Magazine Politique

Un karcher pour chaque candidat à la primaire de la droite

Publié le 22 octobre 2016 par Rolandlabregere

La plus reconnue des marques de nettoyeurs haute-pression se sent sous tension par l’emploi de son nom dans le discours des candidats, principalement ceux de la droite. « Nous constatons depuis plusieurs mois l’utilisation régulière du nom de notre société sur la scène politique », écrivent les responsables de Kärcher. Ils le font savoir par lettre recommandée aux principaux candidats déclarés à la présidentielle. Alain Juppé, très attentif à se montrer à l’aise dans le costume de Monsieur Propre, a dévoilé l’affaire, pas mécontent de laisser entendre qu’il n’est pas le plus éclaboussé par cette innovation langagière. Dans l’ambiance Primaire tout est bon pour se faire mousser.

« Compte-tenu de l’approche des élections présidentielles de 2017, et les lancements des campagnes électorales de plusieurs candidats, nous sommes conscients que cette utilisation risque de s’accroître », complète la firme qui voit dans l’association de son nom  « avec une question politique, polémique et négative » un motif de préjudice porté à sa réputation. Kärcher déplore l’emploi fréquent des déclinaisons néologiques qui découlent de l’usage du terme racine, comme « karchérisé » ou encore « karchérisation ».

 La karcheritude des candidats à la présidentielle n’est pas du goût de la marque emblématique du nettoyage rapide. Pourtant l’antonomase, c’est-à-dire la figure de style qui consiste à utiliser un nom propre pour désigner un nom commun est un gage de longévité et de popularité. Tout le monde utilise une poubelle, nom commun dérivé, par antonomase du nom propre, de celui du préfet Poubelle, inventeur du dispositif de recueil des ordures. Devenir un nom commun, n’est aucunement porteur de dimensions négatives. Si aujourd’hui, on achète indifféremment un frigidaire, devenu frigo, ou un réfrigérateur, l’invention première de l’appareil culte de l’industrie de l’électroménager appartient à la marque Frigidaire. Personne ne viendra lui disputer cette innovation qui a consacré l’installation de la société de consommation. La lexicalisation d’un nom propre, et ultérieurement la fabrication de mots dérivés, démontre l’utilité sociale du produit. L’antonomase fait place nette. Difficile de citer un produit qui n’appartiendrait pas à la marque éponyme. Toujours copié, jamais égalé, formule déjà utilisée dans le monde des objets manufacturés, montre l’avantage pris par la marque princeps. Être le premier sur le marché, inspirer des comportements et des attitudes, tout cela est plus qu’un avantage symbolique.

C’est une erreur de stratégique de la communication institutionnelle dite corporate que de chercher à mettre fin à l’emploi de termes dérivés de la marque Kärcher. La démarche est tardive. Avoir protesté au lendemain du 19 juin 2005 de la visite de Sarkosy à la cité des 4000 à La Courneuve aurait laissé plus de possibilité d’être entendu. L’emploi de Karcher par Sarkosy a amorcé la pompe de la banalisation sémantique. Le rappel fréquent de cette séquence primitive par les médias a fait le reste. On achète désormais un karcher comme on achète un frigidaire. Il ne reste plus qu’à la marque de tenter un coup médiatique, c’est-à-dire de karchériser l’image des candidats les plus sensibles aux qualités des nettoyeurs haute-pression en leur remettant solennellement un équipement complet. Sans oublier de leur demander de s’en servir dans l’intention de nettoyer l’amertume de leurs ambitions contrariées. La photo serait une authentique valorisation des atouts des appareils de la marque Kärcher. L’autre vertu d’une telle initiative serait de poser la question du sens de la curieuse expression propre à rien.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Rolandlabregere 12 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines