Magazine Bien-être

Coming out du bonheur

Publié le 28 octobre 2016 par Concentredebonheur @SophieMachot

dessin_bonheur_malheur

Ériger des murs, se cacher derrière, se protéger et vouloir protéger les siens, se parer d’armures pour ne pas être blessé… Rien de tout cela ne peut empêcher l’existence de nous atteindre de plein fouet et nous abîmer.

Blessés, nous le sommes souvent. Écoeurés aussi. Apeurés constamment. Et nous passons un temps certain à nous réparer. À soigner les blessures. À panser nos plaies. Il arrive même que nous peinions à raccommoder les déchirures de notre coeur.
Et s’il est une vérité, c’est que ni don d’amour, ni gratitude, ni méditation, ni relaxation, ni respiration, ni pardon, ni connaissance de soi, ni confiance en soi ne nous protègent ni ne nous épargnent les douleurs, pertes et tristesses inhérentes à notre condition humaine.

Et pourtant… Ce sont bien toutes ces ressources, toutes ces forces intérieures, toutes ces actions qui, parce qu’elles sont ritualisées, oeuvrent à nous aider à gravir ces montagnes émotionnelles.  Deuil, trahison, séparation, injustice, indifférence, insécurité, maladie, perte de repères, de valeurs sont intrinsèquement liés à l’expérience même de la vie. Sans eux, pas de retrouvailles, de guérison, de justice, de renouveau, de souvenirs, de séduction, de solidarité et de conscience de faire partie d’un tout, tout en étant unique. Il nous faut des fins pour savourer les débuts. Pour que la vie ressuscite sans cesse.

Et le bonheur y est présent à chaque étape. Il faut juste lui laisser un peu de place. Parfois se battre pour la lui sauvegarder. Être patient avant qu’il ne se montre à nouveau. Le ré-apprivoiser doucement, sans précipitation.

Je l’ai appris à mes dépends.

Depuis ces trois dernières années, j’ai appris que la sérénité n’est pas l’aboutissement d’une recherche de bonheur enfin trouvé, mais que l’apaisement se trouve au coeur même de la tempête et non lorsque celle-ci se calme enfin. Il faut savoir trouver son oeil, vouloir s’y poser, accepter d’être en son sein et que l’on puisse, malgré tout, s’y ressourcer et même y être heureux tout simplement.

Mais parfois le bonheur doit attendre. D’autres choses sont à vivre pour qu’il retrouve sa force et sa raison d’être. Sa puissance.

J’avais pris l’habitude, depuis quelque temps, de clamer dans un rire flottant presqu’embarrassé que « je suis le cordonnier le plus mal chaussé du moment »… Comme pour me justifier de devoir subir, moi aussi Madame Bonheur , quelque malheur. Comme pour me faire pardonner de ne pas être la digne représentante d’une vie où le bonheur trône en maitre absolu.
Et puis finalement, on pardonne à son cordonnier d’avoir des godillots troués. La plupart du temps, on ne les voit même pas. Les cordonniers savent très bien les cacher derrière la façade de leur comptoir.

Mais j’ai menti. Je ne suis pas ce cordonnier aux godillots troués. Mes chaussures sont solides et tout terrain. Elles m’emmènent loin et ne sont pas abimées. Contrairement à ma vie qui, elle, l’est. Moi pas. Ma vie, oui. C’est là, toute la différence. Je ne suis pas ma vie. Je suis dans ma vie. Dans cette vie où des pans entiers se sont effondrés et pourtant, je suis encore debout. Et contre toute attente, je me sens amplifiée, plus vivante que jamais.

J’ai chaussé, il y a trois ans, mes bottes de sept lieux pour affronter cette menace dont je parlais déjà dans une page cachée au fin fond de mon premier ouvrage « Cultivez votre bonheur ! » et dont les mots me prédestinaient à une tempête existentielle sans précédent. Je n’y ai pas échappé. J’y suis encore un peu. Mais j’ai appris à trouver son centre, l’oeil du cyclone, bien plus souvent et facilement qu’au début de la tourmente.

Car j’ai fabriqué ces bottes de sept lieux patiemment en travaillant dur et avec persévérance. Appliquant chaque enseignement transmis par mes mots et ma voix. Avec obstination. J’ai cherché sans cesse à voir les choses différemment. Toujours avec entêtement. J’ai remis en jeu mes convictions, valeurs et habitudes. Je n’avais en tête qu’une seule idée: vérifier et valider que « ça » fonctionnait.  Que tout ce que je transmettais dans mes ouvrages et mes conférences avaient une fin en soi. Et la vie s’est chargée de m’apporter son grain à moudre.

Alors, oui c’est vrai. J’ai eu, bien plus que je ne l’aurais voulu, des occasions de pleurer. De Souffrir. De maudire. De vomir. De guérir. De pardonner. Oui, c’est vrai. J’ai laissé des bouts de moi un peu partout où je passais.

Je ne compte plus les lieux qui ont accueilli ma détresse. Des écrins ou des tombeaux, selon, au creux desquels s’est dissout un morceau de mon histoire. Des bouts de moi éparpillés sur le carrelage d’une cuisine, dans une rame de métro, dans les draps rêches d’une chambre d’hôtel, sous une douche glacé, dans un bain brûlant, au coin d’une rue parisienne, dans les toilettes d’une multinationale, à la place 74 d’un TGV, dans les jupons de l’amour maternel, devant les Paris-Brest d’une boulangerie, dans les soubresauts du rire paternel, dans les bras diorisés d’une amie qui comprend, dans la douceur du regard bleu azur d’un amour de jeunesse, dans la salle 2 du Club Med Gym, dans l’écume d’une mer agitée, dans l’allée centrale du Monoprix, la main posée sur le pied de Sainte Rita, dans le fond d’un verre de Chardonnay au Café de Flore, sur le parquet ciré du salon où résonne, dans la nuit, « Reprendre c’est voler » d’un Jean-Jacques Goldman qui chipotte en faisant les compte de ce qu’il nous reste quand il ne reste plus rien entre nous. « On partage les choses quand on partage plus les rêves ».

Autant d’endroits, et bien d’autres encore, qui gardent une infime trace des larmes versées sur un passé délavé. Autant de sols, de murs, de fenêtres, de bras qui ont, quelque part dans leurs rainures, l’ADN d’une vie passée qui ne peut se résoudre à disparaitre totalement.

Oui, j’ai perdu beaucoup. Oui, mon Héros est parti vers d’autres horizons et notre amour s’est éteint aussi doucement que le coeur de notre chien Unoï. Oui, des êtres aimés ont quitté cette vie, volontairement ou non, et nous ont laissé ce vide qui ne sera jamais comblé. Oui, ma fille, un genou à terre, n’a pas été épargnée par la dure loi d’une meute adolinquante. Oui, c’est vrai. C’est notre réalité. Nous avons beaucoup perdu.

Mais, nom de nom ! Qu’est-ce que nous avons gagné aussi ! Et tout ça n’a plus de prix. Et si je fais les comptes, nous sommes devenus riches. Riches d’amour, de soutien, de solidarité, de densité, de forces vives, de résilience, d’intensité, de conscience, de décisions que nous n’aurions jamais prises avant. Nous avons tant reçu. L’on m’a tant donné. La plupart du temps, les personnes que j’ai croisées ne le savent pas ou si peu. Je leur ai volé à chacun une part de leur humanité, de leur générosité, de leur force de caractère, de leur vivance.

Ils m’ont portée à bout de coeur. Je me suis accrochée à eux comme un naufragé s’accroche à une bouée pour garder la tête hors de l’eau. Et puis, j’ai finalement appris à me laisser porter par le courant. Et je suis arrivée sur une rive nouvelle, où tout m’est inconnu.
Mais quelle n’est pas ma surprise de découvrir sur cette ile lointaine, les coeurs de ceux que j’aime et qui, comme moi, cherchent leur terre promise.

Alors, si nous voyagions ensemble ?

Quelle drôle de vie quand même. Non ?

Post scriptum: Un ami m’a récemment avoué: « Sophie ! Avec toi, c’est toujours: « Oui mais non… Bon, d’accord oui… euh non. Enfin oui, mais non… »

Ça ressemble à la vie, non ? … Oui ?

;)

Je vous aime fort mes lect’Ors !

Ps2: Illustration Marc Denault


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Concentredebonheur 5008 partages Voir son profil
Voir son blog