Après l’excellent Whiplash, qui racontait le parcours tourmenté d’un jeune batteur de jazz, le réalisateur Damien Chazelle nous revient, en ce début d’année, avec le très attendu La La Land. Un projet singulier où il est, à nouveau, fortement question de musique, et de jazz même. Largement plébiscité lors des Golden Globes, le long-métrage vient de décrocher la bagatelle de 14 nominations aux Oscars. Un triomphe exagéré ou, au contraire, totalement mérité ?
A l’issue du visionnage, la deuxième option s’impose assez naturellement tant le film se montre abouti à tous les niveaux. Il ne faut d’ailleurs pas attendre plus longtemps que l’incroyable plan séquence d’ouverture pour réaliser que l’on va assister à une expérience cinématographique grandiose. Formellement superbe, La La Land enchante littéralement par la virtuosité de sa mise en scène, privilégiant les plans longs pour ne pas dénaturer les performances. Tantôt aérienne, tantôt énergique, la réalisation de Chazelle sublime – à un niveau dépassant toutes les attentes – le spectacle visuel qui se joue sous nos yeux. Un spectacle auquel la magnifique photographie de Linus Sandgren n’est évidemment pas étranger. Entre les couleurs léchées, les contrastes pétillants et le fantastique éclairage (remarquable jeu d’ombres et de lumières), le directeur photo compose en effet des images absolument mémorables. Le genre d’images qui nous imprègnent encore longtemps après l’apparition du générique final. Et que dire du montage si ce n’est qu’il brille par son efficacité, offrant au récit une narration limpide et un rythme enlevé.
Au-delà de sa dimension technique irréprochable, le film se distingue aussi par un scénario d’une grande richesse. Par le prisme de la comédie musicale, un genre loin de faire l’unanimité, Damien Chazelle aborde effectivement des thématiques universelles telles que l’amour, l’art ou encore le rêve. Empreinte de nostalgie, son écriture se révèle paradoxalement très contemporaine, un véritable tour de force dans l’optique de multiplier les niveaux de lecture. Et c’est bien là toute la maestria du long-métrage, parvenir à faire dépasser son propos du cadre de son histoire et de son style. En outre, malgré le romantisme exacerbé qui émane de l’œuvre, le réalisateur, et scénariste donc, a également la bonne idée de ne pas tomber dans une niaiserie un peu facile, préférant au contraire affronter les difficultés de la réalité. Il en résulte une romance bouleversante de sincérité, voyageant autant dans la drôlerie et l’euphorie que dans le drame et la mélancolie. Une romance qui doit, enfin, beaucoup à son formidable duo de stars. Charismatiques comme jamais, Emma Stone et Ryan Gosling font preuve d’une densité émotionnelle assez incroyable, passant avec une aisance déconcertante d’un registre à l’autre.Instantanément classique, La La Land s’impose donc comme une œuvre majeure, aussi éclatante et enivrante sur la forme que dense et subtile sur le fond. Transcendé par la virtuosité de la réalisation, la beauté extrême des images et la magnifique sensibilité du duo composé de Ryan Gosling et Emma Stone, le film ravit les yeux (et les oreilles) autant que le cœur. Un véritable chef d’œuvre, qui s’érige certainement comme l’une des dernières grandes comédies musicales.