, etc. Les désherbants sélectifs et autres pesticides y sont interdits. Les chardons, ronces et autres mauvaises herbes pour les animaux sont arrachées mécaniquement. L'empreinte écologique de ce type d'élevage est faible. Ces bienfaits sont une satisfaction supplémentaire pour les éleveurs.

Ainisi, les producteurs de lait bio sont mieux rémunérés et apprécient de plus une autre façon de pratiquer l'élevage, respectueuse des animaux et de la nature, qui ne peut rendre plus heureux.

Anne-Françoise Roger

Voir le règlement relatif à la production biologique sur le site de l'Agence Bio

Voir le film de témoignages de producteurs de lait bio adhérents chez Biolait

Voir le reportage d'Envoyé spécial. "Le bio : une solution économique et éthique à la crise"


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