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Lumières sur le côté obscur de la physique

Publié le 08 novembre 2016 par Blanchemanche
#trounoir
Sylvestre Huet Lumières sur le côté obscur de la physiqueQuand un physicien utilise le mot « noir », ou « sombre », c’est bon signe. Celui d’un problème… intéressant. Même lorsqu’il est résolu. En voici une liste. La nuit noire. Le corps noir. Un trou noir. Une matière ou une énergie noires… Autant de chapitres d’un livre à deux cerveaux et quatre mains (en supposant que ses auteurs l’aient tapé sur un clavier à l’aide de tous leurs doigts) : Les idées noires de la physique. Un astrophysicien et un philosophe, Roland Lehoucq et Vincent Bontems nous offrent donc ce petit livre (202 pages, 17,90€, Les Belles Lettres éditions) d’une lecture aisée malgré la profondeur du sujet.Qui dit noir, en physique, dit profond. La nuit noire ? C’est celle du paradoxe soulevé par Johannes Kepler. Si l’Univers, dit-il, est infini et rempli d’une infinité d’étoiles, alors la nuit devrait être aussi lumineuse que le jour, notre regard étant, quelque soit sa direction, stoppé par une étoile. Il en conclut que l’Univers est fini, comme le nombre d’étoiles. Le corps noir ? C’est le traitement par l’analyse physique d’un corps absorbant tous les rayonnements qu’il reçoit, et émet un rayonnement déterminé par la température de sa surface, égal à celui reçu. Or, à l’aube de la révolution quantique, à la fin du 19ème siècle, le traitement classique du problème (par Lord Rayleigh) débouche sur une impossibilité, le rayonnement émis devenant infini. La solution de Max Planck contribuera à l’émergence de la physique quantique.Le trou noir, lui, est un puits de gravité sans fond. Un objet longtemps tout théorique… Mais dont une coopération américano-européenne (LIGO-Lumières sur le côté obscur de la physiqueVirgo) a détecté l’onde gravitationnelle provoquée par la coalescence de deux de ces montres cosmiques, après une folle sarabande (lire à ce sujet l’excellent récit dans le premier numéro de Carnets de science édité par le CNRS, actuellement en kiosque).La matière noire peuple les laboratoires d’astrophysique depuis que Fritz Zwicky, dès les années 1930, remarquait un truc pas normal dans la rotation des galaxies sur elles mêmes ou autour du centre d’un amas de galaxies. En gros, les vitesses des étoiles ou des galaxies exigeaient beaucoup plus de masse que celle des étoiles et du gaz visibles. Depuis, les astrophysiciens n’ont fait que confirmer l’ampleur du problème, tandis que les physiciens n’ont pas trouvé ce que pouvait bien être cette matière. D’où, en désespoir de cause, des propositions visant à modifier la « législation » en vigueur, autrement dit la loi de la gravitation. Quant à l’énergie noire, c’est encore pire. Elle provient d’un constant beaucoup plus récent, celui d’un Univers observable dont l’expansion serait en accélération depuis cinq milliards d’années sur les 13,77 de son existence. Le moteur de cette accélération en serait une mystérieuse énergie.L’astrophysicien et le philosophe font l’un et l’autre oeuvre de vulgarisation de leurs domaines, mais s’interrogent également sur les relations complexes qu’entretiennent les concepts scientifiques – mathématisés – avec le langage commun, les métaphores, l’épistémologie voire la poésie. Le tout pour un ouvrage qui peut se déguster par petits bouts. Un ouvrage qui permet de prendre conscience de l’énormité des questions soulevées par les progrès de la physique. Sa puissance de description, tant pour le macrocosme que pour le microcosme des particules débouche sur un paradoxe. Soit ses théories sont bonnes, et l’essentiel du contenu de l’Univers leur échappe, soit il faut reconsidérer ses lois, alors même qu’elles sont vérifiées avec un degré de précision faramineux, pour faire « disparaître » matière et énergie noires. Bonne lecture.http://huet.blog.lemonde.fr/2016/11/07/lumieres-sur-le-cote-obscur-de-la-physique/

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