Suite du récit épistolaire du fiston à Madagascar.
Nouvelles d'un vazaha, chapitre 8-mi temps
Salama (bonjour). J'ai écrit il
n'y a pas longtemps mais désolé, ça vient suivant l'inspiration. Alors petit
bilan à mi parcours. Qu'est ce que je fais là ? J'ai déjà expliqué pourquoi je
suis parti: la France ne me correspondait plus. Alors je me retrouve là, face
au canal du Mozambique, je viens d'avoir 40 piges et je suis donc à la moitié
de ma vie comme à la moitié de ma première année à Madagascar. Réfléchissons :
est ce que les amis me manquent ? Pas vraiment. On ne se réuni qu'une fois par
mois à peu près, et encore y a jamais tout le monde. Donc on ne peut pas dire
que ça manque. La famille ? À part mes frangins et mes parents, pour le reste
c'est même pire que les amis, on ne se voie qu'une fois par an. Et malgré cette
irrégularité dans nos réunions, y a toujours des embrouilles, donc ça ne manque
pas non plus. L'actualité française ? Météo, politique et maintenant burkini et
Pokémon Go. Non mais franchement allo quoi !!?? Chacun son truc mais perso,
tout ça ne me manque pas non plus.
J'ai tout essayé: mariage,
maison, travail, enfants, la jolie voiture, le petit chien... Avec plus ou
moins de réussites, je pense avoir fait le tour. Alors j'ai réalisé le rêve de
plusieurs milliers de français, à savoir partir vivre au soleil. Est ce que je
me sens mieux ici ? Franchement, je pense que seul le temps le dira. Pour
l'instant oui. Bon ok, je ressens un petit décalage culturel. Ils me font chier
avec leur histoire de porc qu'il faut pas manger avant d'aller à l'océan car
c'est une viande sale, alors qu'eux même laissent leurs déchets sur la plage...
Leur problème à eux, mes malgaches, est résumé par le titre de leur hymne:
"oh terre des ancêtres". En fait, ils ont gardé trop de choses que
leur avait dit leurs arrières arrières grands pères, sans savoir si ça voulait
dire quelque chose. Dans certaines régions du sud, y en a qui ne mangent pas de
poulet parce qu'il y a longtemps, un sorcier s'est fait piqué l'œil alors qu'il
essayait d'attraper une poule sous le lit... Certains crèvent la dalle, y a des
poulets qui courent partout sous leurs yeux, mais ils n'y touchent pas à cause
du vieux qui a dit que la poule était maudite ...
Mais tout ça ne m'empêche pas de
vivre. Perso, je mange ce que je veux quand je veux et ils ne m'emmerdent pas.
Ici je branle pas grand chose, j'ai pas la tv, internet j'achète du forfait
uniquement pour le boulot... pourtant je ne m'ennuie pratiquement jamais. Mon
seul contact avec l'Occident: Facebook, qui est gratuit, le matin pour le caca,
le midi pour la sieste, le soir pour m'endormir. J'ai jamais autant été sur
Facebook ! En fait, le mauvais réflexe que j'avais souvent en France quand
j'avais rien à faire, c'était d'allumer la tv. Aujourd'hui je ne critique pas,
j'étais le 1er à me marrer aux conneries d'Hanouna, par exemple. Et ça fait du
bien, après une journée de taf de se détendre de cette façon. Mais maintenant
que je n'ai plus la télé, je m'aperçois que je prend plus de temps pour moi:
lire, écrire, réfléchir... C'est con mais je me rend compte que je ne prenais
pas beaucoup de temps pour me poser, c'est pour ça que je faisais les choses
par automatisme mais pas par plaisir. C'est une sensation bizarre.
Ici j'ai mes petits projets que
je vais essayer de mettre en place dès l'année prochaine, questions de moyens.
Je n'en parle pas par superstition mais j'espère que ça en fera venir quelques
uns d'entre vous. Objectif: 3 ans, après avoir bâti une maison et créé des
entreprises que j'espère rentables.
Et après, visite de l'île. Comme
j'ai fait en France avec ma petite 106 et un fourgon, je prendrai un 4x4 et je
tracerai. Bon la différence, faut le reconnaître, c'est qu'ici je ne pourrai
pas dormir dans la bagnole à cause de la sécurité. Mais c'est pas grave. Tu
trouve toujours un hôtel à 10 balles la nuit. Y a tellement à voir ici aussi. Madagascar
est plus grand que la France métropolitaine, c'est à dire si on ne compte pas
la superficie des DOM-TOM. Donc je devrai me régaler. Alors voilà, le bilan à
mi parcours n'est pas si mal, y a encore tant à faire... Cette expérience me
fait prendre conscience d'une chose: même quand on croie avoir fait le tour de
ce qu'on devait réaliser, même à 40 ans, on a la vie devant nous.
En attendant, j'aurai essayé le
paddle surf. Bein c'est pas pour moi. C'est agréable d'être sur la mer, sauf
que c'est trop physique pour moi, je n'y trouvais pas de plaisir. Je préfère
encore le canöé, tu es au raz de l'eau, tu peux profiter du paysage. Le paddle,
t'es debout donc tu peux pas profiter de la même façon. Même s'il est plutôt
facile de tenir l'équilibre, ça demande quand même une certaine concentration.
Et même le mono tombe de temps en temps, s'il se déconcentre sur des vagues. En
fait, ça s'apparente à de la muscu, sauf que t'es en plein air: il faut
regarder droit devant et pagayer, pagayer... Et quand t'as le vent ou le
courant contre toi, t'en chie pour faire du quasi sur place. J'ai réussi à
prendre quelques vagues sans tomber, des petites de 50 cm, faut être honnête.
Là c'est sympa mais c'est trop bref. Tant pis pour moi. Je vais me faire un peu
de natation et ça ira, je veux rentrer en France tel un Gérard Darmon dans Le
grand pardon 2, quand on le retrouve exilé au Panama, svelte et bronzé. On peut
toujours rêver mais faut que je fasse quelque chose pour mes tétons qui
pointent, sur une femme c'est excitant mais là, c'est pas esthétique.
Donc la vie continue, elle est
belle, profitez en !
Ba
be (grosses bises)