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La Commission européenne fait tout pour ruiner les paysans

Publié le 19 octobre 2016 par Blanchemanche
#Commissioneuropéenne #agriculturepaysanne
GÉRARD LE PUILLMARDI, 18 OCTOBRE, 2016HUMANITE.FRLa Commission européenne fait tout pour ruiner les paysans
Photo Thierry Zoccolan/AFP
La Commission européenne n’admet que la loi de l’offre et de la demande pour réguler le marché des denrées périssables. Mais elle déstabilise les marchés en multipliant les accords de libre échange comme le CETA et le TAFTA, sans compter les nouvelles faveurs accordées à l’Ukraine pour exporter en Europe. Cette dernière décision aura pour conséquence de prolonger l’embargo russe sur les denrées en provenance des pays de l’Union européenne.Les éleveurs européens de bovins à viande continuent de s’opposer au traité de libre échange avec le Canada. Ils ont fait par de leurs inquiétudes au début de ce mois d’octobre devant le commissaire européen en charge de l’Agriculture lors du Sommet de l’élevage à Clermont-Ferrand. «Je voudrais attirer votre attention sur le fait que l’agriculture européenne traverse une crise profonde » lui avait alors dit Laurent Pinatel, porte-parole de la Confédération paysanne. « Je comprends très bien que ce ne soit jamais assez pour les agriculteurs, mais je fais de mon mieux», lui avait rétorqué l’irlandais Phil Hogan, ce personnage peu impliqué sur les dossiers qui relèvent de sa responsabilité.Une semaine plus tard, l’agence AgraPresse confirmait le laisser faire de la Commission avec ce titre : « Bruxelles surveille la situation des marchés sans songer à intervenir ». La raison de cette absence d’intervention de l’exécutif bruxellois relève de l’idée que les marchés doivent réguler la production à partir des prix qui spéculent à la baisse ou à la hausse en fonction de l’offre et de la demande. Ainsi, en Europe, le prix moyen du litre de lait de vache payé aux paysans aurait augmenté de 3% en août et pourrait avoir augmenté de 2,3% en septembre. Ce signe est considéré comme suffisant par la Commission pour ne prendre aucune décision, bien qu’il soit loin de compenser la baisse de 20 à 30% subie depuis un an par les producteurs. Comme ces derniers ont globalement réduit leurs volumes de livraison ces dernières semaines, ce recul de la production s’accompagne de la vente d’un plus grand nombre de vaches de réforme que prévu , entre + 0,5% et 3,5% selon les pays.Ce qui fait baisser le prix de la viande bovine du fait de l’abondance de l’offre au regard de la demande. La semaine dernière, les cours des jeunes bovins de boucherie étaient en baisse de 1,18% en moyenne européenne. Sur un an les prix ont reculé de 11% dans la catégorie laitière des vaches de réforme. Pour les céréaliers, les choses ne vont pas mieux avec un prix de 158€ la tonne pour le blé et 154€ pour le maïs, soit une baisse de 2€ en une semaine et d’environ 60€ sur deux ans.En France, l’Interprofession bétail et viande (INTERBEV) appelait hier « le gouvernement et les parlementaires à s’opposer à toute ratification de l’accord » avec le Canada en mettant en avant les arguments suivants : « Comme aux Etats Unis, les bovins destinés à la production de viande au Canada sont élevés dans des conditions bien éloignées de celles imposées aux producteurs français et européens sur le plan de l’hygiène, de la traçabilité, du bien-être animal et environnemental . L’absence totale de prise en compte de ces attentes sociétales prioritaires en Europe, correspondant à une réglementation particulièrement rigoureuse, aurait dû constituer un critère d’exclusion immédiate de la viande bovine du champ des négociations», note INTERBEV. Dans le contexte de l’après Brexit , l’Interprofession avance aussi l’argument suivant : « du fait de la sortie du royaume Uni de l’Union européenne, le quota de 50.000 tonnes de viandes bovines canadiennes initialement négocié pour être absorbé par 28 Etats membres va être désormais dans une configuration à 27 Etats. Cette nouvelle répartition est d’autant plus préoccupante que le Royaume Uni représente, aujourd’hui, le principal débouché de la viande canadienne».Cet argument doit être pris en compte. En sortant de l’Europe, le Royaume Uni aura aussi la possibilité d’augmenter ses importations en provenance du Canada, des Etats Unis, voire des pays d’Amérique du sud. Il pourra ainsi réduire ce qu’il achète en France en viandes de qualité issues des races charolaise, limousine et autres. Loin de s’en soucier, la Commission européenne ouvre un autre front qui va contribuer à faire baisser les prix agricoles à la production. Elle propose à l’Ukraine un contingent supplémentaire d’exportation de 1,1 million de tonnes de cinq céréales vers les pays de l’Union sans le moindre tarif douanier. Elle y ajoute de 3.000 tonnes de miel et 5.000 tonnes de tomates préparées en conserves également sans droits de douanes. Voilà qui ne facilitera pas la levée de l’embargo russe sur les produits européens qui dure depuis deux ans et qui a fait chuter le prix du lait et de la viande de porc dans les pays de l’Union.Alors que la Wallonie, continue de s’opposer à la signature du traité de libre échange avec le Canada qui doit être adopté à l’unanimité pour être juridiquement applicable, la Commissaire européenne en charge du Commerce continue de dire que le traité pourra être signé le 27 octobre. Ce qui a entrainé cette réaction de l’ancien premier ministre belge Elio Di Rupo : « la Wallonie a été snobée par la Commission européenne qui n’a jamais daigné lui répondre ». On en est là et la France de François Hollande se tait. Ne pouvant nier les difficultés rencontrées par les paysans du fait de la chute sensible et prolongée des cours dans les secteurs du lait, de la viande bovine et des céréales , la Commission a autorisé les Etat membres à avancer aux paysans les aides européennes que Bruxelles doit leur verser d’ici la fin de l’année. Ainsi, me ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll a annoncé hier que la France allait avancer ces aides dès le 17 octobre aux 206.000 exploitants qui en ont fait la demande. Un soulagement qui ne sera que provisoire si les prix de remontent pas rapidement et suffisamment dans les principaux secteurs de production.

Gérard Le Puill

Journaliste et auteurhttp://www.humanite.fr/la-commission-europeenne-fait-tout-pour-ruiner-les-paysans-618396

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