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L’école, c’est mieux à trois !

Publié le 30 septembre 2016 par Julieboutard

Ça y est ! Les premières réunions entre parents et professeurs, ou réunions de rentrée, ont eu lieu. Un moment que tous n'abordent pas avec la même sérénité. Côté parents, et côté profs (et même parfois côté élèves, qui se demandent ce qu'on va encore dire ou tramer dans leur dos !).

Tous les ans, depuis la vingtaine d'années que j'y assiste comme enseignante et/ou comme mère d'élèves, j'observe des parents anxieux, qui en deviennent parfois agressifs, des parents méfiants aussi, des rangs clairsemés parfois, des parents qui aimeraient disparaître et s'installent bien au fond de la classe, de plus en plus de parents inquisiteurs ... et en face, parfois, des profs anxieux eux aussi, intimidés par un public qu'ils craignent hostile, qui pensent qu'ils vont devoir justifier leurs choix pédagogiques (et non les exposer).

Heureusement, il y a aussi plein de parents simplement curieux de connaître les profs de leurs enfants et leurs attentes pour mieux aider leurs enfants. Et plein de profs qui malgré une petite appréhension y vont avec l'envie de partager leur manière d'envisager leur discipline, le programme, leurs méthode pédagogiques, et de communiquer au mieux avec les parents de leurs élèves. Parents que pour beaucoup il ne rencontreront qu'à cette occasion et à la rencontre parents-profs de milieu d'année. Et aussi beaucoup de professeurs expérimentés qui savent tout ça par cœur et qui s'emploient à faire de cette rencontre un moment aussi apaisant et rassurant que possible. Il faut dire que c'est plus facile quand on est expérimenté (et plus âgé que la majorité des parents).

Mais toutes ces souffrances intimes, ça me chiffonne. L'école, ça prend tout le monde aux tripes : les élèves, leurs parents et leurs enseignants. Quand j'écris que ça prend aux tripes, c'est aussi positif, bien sûr. Chez les enseignants, ça a même un nom : ça s'appelle la vocation.

Pourquoi est-ce que ça me chiffonne tant ? Et pourquoi en faire un billet ? Parce qu'il y a une chose qui se vérifie, année après année : quand les relations parents professeurs sont apaisées, harmonieuses, respectueuses, ça se passe mieux pour les élèves. Et inversement. Et non, je ne confonds pas la cause et la conséquence ... car c'est aussi valable quand les élèves rencontrent des difficultés d'apprentissage. Quand les relations entre les parents et les enseignants sont empreints de confiance et de respect mutuels, les enfants n'ont aucun conflit de loyauté à gérer, ont davantage envie de s'impliquer, se sentent davantage encouragés, et sont ainsi dans de meilleures conditions pour progresser et réussir.

Mais ce n'est pas toujours simple ...

Seulement, nos enfants, c'est la chair de notre chair, le prolongement de nous-même. Ça ne favorise pas la prise de distance, et nous projetons volontiers sur eux notre propre vécu scolaire, qui n'est pas toujours rose. Le parent, dont la posture est assez naturellement celle de l'élève qu'il était (dans une école qui n'était pas toujours bienveillante), a peur plus souvent qu'à son tour : peur de ne pas être écouté, peur de ne pas être entendu, peur de ne pas être compris, peur d'être jugé. Face à un professeur, il craint trop souvent d'être traité avec mépris, surtout s'il n'a pas eu l'opportunité de poursuivre des études supérieures.

Et puis la société n'aide pas à être serein non plus : entre les discours malveillants sur l'école, la crainte du chômage et d'un monde du travail difficile, l'inquiétude est légitime, même si elle n'est pas toujours justifiée.

Côté professeurs, la crainte est parfois aussi au rendez-vous. Quel enseignant n'a pas entendu parler en salle des profs de parents " difficiles à gérer ", parfois agressifs ou violents ? Le piège, c'est de partir avec des a priori, hérités des ressentis des collègues, et de se trouver pris au piège qu'on s'est soi-même tendu. C'est comme ces élèves dont on entend dire les pires horreurs le jour de la prérentrée, et à qui on ne donne aucune chance de nouveau départ, en leur montrant dès la première heure de cours qu'on les a " dans le collimateur ".

Alors, qu'est-ce qu'on fait ?

Et si chacun prenait sa part de responsabilité en faisant tout, de son côté, pour créer une relation apaisée et fructueuse, au bénéfice de l'enfant / élève dont tout le monde veut, au fond, la réussite ?

Et si chacun décidait que parents et professeurs sont des experts, qui de son enfant, qui de sa discipline et de la pédagogie ?

Et si chacun faisait en sorte que l'enfant soit au cœur de la discussion et de la réflexion commune sur la manière de favoriser sa réussite ?

Et si chacun était vraiment à l'écoute des difficultés de l'autre ? Du parent qui a des horaires de travail difficiles, et du prof qui a une classe surchargée (avec parfois 1/3 d'élèves réclamant des aménagements particuliers, qui sont très rarement les mêmes bien évidemment) ? Et si les spécialistes qui préconisent des aménagements prenaient conscience de la réalité des classes pour éviter aux parents de faire des demandes qui relèvent de l'utopie ?

Et si chacun répondait présent pour valoriser l'autre dans les yeux de l'élève, qui n'attend, finalement, que ça ? Même si, parfois, on est en désaccord avec la façon de faire d'un professeur ou d'un parent, il est plus souvent nocif de le dire clairement devant l'enfant, que de se taire et de l'aider à trouver un chemin qui ne le mettra pas en porte-à-faux à la maison ou à l'école.

Et si le conflit est déjà là ?

Personne n'aime le conflit pour lui-même. Et tout le monde a intérêt à le faire cesser : l'élève qui est dans une situation inconfortable et se trouve empêché d'apprendre par ce parasitage, le professeur qui s'y épuise et perd du temps sur l'essentiel, et les parents qui souhaitent la réussite de leur enfant.

Pour le faire cesser, prendre conscience qu'on n'a rien à gagner à long terme dans ce conflit est essentiel. Il existe toujours une porte de sortie " par le haut ", pour tout le monde. Et chacun des adultes impliqués peut contribuer à mettre en place les conditions de cette issue positive. Comment ?

  • En créant un dialogue constructif : écouter pour être écouter est une technique incontournable. Votre interlocuteur sera plus enclin à vous entendre et à prendre en compte votre point de vue, si vous l'écoutez et prenez en compte le sien.
  • Si nécessaire, par exemple dans le cas où votre enfant rencontre des difficultés d'ordre médical ou psychologique, un partage d'information, en privilégiant les documents clairs et synthétiques destinés aux enseignants. S'il n'y a pas de diagnostic, soyez clairs sur ce point : " Il n'y a pas de diagnostic, mais nous sommes en train de faire des démarches dans ce sens, et nous vous tiendrons au courant. ". Et si ce n'est pas le cas, vous avez le choix entre entamer ces démarches ou renoncer à évoquer vos doutes et demander des aménagements. S'il y a quelque chose qui exaspère quasiment tous les enseignants, ce n'est pas la réforme du collège, mais bien les précocités, dyslexies et hyperactivités autoproclamées ...
  • En se montrant, avec le jeune, à la fois exigeant et bienveillant. C'est valable pour l'enseignant bien évidemment (" Exigence et bienveillance ", c'est le " protéger et servir " de l'enseignant !), mais aussi pour les parents. De l'écoute, de la compréhension, de l'aide, mais aussi des objectifs et des limites claires, reliées aux valeurs communes, et en premier lieu le respect de soi et des autres.
  • Et surtout, en proposant une action conjointe et réaliste pour le bien de l'élève. En écoutant les objections et difficultés de l'autre partie, et en en tenant vraiment compte.

Qui que vous soyez, parent ou prof, rappelez-vous que si vous offrez votre confiance et votre respect à l'autre, il fera tout pour les mériter. Et que ça marche aussi très bien avec les enfants et les ados (même si ça ne se voit pas forcément tout de suite).


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