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FNE : "la PAC doit réconcilier agriculture, environnement et alimentation"

Publié le 01 septembre 2016 par Bioaddict @bioaddict
A la veille de la réunion des ministres de l'agriculture européens concernant l'avenir de la PAC (Politique Agricole Commune), l'association France Nature Environnement publie une lettre ouverte au Ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll. "La PAC de demain doit reconnecter et réconcilier agriculture, environnement et alimentation. Il ne s'agit pas de dépenser plus mais de dépenser mieux, de faire de la PAC une politique publique qui profite bien plus non seulement aux agriculteurs mais aussi à l'ensemble des citoyens" explique FNE.

Voici la lettre ouverte, publiée le marcredi 31 août, par FNE :

LETTRE OUVERTE À MONSIEUR STÉPHANE LEFOLL, MINISTRE DE L'AGRICULTURE


Monsieur le Ministre,

Le 2 septembre prochain, à votre initiative, les ministres de l'agriculture européens se réuniront à Chambord pour échanger sur l'avenir de la PAC et les enjeux agricoles dans une Europe à 27.

France Nature Environnement (FNE) et le Bureau Européen de l'Environnement (BEE) se félicitent de cette initiative.

Les crises environnementale, sociale et économique affectant le secteur agricole sont alarmantes et remettent en cause la légitimité de la PAC. Les nombreuses évaluations parues à ce jours 'accordent toutes qu'elle n'atteindra pas ses objectifs initiaux, notamment la gestion durable des ressources naturelles.

Ces ressources, telles la biodiversité, l'eau ou le sol dont le futur de l'activité agricole dépend sont en déclin constant. Si l'on regarde la France, les populations d'oiseaux des milieux agricoles ont reculé de 32% en 25 ans, celle des papillons de prairie de 50% et la consommation de pesticides continue d'augmenter. Le coût de la pollution agricole sur l'environnement est chiffré en France entre 0,9 milliard et 2,9 milliards d'euros par an, les problèmes de santé publique liés à l'agriculture intensive (pollution de l'air, de l'eau..) ne font que croître et les agriculteurs eux-mêmes en sont les premières victimes.

La course à l'industrialisation et aux prix bas emmènent l'agriculture européenne dans l'impasse. Ces systèmes sont en contradiction avec les fondements d'une agriculture durable, et donc de l'agro-écologie. La PAC actuelle, censément " verdie ", autorise pourtant la culture et l'utilisation de pesticides sur les surfaces d'intérêt écologique, n'incite qu'à une caricature de diversification de l'assolement en confortant notamment la monoculture du maïs. Elle n'accorde aux mesures agro environnementales et à l'agriculture biologique que des financements très insuffisants. Ce faisant, elle conforte le système délétère actuel au lieu de favoriser une agriculture moins dépendante des intrants, plus résiliente et moins polluante.

Le changement climatique vient dès lors exacerber une situation déjà difficile pour l'agriculture européenne, qui doit à la fois adapter ses systèmes de production et aussi participer à l'atténuation des émissions. A cela, le contexte politique européen instable et la remise en cause de l'union des 28, viennent rajouter de nombreuses incertitudes sur l'avenir de l'Union Européenne et de ses politiques.

Pour France Nature Environnement et le Bureau Européen de l'Environnement, le verdissement actuel n'est pas acceptable. Alors que l'Union Européenne dépense 53 milliards d'euros par an pour la PAC, l'Agence Européenne de l'Environnement observe que l'agriculture porte atteinte gravement à la biodiversité des milieux ruraux et pollue 40% des rivières. Si la PAC ne contribue pas fortement à résoudre ces problèmes majeurs, elle n'a plus de légitimité. Le contribuable européen ne continuera pas à financer l'agriculture d'une part et la dépollution générée par les systèmes productivistes d'autre part.

La PAC d'après 2020 doit être celle qui reconnecte et réconcilie agriculture, environnement et alimentation, la PAC de demain se doit d'être un nouveau contrat entre les agriculteurs et la société les aidant à transiter vers des pratiques durables. Il ne s'agit pas de dépenser plus mais de dépenser mieux, de faire de la PAC une politique publique qui profite bien plus non seulement aux agriculteurs mais aussi à l'ensemble des citoyens.

Les ONG environnementales avaient sollicité un budget fort pour la PAC à condition que celle-ci permette une gestion durable des ressources naturelles. Au final le budget a été effectivement sécurisé mais le verdissement a été réduit à une coquille vide.

Nous ne soutiendrons le prochain budget que lorsque son contenu sera défini en cohérence avec les objectifs communautaires en matière d'environnement, de santé et d'alimentation. La PAC doit être l'un des principaux moyens d'une refondation de l'Union Européenne en rassemblant nos concitoyens autour d'un projet ambitieux et généreux. Ceci passe par un examen approfondi de la Politique et d'une évaluation en détails de ses objectifs, de sa cohérence ou non avec d'autres politiques comme l'environnement, la santé, les politiques de développement et de sa raison d'être. Cet examen doit être inclusif et avoir lieu le plus en amont possible. Il ne peut se faire que dans le cadre du bilan complet ('fitness check') demandé par plus de 100 ONGs au Président de la Commission Européenne.

Nous fondons beaucoup d'espoir sur la rencontre du 2 septembre et sur la dynamique qu'elle pourra insuffler à la préparation de la future PAC.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de notre plus haute considération.

Denez L'Hostis, Président de France Nature Environnement (FNE)

Jeremy Wates, Secretary General, Bureau Européen de l'Environnement (BEE)


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