Magazine Politique

L’affaire Prédicat nécessite un complément d’information

Publié le 22 janvier 2017 par Rolandlabregere

Par temps de froidures immodérées mais écologiquement nécessaires, on croyait que ce n’était que les frimas qui s’invitaient dans les débats. L’affaire Prédicat tombe à pic. Elle réchauffe les ardeurs de ceux qui tiennent l’Ecole comme premier responsable des difficultés que présentent certains élèves à comprendre un énoncé simple. Preuves par l’exemple, que l’Ecole et l’apprentissage de la langue sont des objets politiques. Des sujets politiques aussi. Un sujet de mécontentement de surcroît. Cette « affaire » réussit son entrée sans effraction dans le méli-mélo du primaire moment. Bien joué, les réformistes !

Pour l’instant, l’affaire égaye le quotidien des élèves du cycle 3 et laisse accessoirement leurs parents en rade sur la bande d’arrêt d’urgence de l’autoroute, téléphone portable déchargé et roue secours dégonflée. Qui est ce prédicat qui s’invite sans ménagement dans le bonheur pédagogique des enfants et aussi des enseignants ? Beaucoup de ceux-ci pointent la confusion née des nouveaux programmes. Faut-il avoir peur de ce prédicat qui bouscule la traditionnelle formulation si utile à la compréhension du COD (complément d’objet direct) pour l’apprentissage de la grammaire ? Fini le complément d’objet direct. Vive « le complément de phrase ».

Mais de quoi cette affaire de prédicat est-elle le nom ? C’est par désir de simplification que le Conseil supérieur des programmes l’a propulsée au-devant de la fosse d’orchestre. La notion de prédicat qui n’est pas une invention née d’un esprit qui voudrait « toute sa vie offenser la grammaire » comme le suggère Bélise à Martine lors d’un savoureux échange des Femmes savantes (1672). Elle a été ajoutée dans les programmes car elle est supposée permettre de mieux comprendre certains fonctionnements de la langue. Parler de prédicat n’est pas une nouveauté. La notion est ancienne et appartient à la tradition de l’analyse grammaticale. Mais, elle est aussi actuelle car les linguistes y ont recours. Michel Lussault, président du Conseil supérieur des programmes, tente de sauver la face en rappelant que cette notion ne serait pas désavouée par Aristote. Voilà une autorité qui sait manier l’ironie et le concept. Le programme est clair pour certains, la notion est nébuleuse pour d’autres. Déjà les tenants de fabrique du crétin sont à la manœuvre.

Petit retour à la case anthologie des angoisses enfantines : dans une phrase qu’on dira simple pour ne pas se compliquer l’envie de changer de sujet, on distingue en général deux groupes distincts, le sujet et le verbe et le/les complément(s), le prédicat qui apporte une information complémentaire. Accèdera-t-on mieux au sens et à la compréhension du fonctionnement de la langue par la voie nouvelle que par la tradition ? Apprendre à penser la langue devrait être la priorité de l’apprentissage de la grammaire. Une nouvelle fois, du bruit et de la fureur et une polémique inutile. La prochaine équipe qui s’emparera de la Rue de Grenelle mettra en route la réforme suivante.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Rolandlabregere 12 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines