Le pétrole a plutôt mauvaise presse en ce début de 21e siècle. Souvent décrié comme la source de tous les maux, il est encore parfois difficile de lui trouver un remplaçant pour certaines de ses applications. Mais des chercheurs comptent bien lui faire la peau… une bonne fois pour toutes.
Le plastique, cet allié dont il est difficile de se passer
Lorsque l’on parle pétrole, on pense tout de suite à automobiles, aux autres moyens de transport et éventuellement aux centrales électriques. Trop souvent, nous oublions que bien des objets de notre environnement en sont issus, principalement ceux faits de plastiques. Oui, pour ceux qui l’ignoraient encore, les plastiques sont tous issus du pétrole. Mais peut-être plus pour longtemps.
En effet, aussi surprenant que cela puisse paraître, c’est une équipe de recherche du Département de l’Agriculture des États-Unis (USDA) qui vient de dévoiler une membrane constituée de protéines de lait, les caséines. Ce sont elles qui constituent la majeure partie des composants azotés du lait et qui le transforment en fromage par précipitation lors d’ajout d’acides ou de présure. Elles tiennent d’ailleurs leur nom du mot latin caseus signifiant fromage.
Tandis que les premiers essais révélaient des problèmes de rigidité et de solubilité trop rapide dans l’eau, les chimistes ont finalement réussi à obtenir un film protecteur solide et souple en y ajoutant de la pectine d’agrumes, en bref, rien que du naturel. Peggy Tomasula, une des scientifiques du service de recherche de l’USDA, confirme d’ailleurs que ce nouvel emballage pourrait remplacer aisément le plastique et être utilisé tout le long de la chaîne de distribution fin d’éviter le gaspillage. En effet, le plastique est utilisé à toutes les sauces lorsqu’il s’agit d’alimentation. Que ce soit pour l’emballage ou même pour en faire des ustensiles et autres contenants de stockage. Le plastique a peut-être donc enfin trouvé son remplaçant.
Des caractéristiques pour le moins attrayantes
Les caséines offrent donc une réelle alternative aux plastiques d’emballage. En disposant de pores plus petits que ceux du plastique, cette nouvelle pellicule bloque l’oxygène 500 fois mieux que son rival, tout en étant biodégradable, mais aussi comestible.
Les caséines pourraient non seulement remplacer les plastiques d’emballage, mais aussi grandement aider à diminuer le volume de produits à recycler et à enfouir dans les décharges.
C’est en effet l’oxygène qui gâche le plus souvent la nourriture et cette nouveauté pourrait prolonger la durée de vie des aliments, éviter de nombreux gaspillages et la fameuse réflexion : «Oh non! On ne peut plus le manger, c’est passé date». À titre de rappel, nous jetons en moyenne au Canada 183 kg de nourriture par année, par habitant, soit environ un demi-kilo par jour.
Non contente de remplacer donc efficacement les plastiques d’emballage, cette matière pourrait aussi grandement aider à diminuer le volume de produits à recycler et à enfouir dans les décharges. Chaque jour, nous jetons presque trois fois plus d’emballage que de nourriture, soit plus d’un kilo. Cela représente des chiffres colossaux sur un an, soit plus de 400 kg de déchets par habitant. Sur cette masse, seuls 25% en moyenne sont récupérés ou recyclés tandis que plus de 50% d’entre eux sont des plastiques.
Sauver la planète grâce au lait?
Alors que des chercheurs se cassent la tête à essayer de trouver des solutions pour récupérer les plastiques qui seront bientôt plus nombreux que les espèces marines dans l’océan, d’autres s’attaquent à la source du problème. Pensez-y la prochaine fois que vous utiliserez un sac plastique pour 20 minutes alors qu’il prendra entre 100 et 400 ans à se dégrader au point de disparaître.
Un exemple de la pollution qu’engendrent les résidus plastiques (Photo : Shaahina Ali).
Mais la beauté de cette découverte est qu’elle ne se limite pas au remplacement des plastiques eux-même, puisqu’elle peut aussi se présenter sous la forme d’un liquide qui peut être pulvérisé. Ainsi, plutôt que d’utiliser du sucre, par exemple, pour que les céréales conservent leur croquant, les manufacturiers de l’agroalimentaire pourront aisément le remplacer par cette substance, rendant le tout plus «santé».
Malheureusement, les humains étant ce qu’ils sont, les chercheurs s’attendent à ce que l’emballage extérieur ne soit pas fait de cette matière, car elle est comestible. Elle permettrait donc à n’importe qui de prendre une bouchée à même le produit emballé et causer donc des pertes aux commerçants.
C’est pour quand?
L’avantage de cette découverte est qu’elle a été réalisée au sein du Département de l’Agriculture des États-Unis et que du coup, elle pourrait être plus rapidement poussée sur le marché en passant les réglementations mises en place par le département lui même. Il ne reste plus qu’à espérer que les lobbys du pétrole et des plastiques ne mettent pas leur nez dedans et relèguent aux oubliettes cette découverte qui pourrait nous sauver de millions de tonnes de déchets dans nos décharges, mais surtout, dans nos océans.