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Accidents des manipulations vertébrales et précautions à prendre

Publié le 08 mars 2017 par Khaled Benokba

Informer les patients sur les conséquences potentielles de tout acte médical comportant un risque est devenu une obligation médico-légale. Les manipulations vertébrales doivent se conformer à cette règle.

Lésion grave par erreur diagnostique

Il y a risque de fracture vertébrale si l’on pratique une manipulation sur une vertèbre porteuse d’une tumeur osseuse, d’un myélome, d’un hémangiome vertébral actif ou d’une ostéoporose sévère. Cette fracture peut elle-même se compliquer d’une compression médullaire ou d’un syndrome de la queue de cheval.

À retenir

Faut-il faire systématiquement des radiographies avant manipulation ?

La SOFMMOO (Société française de médecine manuelle orthopédique et ostéopathique) recommande une radio avant toute manipulation cervicale (radio même ancienne en l’absence de signes d’alerte). Pour le rachis lombaire et thoracique, une radio (ou toute autre forme d’imagerie) n’est nécessaire qu’en cas de présence de signes d’alerte. Seule exception : le sujet de moins de 25 ans chez qui une radio est nécessaire quel que soit l’étage à manipuler en raison du risque de kyste anévrismal.

Accidents vasculaires

Les manipulations cervicales peuvent entraîner une dissection d’une artère vertébrale à l’origine de troubles neurologiques, dont le plus classique est le syndrome de Wallenberg. Ces troubles sont heureusement le plus souvent réversibles, mais pas toujours, des séquelles pouvant persister. Les manœuvres en cause sont avant tout les manipulations avec composante rotatoire (lors du positionnement, de la mise en tension ou de l’impulsion).

La dissection survient sur une artère probablement dysplasique, anomalie non détectable en routine. L’hypermobilité C1-C2 et l’absence de boucle artérielle de sécurité à ce niveau seraient des facteurs favorisants. Elle peut survenir après une manipulation même légère ou après une simple rotation du cou, comme lors de la réalisation d’un créneau, par exemple.

Sa gravité dépend des embols qui migrent à partir de la lésion pariétale et de la circulation collatérale. Un point à signaler est la possibilité d’un début progressif avec d’abord des cervicalgies ou des céphalées puis installation du déficit neurologique au bout de quelques jours (1 à 5 en moyenne, au maximum : 2 semaines). D’où la règle de grande prudence dans l’indication à manipuler une cervicalgie très récente.

Sa fréquence est très faible mais difficile à apprécier. Le chiffre de 1 cas sur 70 000 manipulations du cou (une fréquence équivalente à celle des infections après infiltration) est cité.

Cependant, il est possible qu’existent des cas mineurs, comportant simplement un état vertigineux ou nauséeux pendant 2 à 3 jours après la manipulation, l’ensemble régressant spontanément. Ils ont cependant valeur d’alerte et doivent contre-indiquer la pratique ultérieure de manipulations cervicales.

Précautions à prendre ?

Le risque d’accident vasculaire vertébro-basilaire après manipulation cervicale est donc extrêmement réduit mais réel. La gravité potentielle de ces accidents est à mettre en regard de la bénignité du trouble traité et de la possibilité de traitement par d’autres méthodes. Trois stratégies de prévention ont été développées à ce jour :

La première stratégie : informer le patient du risque vasculaire. C’est un exercice difficile. Les physiothérapeutes australiens ont mis au point une déclaration à lire au patient : « Je souhaite manipuler votre cou en faisant un mouvement rapide à partir de la position dans laquelle je le tiens. Vous pouvez entendre un clic, ceci est normal. Les manipulations du cou peuvent être dangereuses mais c’est extrêmement rare. J’ai fait tous les tests recommandés et à mon avis, il y a très peu de risque dans votre cas. Acceptez-vous la manipulation ? »

La deuxième stratégie : elle est développée par les chiropraticiens français qui, suite aux travaux de Haynes, recommandent l’usage du Doppler vélocimètre juste avant la manipulation, tête en position neutre puis dans les rotations droite et gauche. Une baisse de débit en rotation témoignerait d’une artère hypoplasique et contre-indiquerait la manipulation. Cet examen rapide (2 minutes) a en plus l’avantage d’ouvrir la porte à une information du patient.

La troisième stratégie : elle consiste à éviter les manipulations avec composante rotatoire dans certaines situations à risque. C’est la voie choisie par la SOFMMOO, qui a émis cinq recommandations (J.-Y. Maigne).

Les cinq recommandations de la SOFMMOO

1. Ne pratiquer les manipulations cervicales qu’après une formation universitaire validée.
2. Ne manipuler le cou que si la douleur est bien d’origine cervicale.
3. Grande vigilance vis-à-vis des cervicalgies d’apparition très récente (quelques jours) car possibilité de dissection en cours d’installation.
4. Recherche de réactions anormales (nausées, vomissements, vertiges) lors d’une manipulation antérieure qui pourraient traduire une dissection a minima.
5. La manipulation cervicale avec composante rotatoire n’est pas recommandée chez la femme de moins de 50 ans.

Complications mineures postmanipulatives

Certaines réactions peuvent survenir après manipulation. Quoiqu’elles soient rares, le patient doit en être prévenu et avoir la possibilité de joindre téléphoniquement le médecin. Elles ne durent jamais plus de 48 heures. Elles se manifestent surtout lors de la première séance.

Il s’agit d’une fatigue, de courbatures (améliorées par l’aspirine ou un bain chaud) ou d’une aggravation passagère de la douleur. Cette dernière témoigne de l’action un peu irritante des manœuvres sur un segment mobile un peu enflammé. À la deuxième séance, il est souhaitable d’utiliser d’autres techniques et de prévoir un court traitement AINS d’accompagnement.

Il est extrêmement important de s’assurer au départ de la coopération active du patient en lui expliquant le but poursuivi, en lui signalant toutes les réactions éventuelles et, enfin, en lui demandant de garder les yeux ouverts.

Lire aussi : Manipulations vertébrales, indications et contre-indications

Références : La revue le mal de dos, Jean-Yves Maigne.


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