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La Rochelaise préside le WWF France depuis 2009. Elle explique l’action de l’organisation dans la protection des océans.
Isabelle Autissier, et le petit panda, mascotte du WWF.© PHOTO PASCAL COUILLAUDLa 44e édition du Grand Pavois sensibilise ses visiteurs à la protection des océans, au travers d'une exposition dont le World Wildlife Fund (WWF) est partenaire. La navigatrice et écrivain rochelaise Isabelle Autissier préside depuis 2009 la branche française de l'organisation.
Sud Ouest Vous rentrez d'une expédition au Groenland. Vous avez aussi longtemps parcouru l'océan entre la Terre de Feu et l'Antarctique. Quel est le sens de ces expéditions ?Isabelle Autissier J'aime ces mers, elles sont intéressantes, un peu compliquées. J'y navigue en essayant de monter des projets, qu'ils soient culturels, sportifs, et si je ne trouve pas de projet, j'y vais quand même (sourire). Cet été, c'était avec des alpinistes. Et bien sûr, je fais aussi un certain nombre de constats sur la dégradation de l'environnement.Des observations de quel ordre ?Cette année, nous sommes entrés de 10 kilomètres après la limite théorique d'un glacier figurant sur une carte. Au moins de juillet, nous aurions dû avoir beaucoup plus de glace que ce que nous avons vu.Au sud, la dégradation de la planète est moins flagrante qu'au nord où le réchauffement climatique est deux fois et demie plus rapide. Mais à l'échelle de dix années de navigation dans ces océans, j'ai vu des endroits devenir des îles, parce que le pack avait reculé.La conférence climat de Paris vous rend-elle plus optimiste sur la prise en compte du problème ?J'ai arrêté d'être optimiste ou pessimiste. En revanche, ce dont je suis sûre à 100 %, c'est que si nous ne faisons rien, nous allons dans le mur ; les phénomènes s'accélèrent. Il n'y a pas d'autre solution que faire le plus vite possible, pour souffrir le moins possible.Copenhague il y a cinq ans a été un échec et personne n'a bougé. Paris a été un succès, ça commence à bouger au niveau mondial. La diplomatie française a été assez efficace. Ce n'était vraiment pas gagné que les 197 pays signent. Les ratifications ont commencé. On a le signal politique. Il faut à présent que cela se traduise au niveau économique, des collectivités, des citoyens.Ne croyez-vous pas que l'on culpabilise en permanence les citoyens pour mieux masquer l'inertie des États sur le sujet ?Non. On dit juste les vérités. Changer, c'est passionnant, cela peut créer plein d'emplois, et c'est plutôt l'avenir. Proposer de faire plus intelligemment, non, ce n'est pas culpabilisant.Comment appliquez-vous à vous-même la nécessité de changement ?Depuis dix ans j'ai évolué. J'étais comme tout le monde, je ne faisais pas forcément très gaffe. Aujourd'hui, je ne mange que bio, je fais du vélo à La Rochelle, je ne prends que les transports en commun… Bon un peu d'avion aussi, mais parce que je n'ai pas d'autre choix. Et je vis mieux. Je pense que le bio et le vélo c'est mieux pour ma santé que le chimique et la bagnole.L'exposition Saxoprint-WWF au Grand Pavois pointe surtout la pollution et la surpêche. Un peu restrictif pour décrire tous les maux dont souffrent les océans, non ?Nous avons laissé les créateurs choisir. C'est vrai qu'ils ont répondu sur la surpêche et la pollution, deux thématiques vraiment importantes. Mais il y a aussi le réchauffement, l'acidification, autres sujets très graves, mais peut-être moins visuels, moins inspirants.Je suis contente de ce travail. Il faut continuer à communiquer sur ces problèmes. L'art est aussi une forme de message. On n'est pas obligés de faire que des tracts. C'est super d'être ici au Grand Pavois, nous avons beaucoup d'espace pour exposer.Quel rôle le WWF joue-t-il précisément ?Nous agissons dans deux grands domaines. Le premier : essayer de sauvegarder la nature et les mécanismes naturels qui sont encore à l'œuvre. Le second : modifier l'empreinte écologique, c'est-à-dire modifier nos modes de vie pour arrêter d'être des prédateurs. Ça se décline de différentes façons. Au niveau des océans par exemple, c'est tout le travail sur les réserves et les parcs marins. Comment on identifie les « hot spots » de biodiversité (1), comment réunir les États, les collectivités, les usagers pour fabriquer un parc marin, etc. S'agissant de notre empreinte écologique, nous travaillons avec les distributeurs des produits de la mer, la grande distribution, sur des garanties de traçabilité de leurs produits, pour éviter la pêche pirate. Un exemple : avec Carrefour, nous avons fixé des objectifs pour atteindre à un moment 100 % de poisson certifié Marine stewardship council (NDLR, label de pêche durable) sur leurs étalages.Quels souvenirs personnels le Grand Pavois (2) vous évoque-t-il ?(Sourire). C'est ma petite madeleine. Le rendez-vous de l'automne, le rendez-vous où vous croisez les gens. C'est bien d'avoir envie d'aller sur l'eau à la voile, mais essayons d'y aller en faisant attention à ce que nous faisons.Il n'y a pas beaucoup de domaines où l'on échappera à la modification de notre façon de vivre.À bord d'« Ada 2 », votre voilier, quelles précautions prenez-vous ?J'ai un hydrogénérateur. Lorsque j'avance à la voile, je fabrique mon énergie. Je suis autonome et je n'ai pas besoin de pétrole sauf lorsque je reste longtemps au mouillage ou dans un port. Cet été, nous nous sommes organisés pour ramener les poubelles de six personnes qui ont passé deux mois en mer. Nous avons bien écrasé nos déchets, bien déchiquetés ce qui devait l'être. Ca demande de s'organiser un peu.(1) Les points chauds de biodiversité sont caractérisés par une exceptionnelle concentration d'espèces endémiques et un risque sérieux de dégradation. (2) Le salon ouvre aujourd'hui et demain, de 10 à 19 heures.http://www.sudouest.fr/2016/10/02/ses-constats-alarmants-2520585-1391.php