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Luke Cage (2016) : l’ombre de Harlem

Publié le 05 octobre 2016 par Jfcd @enseriestv

Luke Cake est une nouvelle série de 13 épisodes qui ont été mis en ligne le 30 septembre sur le site de Netflix. Adaptation d’une des bandes dessinées de Marvel, son héros ici (Mike Colter) vit presque incognito dans le quartier de Harlem sur lequel règne sans partage Cornell Stokes (Mahershala Ali), alias Cottonmouth. Fusillades, pauvreté et pots-de-vin : c’est le quotidien de la population qui aurait bien besoin d’un sauveur… C’est autour de cet homme, de couleur noire faut-il le rappeler, que tourne toute cette série qui dès le départ réussit à attiser notre curiosité, ne serait-ce que pour son ancrage dans l’actualité. Pourtant, le charme se dissipe au cours des deux épisodes suivants avec une enquête aussi lente que vaine et le principal intéressé qui persiste à ne pas vouloir se mouiller… alors qu’on sait très bien qu’il le fera lorsque poussé à bout.

Luke Cage (2016) : l’ombre de Harlem

D’actualité, mais pas le premier

Luke a un passé criminel, ce qui explique pourquoi il n’accepte que des emplois qui paient sous la table, comme plongeur ou barman dans le « Harlem’s Paradise », l’immense club de Stokes, mais il fait aussi le ménage chez le barbier Pop (Frankie Faison), son mentor puisque comme lui, il s’est par le passé tenu à l’écart de la loi, mais s’est depuis racheté. Pendant ce temps, on a deux adolescents, Maleek et Chico (Brian Sene Marc) qui ont l’inconscience de s’attaquer à une livraison d’armes illégales et de s’emparer d’une importante somme, après avoir tué un homme de Stokes. Ce sont les détectives Mitsy Knight (Simone Missick) et Rafael Scarfe (Frank Whaley) qui sont sur le dossier et ils parviennent à localiser Chico qui a trouvé refuge chez Pop. Par excès de zèle, l’un des employés de Stokes qui a eu vent de la cachette du jeune homme décide de mitrailler le salon de coiffure et de récupérer l’argent, laissant pour mort le barbier. Mais ce qui surprend surtout Mitsy, c’est que Luke qui se trouvait sur les lieux du crime n’a aucune blessure. Ce qu’elle ne sait pas, c’est que suite à une exposition à un produit radioactif dans son enfance, l’homme est devenu invincible physiquement, tout en possédant une force herculéenne. Pour le moment, il évite de s’en servir, mais l’acharnement de Stokes à son égard et celui de ses proches pourrait bien le faire sortir de ses gonds… éventuellement.

L’un des points forts de l’univers de Marvel est sans conteste la grande diversité de ses super héros. En effet, seulement pour les adaptations de Netflix, on a Matt Murdock alias Daredevil qui est aveugle et Jessica Jones qui est une femme. Avec Luke Cage, le super héros est noir, mais c’est loin de se limiter au seul physique du personnage comme l’a souligné le créateur de la série Cheo Hodari Coker dans cette phrase toute simple, mais qui en dit long : « the world is ready for a bulletproof black man ». En effet, ce n’est pas un hasard si on a décidé d’adapter cette anthologie qui se déroule dans les quartiers pauvres de New York où la criminalité est légion. Dans cet univers, on compte les personnages blancs sur les doigts de la main et encore, ils n’ont à peu près pas de pouvoirs dans le fonctionnement de la ville. De ce fait, il n’y a qu’à conclure que le crime encourage le crime dont la décadence suprême est incarnée par le personnage de Stokes. De ce cercle vicieux qui fait évidemment écho à la réalité, Luke Cage fait figure d’exception en ne prenant pas part aux conflits et magouilles autour de lui. Dans le même sens, c’est le seul à ne pas utiliser le mot « negro » et même à se fâcher lorsqu’il l’entend, alors que c’est de monnaie courante, même entre Noirs. Ensuite, le fait qu’il soit décrit par son créateur comme étant imperméable aux coups de feu nous renvoie évidemment aux tueries policières qui font l’actualité au pays de l’oncle Sam depuis plusieurs années. C’est bien simple : le seul fait de bien se conduire l’immunise et le transforme en superhéros, ce qui est déprimant quand on y pense.

Luke Cage (2016) : l’ombre de Harlem

Va pour la métaphore, mais est-ce que Luke Cage est vraiment une série pionnière à ce sujet ? Pas du tout. Depuis au moins deux ans les diffuseurs, incluant les principaux networks n’hésitent pas à mettre en scène un casting entièrement noir sans que l’on craigne que ça affecte l’auditoire. Du soap Empire de Fox en passant par des comédies comme Atlanta de FX, un dessin animé comme Legends of Chamberlain Heights (Comedy Central) ou un drame comme Queen Sugar (OWN): toutes traitent à leur manière de racisme, de brutalité policière, de pauvreté et de toxicomanie. Sous cet angle, la nouveauté de Netflix ne fait qu’apporter de l’eau au moulin, sans plus, mais si on en parle tellement, c’est grâce à l’excellente visibilité médiatique dont jouit Netflix.

Luke Cage (2016) : l’ombre de Harlem

Une formule déjà essoufflée

Le premier épisode éveille définitivement notre curiosité. On installe tranquillement l’univers de Harlem où il fait presque toujours nuit et où les teintes chaudes d’orange et de rouge dominent. La prudence de Luke dans un premier temps est logique, mais son obstination à ne pas sortir de sa léthargie au cours des épisodes 2 et 3 finissent par nous lasser, d’autant plus que la dynamique des Marvel est de notoriété publique assez simpliste : la lutte entre le bien et le mal. Sans que l’on ait recours systématiquement à des affrontements pour égayer le téléspectateur, le récit manque de tensions et comporte des scènes de dialogues qui s’éternisent, notamment entre Stokes et Mariah Dillard (Alfre Woodard), une conseillère municipale qui blanchit volontiers son argent, mais qui se montre systématiquement indignée dès qu’il fait quelque chose d’illégal.

Pour le moment, tout ce que Netflix se contente de faire est d’ajouter une scène choc en toute fin d’épisode afin de s’assurer que l’on passe le plus rapidement possible au suivant, et ainsi de suite, ce qui est un minimum pour un service qui offre tous ses épisodes d’un coup. Luke Cage, malgré la disponibilité de toute sa première saison est lancée en même temps que les nouveautés des networks et du câble aux États-Unis et c’est sans compter tous les marchés locaux dans le monde qui lancent eux aussi leur saison télé d’automne. Dans cet embouteillage sériel, la nouveauté de Netflix n’est pas une priorité. D’ailleurs, avec une première saison d’Iron First attendue le 17 mars 2017, une seconde pour Daredevil (le lendemain) et Jessica Jones en plus de The Defenders attendue la même année réunissant tous ces protagonistes et éventuellement The Punishers, Netflix semble de plus en plus obsédée par les abonnements, délaissant ainsi créativité et diversité à l’instar du cinéma hollywoodien qui explore le même terreau avec ses mégaproductions. Le public plus pointu d’a qu’à aller voir ailleurs et heureusement, il a l’embarras du choix.


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