APB est une nouvelle série de 12 épisodes diffusée depuis le début février sur les ondes de Fox aux États-Unis. Le titre fait référence à une application visant à combattre la criminalité et instaurée récemment par Gideon Reeves (Justin Kirk), un jeune milliardaire qui a bâti sa fortune dans les technologies. C’est que son meilleur ami est décédé lors d’un vol à main armée dans un dépanneur. Découragé par les lenteurs administratives de la police, il décide tout bonnement d’acheter le district 13 de la ville afin d’y remettre de l’ordre et surtout, de se servir de ses inventions pour combattre le crime. On a eu droit par le passé à toutes sortes de prémisses farfelues qui ne sont que prétexte à introduire une série procédurale. Pourtant, APB franchit un nouveau cap en croyant nous amadouer avec ses enquêtes de la semaine remplies d’actions alors qu’à la base même, son scénario ne fait aucun sens. Dénuée de toute éthique et accumulant les niaiseries à la vitesse de l’éclair, la nouveauté de Fox est trop tirée par les cheveux pour être prise au sérieux et trop simpliste pour qu’on la regarde tout de même comme un plaisir coupable. À éviter.
Le bon vouloir des oligarques
À la grande surprise d’un peu tout le monde, le maire de Chicago qui voit les élections venir à grands pas décide de donner son aval au projet de Gideon, en espérant que la sécurité restaurée lui vaudra assez de votes pour le maintenir dans sa fonction. Le jeune milliardaire ne fait pas les choses à moitié puisqu’il remet à neuf les bureaux du district, achète de nouveaux uniformes, de nouvelles voitures et même de nouvelles armes taser beaucoup plus efficaces et moins dangereuses que les fusils traditionnels. Très tôt, c’est la policière Theresa Murphy (Natalie Martinez) qui lui fait une forte impression, notamment parce qu’elle n’a pas la langue de bois et qu’elle prône d’abord et avant tout un service humain avant la plus efficiente technologie. Dans le premier épisode, elle et ses collègues Nicholas (Taylor Handley) et Tasha (Tamberla Perry) réussissent à mettre la main sur les voleurs qui ont tué le meilleur ami de Gideon. Dans le second, l’équipe est à la recherche d’un homme qui multiplie les délits de fuite alors qu’une fillette a été victime de sa conduite dangereuse. La semaine suivante, un gardien de sécurité est tué au cours d’un (autre) vol à l’étalage et c’est grâce à une chaise à capteurs biométriques sur laquelle un suspect est interrogé qu’on arrive à retrouver la trace de la bande.
Le principal irritant avec APB est que l’on est incapable de digérer la prémisse, d’autant plus qu’à chaque épisode, l’équipe fait face à une accumulation de questions éthiques auxquelles elle ne se donne même pas la peine de répondre. Le premier problème est le fait que l’on se départisse d’un service municipal sur un claquement de doigts sous prétexte qu’un bon samaritain peut en essuyer les dettes. On présume donc d’avance que toutes les intentions de Gideon sont louables et dénuées d’intérêt. Pourtant, on constate au fil des épisodes que les outils technologiques avec lesquels il équipe les bureaux proviennent tous (comme par hasard) de ses entreprises. Pire encore, les tests quant à leur efficacité ne se font pas à l’avance, mais bien sur le terrain lors de véritables missions. L’art de rentabiliser ses coûts…
L’autre élément qui nous embête, c’est qu’au vu des bonnes performances de ses initiatives, le milliardaire peut faire ce qui lui plaît sans embuche aucune. Par exemple, des micros sont directement intégrés aux nouveaux uniformes des policiers, si bien que leurs patrons et tous les collègues passant près de son bureau peuvent avoir vent de la moindre de leurs conversations, aussi intimes fussent-elles. Même chose pour le petit drone que Gideon manipule avec une manette à même le district. Une caméra y ayant été intégrée, il peut espionner dans n’importe quelle maison ce qui s’y passe et justement, il tombe sur une gang de criminels en train de brutaliser des citoyens, ce qui les permet d’intervenir à temps. Même chose plus tard lorsque Natalie interroge un suspect sur ladite chaise provenant de l’invention de son patron. Elle n’éprouve aucun remords à lui mentir et ce dernier n’a surtout pas droit à la présence d’un avocat puisque de toute façon, ELLE SAIT qu’il est coupable. C’est en ce sens qu’APB nous tombe constamment sur les nerfs. N’importe quel moyen semble être bon du moment que les résultats sont au rendez-vous… et comme il s’agit d’une série, ils le sont évidemment tout le temps.
District facétieux
Même au niveau de la mise en scène, APB n’est pas plus sérieuse. D’abord, ce sont ces nouveaux uniformes des policiers qui leur donnent l’allure de robocops ambulants. Sinon, on tente de provoquer de l’adrénaline chez le téléspectateur lors des nombreuses poursuites, mais il y a quelque chose de pathétique de voir un minuscule drone suivre une voiture qui prend Chicago pour un champ de courses et qui plus est, pilotée par Gideon comme s’il s’agissait d’un enfant devant un jeu vidéo. De plus, chaque série pour être distinctive se doit d’avoir si possible sa propre signature. Ici on a droit à l’omniprésence du bleu, même au niveau des rayons de soleil. La couleur signifiant davantage la froideur et la mélancolie, on comprend mal comment cela est censé s’agencer avec le ton badin qui nous est offert.
Et preuve au niveau du scénario qu’APB n’a pas les pieds sur terre. Au premier épisode, il est apparemment de notoriété publique que le fonds de pension des policiers de Chicago est dans le rouge de… 89 millions $. Somme que le généreux milliardaire propose d’éponger. Dans les faits, pour une ville de cette ampleur, un tel fonds serait dix fois moins élevé. De toute façon, en extrapolant, Gideon pourra rapidement économiser sur « la marchandise ». C’est qu’au cours des trois premiers épisodes, ce sont toujours les mêmes trois policiers qui vont sur le terrain alors qu’on en a une cinquantaine qui avec leur patron monitorent leurs faits et gestes depuis la station principale : du bois mort en fait dont il sera aisé de se passer éventuellement.
Il y a au moins eu un effet de curiosité concernant APB puisque 6,11 millions de téléspectateurs ont regardé la première avec un taux de 1,47 chez les 18-49 ans. Pourtant, à la deuxième semaine, 4,53 répondaient toujours à l’appel et le taux dégringolait à 1,04. Le problème est que la chute continue et au troisième épisode : l’auditoire est de 3,79 M (taux de 0,80). Peu de chances donc que la série connaisse une longue vie.
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