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Dopage : les records d’Europe d’athlétisme bientôt revus et corrigés

Publié le 22 mai 2016 par Tanialoue
Le plus vieux record d’Europe appartient depuis 1970 au Britannique Jim Adler, 1 h 31 min 30 s 4 sur 30 000 m. (photo racingpast.ca)

Le plus vieux record d’Europe appartient depuis 1970 au Britannique Jim Adler, 1 h 31 min 30 s 4 sur 30 000 m. (photo racingpast.ca)

Dans le sillage des derniers scandales de dopage, l’Association européenne d’athlétisme a pris une décision inédite : évaluer la crédibilité de chacun de ses records. Svein Arne Hansen, élu l’an dernier à la présidence de la fédération continentale, avait réagit mercredi à l’annonce des 31 nouveaux cas positifs des JO de Pékin 2008 par un message sur twitter:

A statement from our @SvenPres on @iocmedia & @Olympics findings following retesting of Beijing 2008 samples. pic.twitter.com/C0Mm5GhqtT

— European Athletics (@EuroAthletics) 17 mai 2016

« Suite aux résultats du CIO d’après les retests des échantillons des JO de Pékin 2008, je veux réaffirmer ma position qu’il n’est jamais trop tard pour corriger les erreurs du passé et de s’assurer que les athlètes propres soient légitimement récompensés ». Pour se faire, le président de l’AEA précise qu’il « supporte pleinement le retrait de tous les tricheurs des livres d’histoire, peu importe combien de temps après les dates originales des compétitions ».

Groupe de travail à l’étude

L’entraîneur américain Dan Pfaff (coach de champions olympiques et du monde dont le sprinteur Donovan Bailey et du sauteur en longueur Greg Rutherford) a alors interpelé Hansen sur l’acceptation des records établis par les Allemands de l’Est « faciles à corriger ». De nombreux documents et témoignages attestent l’existence d’un programme de dopage en RDA appelé plan d’État 14.25, l’administration de stéroïdes anabolisants à près de 10 000 sportifs – menée clandestinement pendant un quart de siècle jusqu’en 1989. Hansen a répondu que le Conseil de l’AEA vient tout juste d’approuver « un Groupe de travail chargé d’étudier la validité et la crédibilité de tous les records d’Europe. » Il s’agit de passer au crible les records des 41 épreuves masculines et 43 féminines, sans compter les records en salle et par catégorie d’âge.

@PfaffSC @EuroAthletics Council has just approved Working Group 2 study validity & credibility of all Euro Recs.Names to be announced in Jun

— Svein Arne Hansen (@SvenPres) 18 mai 2016

Pour le blog Plus vite, plus haut, plus fort, Svein Arne Hansen donne quelques précisions sur ce projet :

  • Le Président est en train de finaliser avec le Conseil exécutif de l’AEA la liste des personnes qui travailleront dans le Groupe de travail.
  • Les noms seront rendus publics courant juin 2016.
  • Le Groupe sera composé d’un large panel de gens représentant différents secteurs du sport.
  • Il décidera sur quels documents, témoignages ou preuves s’appuyer pour évaluer la probité de chaque record et communiquera les résultats de son travail au Conseil exécutif.
  • Il est encore trop tôt pour annoncer une date de publication de la nouvelle liste des Records d’Europe. (Toutefois, selon les Règlements des records continentaux, l’AEA doit publier la liste de ses record à chaque 1er janvier).

La position du président Svein Arne Hansen est à l’opposé de celle de son ancien homologue à la Fédération Internationale des Associations d’Athlétisme Lamine Diack qui avait déclaré qu’on ne pouvait pas « réécrire les livres d’histoire ». Pas très raccord non plus avec la prescription de l’Agence Mondiale Antidopage dans l’Article 17 de son Code mondial antidopage : « Aucune procédure pour violation des règles antidopage ne peut être engagée contre un sportif ou une autre personne sans que la violation des règles antidopage n’ait été notifiée conformément à l’article 7 ou qu’une tentative de notification n’ait été dument entreprise, dans les dix ans à compter de la date de la violation alléguée. »

Des aveux de dopage athlètes permettraient de supprimer leurs records, d’après la Condition 7 des Règlements des records continentaux, sans prescription. Les auteurs de certaines performances jugées imbattables, comme Marita Koch et ses 47 s 60 au 400 m qui ont fêté leurs 30 ans, ont toujours farouchement nié et il est peu probable que d’autres anciennes gloires se mettent à table.

Par où commencer ?

Une manière de se débarrasser de records gênants se trouve peut-être dans cette Condition du règlement : « Les tests (antidopage) doivent être en accord avec les Règles des Compétitions de l’IAAF en cours et des règlements antidopage concernant les Records du Monde. » En l’élargissant, on pourrait se servir de dates à partir desquelles les techniques de contrôles antidopage ont changé et considérer que les records établis auparavant ne correspondent plus aux critères actuels d’homologation. Un peu comme lorsqu’en 1977, les chronos manuels n’ont plus été reconnus comme records et ont été remplacés par les chronos électriques. De la même façon qu’un anémomètre est nécessaire pour valider une performance, l’AEA pourrait statuer que des contrôles antidopage utilisant des techniques modernes le sont aussi, et ne plus reconnaitre les records antérieurs à ces quatre dates, au choix :

1984 : décision que chaque record du monde devra être accompagné d’un certificat de contrôle antidopage, prise lors du Conseil de l’IAAF à Manille du 16-18 décembre 1983. 5 records d’Europe masculins et 5 féminins ont été établis sans ce certificat.

1986 : interdiction du dopage sanguin par le Code antidopage du Comité International Olympique, décidée lors de la 90ème Session du CIO à Berlin les 4 et 5 juin 1985. Cette pratique concernant surtout les épreuves de longue durée, 7 records d’Europe masculins et 5 féminins ont été établis avant que ne soient formellement interdites les transfusions sanguines.

1990 : introduction des contrôles antidopage hors compétitions dans les Règles de l’IAAF en 1989 ; le programme est défini lors de la Commission Dopage de l’IAAF à Londres les 6 et 7 janvier 1990. 14 records d’Europe masculins et 15 féminins ont été établis à une époque où les athlètes n’étaient pas contrôlés en dehors des compétitions.

2009 : amendement du Code mondial antidopage pour autoriser à partir du 1er janvier l’utilisation du profil longitudinal afin d’établir une violation des règles antidopage, sur la base du Passeport Biologique des Athlètes. 31 records d’Europe masculins et 39 féminins ont été établis avant que les athlètes ne soient contrôlés par cette méthode de contrôle antidopage dite indirecte.

Si ces considérations historiques devraient être évoquées par le Groupe de travail, les plus vieux records ne sont pas les plus en danger : le cas le plus évident est celui du 10000 m féminin détenu depuis 2008 par la Turque Elvan Abeylegesse, suspendue pour deux ans par sa fédération nationale en mars 2015 après le retest positif de son échantillon des championnats du monde 2007. Cette sanction devrait entraîner l’annulation de son record, mais l’athlète a entamé une action légale contre l’IAAF devant le Tribunal Abitral du Sport pour des erreurs techniques dans les procédures de son contrôle. Les retests des JO de 2008 et 2012 pourraient apporter d’autres éléments au dossier Abeylegesse et peut-être confondre d’autres détentrices de records, notamment des coureuses et marcheuses russes qui ont brillé lors ces des compétitions.

Un obstacle demeure à la destitution de certains records : dans la forme actuelle des Régulations de l’AEA, la Condition 2 impose qu’une performance ratifiée par l’IAAF soit automatiquement reconnue comme Record continental. On en trouve 28 chez les femmes contre 8 chez les hommes. Interpelé sur ce cas de figure, Svein Arne Hansen a répondu en mettant Sebastian Coe, actuel président de l’IAAF et toujours détenteur de 2 Records d’Europe (1000 m depuis 1981 et 4×800 m depuis 1982), face ses responsabilités : « Mon but est de restaurer un maximum de crédibilité et Seb Coe fera de même à l’IAAF ».

@pahunt1978 @PfaffSC My goal is to restore maximum credibility 2 @EuroAthletics & @sebcoe will do likewise @IAAF. #takestime #wewillgetthere

— Svein Arne Hansen (@SvenPres) 18 mai 2016

La France détient actuellement 10 records d’Europe senior en plein air :

Hommes

100 m 9 s 86 Jimmy Vicaut, Paris Saint-Denis, 2015
3000 m steeple 8 min 0 s 09 Mahiedine Mekhissi-Benabbad, Paris Saint-Denis, 2013
400 m haies 47 s 37 Stéphane Diagana, Lausanne, 1995
Perche 6 m 16 Renaud Lavillenie, Donetsk, 2014
Relais 4×200 m Equipe de France, Nassau, 2014
Marathon 2 h 06 s 36 Benoit Zwierchlewski, Paris, 2003
50,000 m marche (piste) 3 h 35 min 27 s 2 Yohann Diniz, Reims, 2011
20 km marche (route) 1 h 17 min 02 Yohann Diniz, Arles, 2015
50 km marche (route) 3 h 32 min 33 Yohann Diniz, Zurich, 2014

Femmes

100 m 10.73 Christine Arron, Budapest, 1998

(Les performances de Diniz sur 50,000 m  et 50 km et de Lavillenie sont aussi des Records du Monde)


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