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Cuvée 2016

Publié le 09 janvier 2017 par Zegatt

Pour l’année 2016, ce sont 17 saisons visionnées, 73 films vus, et 193 textes lus.

Pour les séries :
– Celle que je retiens avant tout comme une surprise de taille, c’est « Ainsi soient-ils ». Une très bonne qualité d’écriture, une véritable narration, structurée, un jeu d’acteur crédible… Bref, quelque chose qui vaut vraiment le détour.
– « P’tit Quinquin », à l’atmosphère extrêmement étrange. Je serais incapable de dire si j’ai aimé ou non la série, elle entre en tout cas dans les rares inclassables par son côté absurde, illogique, faussement brouillon. Un côté lynchien par moments, perdu au fin fond de la campagne…
– La troisième saison de « The Americans », en perte de vitesse en comparaison des deux premières, mais qui maintient cette série a un assez haut niveau, jouant avec l’histoire et sa grande hache pour relire la guerre froide et les jeux d’espionnage USA-URSS. Je crois l’avoir déjà écrit ici, mais le générique est à lui seul une petite merveille pour résumer l’instrument de propagande des deux blocs et leurs similitudes évidentes.
– « Penny Dreadful » (merci Dark !), qui me laisse mitigé. Ambiance intéressante, bons acteurs (un sacré plaisir de retrouver Timothy Dalton entre autres), mais scénario au final assez bancal et, sous des premiers aspects prometteurs, qui s’achève de façon bien trop classique.
– Dans les gros ratés, « Le maître du haut château » qui, passé les deux premiers épisodes, massacre complètement le génie de l’univers original de Philip K. Dick. Par beaucoup d’aspects similaires, les premières saisons de « Ennemi public » et « The Missing », ainsi que la seconde de « Tunnel » : c’est à croire que le rythme narratif est calqué sur le même diagramme. Les retournements sont soit inexistants, soit tellement improbables que l’on perd tout intérêt à l’histoire… Dommage pour « Tunnel », Clémence Poésy porte par son charisme auquel répond plutôt bien Stephen Dillane. Mais les scénaristes ont fait de véritables massacres. Autre raté, le final de « Strike back » où le second degré s’est perdu, alors que c’était l’unique argument qui sauvait la série et lui donnait ce charme des films d’actions des années 80-90 avec Stallone, Schwarzy, Willis and coe.

Pour les films :
– J’aime beaucoup Jacques Audiard, mais je ne comprends pas sa palme d’or pour « Dheepan ». Si l’histoire est relativement efficace, elle est très loin derrière « De rouille et d’os », ou plus encore « Un prophète ». Tant au niveau du scénario que de la réalisation, c’est Audiard donc c’est de qualité, mais ce n’est pas du Audiard avec cette puissance, cette finesse dont il sait faire preuve ailleurs.
– Même relative déception chez un autre grand, Denis Villeneuve, avec « Premier contact ». Le démarrage tient du génie pendant près de 40 minutes, à lentement faire grimper la tension, à mettre en place sa situation sans rien en montrer (au mieux quelques avions de chasse qui passent en rase-motte). Et puis tout ce rythme magistral flanche quand la caméra s’éloigne subitement de l’héroïne, puis lorsque le rythme subit quelques sautes pour finir sur un usage un peu trop voyant de Deus ex machina… Quel dommage. Passons sur son « Sicario », au scénario d’une banalité cruche, où le seul intérêt de mise en scène sont les déplacements aériens suggérés par de simples jeux d’ombres et qui donnent une dimension fascinante aux paysages.
– « Jason Bourne », quatrième volet de la saga d’espionnage est un véritable massacre dans lequel s’engouffrent Matt Damon et Paul Greengrass. A force de vouloir légitimer l’existence du personnage (erreur déjà commise avec les livres après le décès de Robert Ludlum, le troisième étant déjà décevant), ils font subir à Bourne le même raté que James Bond a connu : un tel personnage ne peut pas avoir un passé, une famille, une histoire. Il est fait pour vivre l’instant présent, ce qui fonctionnait parfaitement dans les trois premiers volets. Ici, non, définitivement pas. Au point que même Tommy Lee Jones ne semble pas croire à son personnage, et que Vincent Cassel devient totalement illogique, lorsque son patriotisme le transforme en machine de guerre outrancière. Déplorable.
– Un autre raté majeur, « Les huit salopards » de Tarantino. Qualité d’écriture proche du zéro absolu, mise en scène mauvaise… C’est assez lamentable à supporter pour en plus ne rien en retenir.
– « Qu’Allah bénisse la France » d’Abd al Malik, dans la série des mauvais. Un noir et blanc sans aucune maîtrise, qui prétend faire honneur à « La Haine », un propos pauvre, à la limite du vide, pour se limiter à un portrait égocentrique à souhait de l’auteur-réalisateur-chanteur-…
– Beaucoup de films des studios Disney. Autant « Lilo et Stitch » ou « La reine des neiges » m’ont paru sans grand intérêt, autant j’ai eu quelques belles surprises que j’avais manqué ces dernières années : « Rebelle », « Zootopie », « Wall-E » ou encore « Monstres et Cie ».
– Un dessin animé assez atypique, au rythme très planant, contemplatif, sans une seule parole : « La tortue rouge ».
– Moins pertinent que son premier volet pseudo-autobiographique, « Poesia sin fin » de Jodorowsky.
– Parmi les très bons films, deux grands Chris Marker : « Cuba Si » et « Le fond de l’air est rouge ».
– Un reportage assez complet sur Hergé, « Hergé, à l’ombre de Tintin » (merci Aurore !).
– Un faux western, épopée à travers les contrées américaines de la ruée vers l’or, « The Revenant », magistralement filmé (merci Carmen pour cette découverte).
– Voyage hallucinatoire à plusieurs temps, réalisé dans un très bon noir et blanc, « L’étreinte du serpent ».
– Une belle surprise par son humour qui rappelle le verbe de Tarantino à ses grandes heures, « Comancheria » (merci Michel-Ange), du même scénariste que « Sicario » (et c’est un grand-écart assez impressionnant entre l’un et l’autre).
– Un très bon Ridley Scott, « Seul sur Mars », porté par un humour régulier assez fin – qui fonctionnera bien mieux pour les anglophones (jusqu’au choix final de la musique qui vient engager le générique).
– Ce n’est pas vraiment un film, plus un cours magistral de cinéma par Tavernier, « Voyage à travers le cinéma français ».
– Une découverte régionale : « Dinner for one », un court métrage noir et blanc en anglais d’une vingtaine de minutes diffusé traditionnellement chaque 31 décembre en Allemagne notamment et dans 2-3 autres pays depuis 1963 ! Un vaudeville qui mérite le détour (merci Laila !).
– Un véritable OVNI assez fascinant par son ton qui oscille continuellement entre le rire et le drame, « Toni Erdmann ».

Côté bouquins :
– Littérature française foireuse (un classique, d’année en année), « Le potentiel érotique de ma femme » de David Foenkinos. C’est nul. Point. Idem pour « Eloge de la fessée » par Jacques Serguine. Vide. Texte de revendication politique, « L’insurrection qui vient » signée du Comité Invisible – c’est fouillis, brouillon, inutile.
– Réflexions françaises proches du zéro grâce à Michel Onfray (sans grande surprise, mais je suis naïf) et son « Penser l’islam ». Je n’ai toujours pas compris le titre – jusqu’à preuve du contraire, pour penser, il faut réfléchir… et là, ce n’est pas le cas. D’un autre côté, si Onfray (au même titre que BHL et quelques autres) était un philosophe, ça se saurait.
– Fin de lecture des pièces de Molière, qui me confirme mon impression passée ; une fois sorti des classiques, ce n’est pas franchement fascinant.
– Un raté de la part de Gallimard qui publie le prometteur « Correspondance 1941-1959 » entre Albert Camus et André Malraux. Non seulement les lettres sont rares, mais à l’exception de 2 ou 3, elles ne racontent pratiquement rien, ou du moins ne sont pas marquantes… Dommage compte tenu des deux piliers de la littérature française concernés.
– De la poésie, avec en particulier « Le fou d’Elsa » d’Aragon, que je découvre tardivement. C’est long, le style est par moments lourd, mais le verbe est d’une puissance magistrale. Une véritable claque littéraire. Autrement, quelques textes de Léopold Sédar Senghor ; c’est assez inégal, mais il y a de très belles choses à y trouver. Les « Odes et fragments » de Sapphô.
– Kamel Daoud, pour son merveilleux « Meursault, contre-enquête » : un jeu littéraire en l’honneur de Camus, sorte de réponse à « L’étranger » qui utilise la forme de « La chute ». Une véritable merveille, avec peut-être quelques morceaux trop allongés (qui donnent la sensation de 5-6 pages un peu inutiles dans le dernier tiers du livre) mais formidable, en particulier pour les amoureux de Camus… Moins intéressant, le recueil « La préface du nègre ».
– Suite de lecture de Jean-Patrick manchette, dont le verbe me plaît toujours autant, ainsi que son regard critique avec « Chroniques » et « L’affaire N’Gustro » en particulier – un raté avec « L’homme au boulet rouge », écrit pour le cinéma, et qui manque de puissance (peut-être parce qu’il est écrit à quatre mains ?).
– J’ai achevé de lire la série des Maigret de Simenon. 3 ans pour en faire le tour : 5 lus la première année, 51 la suivante et 21 cette année. La lassitude de Simenon pour son personnage apparaît dans les derniers tomes, mais l’architecture des romans très souvent maîtrisée de façon exceptionnelle est un véritable bonheur à la lecture.
– Patrick Rambaud, dont j’ai découvert ses chroniques politiques des ans de Nicolas Sarkozy et du début de François Hollande. Le plus drôle est le premier, et cela devient par moments légèrement lassant, mais dans leur ensemble, ces sept livres (5 « Chronique du règne de Nicolas Ier », suivies de « Tombeau de Nicolas Ier, avènement de François IV » puis « François le Petit ») sont une lecture amusante à suivre, jouant d’un style qui jongle avec La Bruyère ou Rabelais notamment pour se moquer et critiquer quelques sept ans de politique.
– Science-fiction : l’idée est sympathique, le résultat manque un brin de puissance, « Des fleurs pour Algernon » de Daniel Keyes. Un raté avec « Le preneur d’âmes » de Frank Herbert, pas franchement brillant – est-ce d’ailleurs de la SF ou du fantastique ? Raté également chez Philip K Dick « Le temps désarticulé », pas exceptionnel. Le dernier volet de la trilogie de William Gibson « Mona Lisa s’éclate », c’est toujours aussi bordélique, je n’y ai pas compris grand chose, mais c’est un monument majeur par son style et sa mise en place du cyberpunk qui aboutira notamment aux films « Matrix ». Le bouquin d’Andy Weir auquel le film est très fidèle, « Seul sur Mars », aussi plaisant que le film.
– Littérature germanophone, « Faust » de Goethe enfin lu, qui me laisse beaucoup moins convaincu que Werther. Hermann Hesse, poussé un peu plus loin, en particulier pour « Demian ». Franz Kafka, enfin ouvert (merci Laila), dont j’arrive à comprendre l’intérêt, mais dont le style m’a donné une sensation assez mitigée, que ce soit pour « La métamorphose » ou « Le château ». Un classique de la philosophie, Arthur Schopenhauer dont j’ouvre enfin « L’art d’avoir toujours raison ». Nietzsche, toujours et encore, surtout pour « Le gai savoir », mais aussi ses « Cinq préfaces à cinq livres qui n’ont pas été écrits ».
– Littérature latine, avec Paco Ignacio Taibo II comme souvent et son polar mexicain « Cosa facil », polar également, cubain cette fois, le premier qui a vu naître le personnage de Mario Conde, « Passé parfait » de Leonardo Padura. Pas le meilleur de la série, mais un début intéressant. Egalement un roman, de Juan José Saer, « L’Ancêtre » (merci Jeanne-Monique). Un recueil d’essais, fantastique sous bien des aspects, « Une planète et quatre ou cinq mondes » d’Octavio Paz. Enfin, les deux derniers entretiens entre Jorge Luis Borges et Osvaldo Ferrari, « Retrouvailles » et « Ultimes dialogues », aussi intéressants que les précédents.
– Amos Oz, dont je regrette pour peut-être la dixième année consécutive qu’il n’ait pas décroché le prix Nobel, avec « Entre amis » et « Scènes de vie villageoise » en particulier. Moins convaincu par son récent « Judas » et « Mon Michaël ».
– Exploration un peu plus poussée d’Oscar Wilde (merci Aurore), en particulier pour « L’importance d’être Constant » et « Un mari idéal ».
– Quelques essais, « L’âme désarmée » d’Allan Bloom (merci Mohamed), qui porte quelques idées intéressantes mais se plante sur de nombreux sujets et leur analyse et qui, au final, a mal vieilli. « L’ordre du discours » de Michel Foucault, « Construire l’ennemi » par Umberto Eco (hélas disparu cette année). Vomitif pour ses idées, génialissime pour son verbe, Céline avec « Bagatelles pour un massacre » (internet s’avérant très utile pour trouver ce qui n’est pas en librairie). Une découverte assez intéressante, Christopher Lasch pour « Culture de masse ou culture populaire ? » et « La culture de l’égoïsme » avec Castoriadis. Comme beaucoup, le « Traité sur la tolérance » de Voltaire. « Sur le concept d’histoire » de Walter Benjamin, qu’il me faudra sans doute relire, parce que je n’en ai strictement pas saisi la pertinence tant vantée par beaucoup… J’ai poussé un peu plus loin ma lecture de Patrick Boucheron, « Ce que peut l’histoire » surtout, puissant. Une biographie assez étrange et qui peut valoir le détour, « Jeremiah Johnson – Le mangeur de foie » par Thorp et Bunker. « La chute de la CIA » par Robert Baer qui, comme la lecture d’Huntington ou de Meddeb laisse une désagréable sensation, à se demander si les politiques ont seulement pris le temps de lire ces ouvrages (il y a, à peu de choses près, écrit dedans que la mort de Khadafi provoquerait un désastre… et ça date de 2001 !). Enfin lu en entier – je l’avais parcouru à maintes reprises -, « La conquête de l’Amérique de Tzvetan Todorov, magistral malgré quelques simplifications ici ou là.
– Littérature française, un détour par l’Indochine avec Jules Boissière et son « Fumeurs d’opium », le style n’est pas toujours très agréable, mais son éventail de personnages et les lieux décrits sont largement dépaysants. Autre époque, autre lieu, mais même effet, « Le négrier de Zanzibar » par Louis Garneray. Sade, avec ses nouvelles de « Historiettes, contes et fabliaux » (merci Christophe) dont quelques-unes valent leur pesant d’or. Houellebecq, dont la poésie m’a consterné, mais assez intéressant dans son « HP Lovecraft – Contre le monde, contre la vie ». « Les Bienveillantes » de Jonathan Littell enfin lues, fascinant sous bien des aspects, dans une plongée délirante à travers le nazisme. Sylvain Tesson et son « Petit traité sur l’immensité du monde » sympathique. Découvert par l’intermédiaire de Juan Asensio, Georges Bernanos pour « Dialogue d’ombres et autres nouvelles » qui m’a donné envie d’aller explorer plus loin le bonhomme.
– Théâtre, avec les deux derniers morceaux de « Le sang des promesses », « Forêts » et « Ciels » de Wajdi Mouawad. A la lecture, ça manque par moments de force, mais les explications de mise en scène donnent une dimension assez incroyable aux pièces (on regrette qu’elles soient données après le texte).
– Dans le désordre, Erri De Luca, plaisant mais assez vite oublié, dont j’ai lu 4 bouquins, « Le plus et le moins » et « Le poids du papillon » en particulier. Un western assez atypique, qui vaut le détour par son architecture incohérente – sans pour autant perdre en force -, « The Big Sky – La captive aux yeux clairs » de Alfred Bertram Guthrie. Pas franchement convaincu par « La tombe des lucioles » de Nosaka Akiyuki (je n’ai pas encore vu l’adaptation par Isao Takahata).
– Polars, avec une fournée 2016 assez décevante. D’abord avec un retour à Arsène Lupin dont j’avais lu deux livres adolescent… et que ce soit « Gentleman cambrioleur » ou « Arsène Lupin contre Herlock Sholmès », Maurice Leblanc ne m’a pas convaincu – bien moins puissant que le personnage de Conan Doyle notamment. Autre classique, autre déception, « Le crime de l’Orient-Express » d’Agatha Christie, que je connais très mal, mais dont j’avais adoré « Les dix petits nègres ». « Sous l’aile noir des rapaces » de Pierre Siniac, pas franchement génial. Peter Corris avec « Chair blanche », du bon, mais pas transcendant. David Peace avec son premier tome « 1974 » qui manque énormément de puissance… je comprends mal l’analogie faite avec le quatuor de L.A. de James Ellroy qui est bien plus fort (même si je trouve « Le Dahlia noir » bien trop surévalué). Enfin, la véritable touche positive, « Dawa » de Julien Suaudeau, qui met en scène de façon prophétique un attentat en France un vendredi 13 de l’année 2016 (mais mars pour le coup, et pas novembre).
– Pour conclure, une relecture, « Actuelles I – Ecrits politiques » d’Albert Camus, dont de nombreuses pages résonnent aujourd’hui avec une puissance terrible. A lire, relire et méditer…



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