A DorhamJ'ai grandi, ce qui n'est pas chose facile.
C'est comme l'émergence d'une dent de lait à travers une gencive innocente ; en plus, ça prend des plombes ! Mais comme on n'a jamais vu une fille de quinze ans parvenue à l'âge de quarante ans, il a bien fallu accepter que la déchirure advienne... Lorsque la peau de mon enfance a moussé à mes pieds, je lai piétinée et je suis allée plus loin tanner mon cuir tout neuf.
Finalement, cela ce n'est rien.
Ce qui est le plus douloureux ce n'est pas d'avancer sur le chemin de soi-même, c'est de devoir le faire, amputé d'un bras, d'une jambe, la tête bourdonnant des voix autrefois aimées de ceux que l'on a laissés en chemin...
Parfois je pense à ceux-là, morts, à celle qui m'a abandonnée, à d'autres qui m'ont trahie, oubliée ou que j'ai quittés et à la cohorte d'amis, de connaissances, d'élèves, de voisins que j'ai côtoyés et qui se baladent dans le monde avec des parties de moi que je ne connais plus....
Illustration : Mehgan Trice
