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D’Adam, premier golem biblique, aux derniers avatars de la robotique, le mythe du Golem est riche d’histoires. Le musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme propose dans son exposition Golem !de nous plonger parmi les multiples avatars d’une créature légendaire qui continue d’irriguer notre modernité.
Du mythe symboliste à Niki de Saint-Phalle
Au commencement était Rabbi Loëw. Ce rabbin de Prague pseudo-historique aurait inventé une créature, le Golem, afin de protéger la communauté juive des pogroms ; jusqu’au jour où il en perdit contrôle, et de protecteur, le Golem devint une menace monstrueuse.
Cette version célèbre du mythe date des contes populaires du xixe siècle que l’écrivain autrichien Gustav Meyrink synthétise dans son roman symboliste paru en 1915, Le Golem. L’ex-protecteur devient une force mystérieuse, un miroir déformé de l’humanité, une altérité méconnue que graveurs, dessinateurs et jusqu’aux cinéastes, dont fait partie le fameux Golem expressionniste de Paul Wegener (1920), s’empressent de saisir.
À l’inverse, une représentation plus positive du Golem voit le jour outre-Atlantique. Dans les comicsaméricains, souvent écrits et dessinés par des auteurs juifs, la figure du Golem se retrouve chez certains monstres au service du Bien, au premier chef Hulk et La Chose. Avec la Shoah, le Golem redevient dans les comics uchroniques le vengeur de la communauté juive.
La créature trouve un autre avatar chez la plasticienne Niki de Saint-Phalle. Le Golem qu’elle sculpte pour le parc Rabinovich à Jérusalem-Ouest, tout en couleurs, n’a plus rien d’effrayant ; à l’image de ses trois langues, symbole des trois monothéismes, qui servent de toboggan pour les enfants, le monstre est devenu un objet de fantaisie avec lequel la communauté s’amuse.
Le Golem, miroir de notre modernité
Mais le parcours de l’exposition ne se contente pas d’une chronologie aussi générale. Confrontant différentes époques et plusieurs artistes à chaque point, la scénographie révèle à quel point cette figure mythologique change de sens et de forme à chaque utilisation.
Car par sa polymorphie et sa plasticité, le Golem dérange, et oblige à repenser nos catégories. C’est à une véritable introspection de la psyché moderne, placée sous le signe du monstre, que nous invite le parcours : porte après porte, nous nous enfonçons toujours plus bas dans les profondeurs du musée, et pénétrons la dimension mystique du Golem.
Le dernier étage de l’exposition, le plus proche de la terre d’où a émergé la créature, présente les réinterprétations contemporaines du mythe dans les milieux artistiques. Photographes, cinéastes, performers, tou.te.s celles et ceux qui s’attaquent au Golem n’y trouvent pas d’ennemi, mais un miroir de la condition humaine.
De boue ou d’acier, le monstre n’a pas fini d’intriguer et d’offrir aux créateurs humains le double visage d’un modèle et d’un contre-modèle.
Golem ! Avatars d’une légende d’argile, au musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme jusqu’au 16 juillet 2017
Maxime