97 % de la « production » de services à la personne n'est pas externalisée
La Direction générale du Trésor a publié une note sur La politique de soutien aux services à la personne. Elle propose des "pistes pour accroître le développement" des services à la personne, comme la simplification des aides et une réforme de l'avantage fiscal dont bénéficient les particuliers employeurs.
La politique de soutien aux services à la personne
La Direction générale du Trésor du Ministère des Finances et des Comptes publics et Ministère de l'Économie de l'Industrie et du Numérique vient de publier une note sur La politique de soutien aux services à la personne. Les activités de services à la personne répondent à des besoins spécifiques aux différents âges de l'existence (petite enfance, personnes âgées...) dans un contexte de changement de modes de vie (participation accrue des femmes au marché du travail notamment).
Selon l'Insee, 97 % des tâches de services à la personne ne sont pas externalisées : un adulte français passe 3 heures par jour pour de telles activités, jusqu'à 5 heures par jour pour les femmes vivant en couple avec enfant. L'externalisation des SAP hors travail au noir ne représente que 4 minutes par jour et par adulte, soit un taux d'externalisation de près de 2 % des activités réalisées au sein des ménages. Il y a donc un fort potentiel de développement.
Les services à la personne recouvrent à la fois :
- des services pour les publics fragiles (personnes âgées, personnes dépendantes, enfants en bas âge)
- des services d'aide à la vie quotidienne (entretien du logement, repassage, soutien scolaire, jardinage, petit bricolage).
Des aides publiques
L'état soutient actuellement le secteur des services à la personne pour deux principales raisons :
- pour rendre les prix des prestations de services à la vie quotidienne déclarés comparables au coût du travail non déclaré,
- pour assurer un accès universel aux services d'aide aux publics fragiles quel que soit leur niveau de revenu.
Une quinzaine de mesures existent sur le secteur que ce soit du côté de l'offre (exonérations de cotisations sociales, TVA réduite...) et la demande (avantages fiscaux, aides directes...).
L'ensemble de ces mesures sont toutes liées car elles impactent toutes le prix payé au final par le consommateur. Le Trésor préconise de réduire la complexité et l'instabilité du cadre socio-fiscal pour favoriser le développement du secteur.
Les Services d'aides à la vie quotidienne rapporte à l'état
Il est courant d'entendre que les services à la personne coûtent cher à l'état et ne favorisent que les plus aisés. Or, il ressort de la note du Trésor que le montant des dépenses fiscales et des niches sociales en faveur du secteur est évalué à environ 6,4 Md€ en 2014.
Si on intègre les aides directes versées (en particulier par les conseils départementaux), le coût brut de l'action publique en matière de services à la personne s'élèverait in fine à un peu moins de 11,5 Md€.
L'analyse de l'impact sur les finances publiques montre que la situation est contrastée en fonction de l'activité concernée :
Les dépenses publiques dont bénéficie le secteur des SAP se chiffrent à près de 7 Md€ :
- 4,9 Md€ d'aides directes
- 2 Md€ au titre du crédit d'impôt sur le revenu pour l'emploi d'un salarié à domicile.
La prise en compte des recettes fiscales et sociales générées par ces activités permet d'en calculer le solde pour les finances publiques : il serait équilibré pour les services à la vie quotidienne (très léger gain de 70 M€) et déficitaire de 2,8 Md€ pour les services d'aide aux publics fragiles.
La composition des aides est par ailleurs très différente selon le type d'activité considérée :
- Toutes les activités bénéficient d'exonérations à hauteur de 25 % du soutien public.
- Les publics fragiles bénéficient massivement des aides directes (64 % du soutien public) et peu (11 %) de l'avantage fiscal sur le revenu (réduction et crédit d'impôt). Cette part relativement faible de l'avantage fiscal dans les dépenses d'intervention en faveur des publics fragiles découle à la fois de l'importance des aides directes qui interviennent en amont de l'avantage fiscal et du non accès au crédit d'impôt pour les personnes âgées qui ne remplissent pas la condition d'activité. Par conséquent, ces publics ne peuvent bénéficier que de la mesure de réduction d'impôt, moins favorable car fonction du montant de l'impôt dû.
- À l'inverse, l'avantage fiscal est déterminant dans la réduction du reste à charge pour les services à la vie quotidienne : il représente 66 % du total des dépenses d'intervention. Les aides directes n'interviennent qu'à hauteur de 11 % de l'ensemble des dépenses d'intervention. Elles sont principalement limitées à la participation financière des caisses de retraite dans le cadre des plans d'actions personnalisés (PAP) destinées aux personnes âgées non dépendantes (GIR 5 ou 6).
Préconisations du trésor
Le Trésor termine sa note par une liste de préconisations :
1) Encourager le recours aux services à la personne pour les catégories intermédiaires de revenu ou d'âge qui sont peu utilisatrices et qui pourraient utiliser plus les services à la vie quotidienne dont le solde pour les finances publiques est équilibré.
2) Simplifier les dispositifs et réfléchir sur les possibilités offertes par le numérique (dématérialisation des paiements des prestations et du versement des aides). Le Trésor indique qu'un reste à charge même inférieur au prix du travail au noir peut ne pas suffire face à des aides complexes et mal connues du grand public.
3) Réfléchir à la pertinence de l'avantage fiscal au titre de l'impôt sur le revenu : les ménages les plus modestes, n'ont pas pleinement accès à l'avantage fiscal en raison de la condition d'activité attaché au crédit d'impôt ou faute de disposer de revenus suffisants pour bénéficier d'une réduction d'impôt à 50 % de leurs dépenses de SAP.
4) Revoir le décalage temporel entre la dépense et l'avantage fiscal qui est récupéré en moyenne 12 mois après la dépense.
5) Réfléchir sur le niveau du plafond des dépenses éligibles à l'avantage fiscal (actuellement de 12 000 € hors majoration) sachant que la dépense moyenne des ménages utilisateurs de SAP est de l'ordre de 2400 €.
6) Encourager le dialogue social au sein des branches et promouvoir dans les entreprises les dispositifs permettant d'augmenter le recours aux Services à la personne : CESU-RH, CESU préfinancé...
7) Trouver des solutions aux problématiques très présentes dans le secteur des services à la personne : recrutement (comment expliquer que les entreprises de services à la personne aient autant de difficultés à recruter?), professionnalisation, qualité de l'emploi, qualité du service rendu...
Il faut espérer que la Direction du Trésor sera entendue et que des changements allant dans le bon sens permettront enfin de développer pleinement les services à la personne.
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