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Aprés j'arrête

Publié le 19 mars 2017 par Alexcessif
Riverain de la piste d’accélération je peste, comme tous les vendredi soir, contre les motos bruyantes. Ces cons là, dés qu’ils achètent une meule et le déguisement de Mad Max qui va avec, bricolent leur échappement pour faire un « beau bruit ». Pour moi un beau bruit c’est Mozart ou Rachmaninov. Delpech, à la rigueur…
Et puis je me souvins du printemps 76 bien avant d’être un vieux con
Fuite (éloge de la…) Aprés j'arrête
Le flic me fait signe de me ranger sur le bas coté et revient sur la départementale pour intercepter d’autres bécanes sans un regard sur ma plaque d’immatriculation. Ce n’est pas pour la vitesse : on roule à la queue leu leu depuis Nogaro.
« -qu’est-ce qu’il veut ?demandés-je au dernier de la file
- ben chais pas, y m’a dit d’attendre. Y a en déjà un dans l’estafette. »
Je pige assez vite que les pandores sont là pour faire un peu de maille. J’observe le manège de mon flicard : au fur et à mesure qu’un client descend de la fourgonnette, il refait le stock pour son collègue. Des pros ! Formés au partage des taches : tandis que l’un choisit à l’oreille et à l’œil une possible infraction, l’autre crevard fait le tour des bécanes espérant le tirage gagnant d’un cligno ou d’un rétro manquant avec le numéro joker d’une plaque d’immat’ non conforme ou d’un pneu lisse avec option défaut d’assurance. Puis il remonte dans sa camionnette pour taper les PV à deux doigts sur son Olympia.
Et c’est long !
Ça me gave de rester à attendre dans la file des moutons à tondre, le casque sur la tronche.
Pas inutile :
 A l’époque pas mal de motards d’opérettes roulait au dessus de leur moyens souvent sans assurance avec des trapanelles de petites cylindrées et en ruine, mais en principe on ne les voyait que rarement au-delà des 20 bornes de chez papa/maman. Ici on est sur le retour d’un Grand prix 750 à Nogaro au fin fond du Gers.
Pas inutile, mais un peu longuet.

Je comprends vite qu’il m’a casté au son caverneux de mon échappement libre comme l’air mais, tout à sa tache de chien de berger rassemblant des brebis, il ne s’occupe plus du troupeau. Toujours verrouiller ses acquis bordel, toujours ! Putain, que c’est long ! Et puis me vins l’image du film de José Giovanni sortit un an plus tôt où l’on voyait Delon sur sa 750 H1 s’arracher d’un barrage de CRS sur la roue arrière. La 7 et ½ Kawa, t’avais du mal du mal à lui garder la roue avant au sol sur les trois premier rapports et elle n’avait pas de démarreur électrique. Point mort en bas, 5 vitesses en haut, c’était chaud pour démarrer le bouzin au kick, embrayer et se casser avant que la maréchaussée ne soit alertée par le bruit du moteur. Dans « Le Gitan » c’était Rémy Julienne qui avait assuré le coup pour le compte d’Alain Delon. Il était temps de fuir Ma quatre pattes aussi faisait du raffut mais j’avais LE démarreur électrique, moi. Moteur coupé, calant la Honda contre ma hanche, pied droit sur le cale pied, gauche au sol, j’enclenchais la première. Discrétos j’enfilais mes gants et repliais la béquille latérale. J’attendis que le perdreau remonte dans son burlingue mobile et soit bien calé sur sa banquette au fond de l’estaf’ derrière sa machine à distribuer les prunes en m’assurant que son complice, de dos à quelques mètres en retrait, soit persuadé de notre docilité.
Action ! En amazone sur une fesse, d’un coup de démarreur le quatre cylindres se mit à rugir, j’embrayais et partis en équilibre avec un peu de gite à droite pour compenser les deux jambes groupées à gauche. Tandis que je me hissais sur les cales pieds pour enfourcher ma monture, j’étais déjà à 90 Km/h avant de retrouver mon assise, enjambant la selle, réservoir bien serré aux genoux et la tête planquée derrière les instruments du tableau de bord. Seconde 120, 160 à fond de trois au badin 14 secondes plus tard. J’eus le temps de voir au ralenti le gendarme assis relever la tête et le gendarme debout tourner la sienne dans les rétros qui vibraient. En fond d’écran sur la visière de l’intégral rabattue par le vent, un vieux refermait ses volets en avance sur le soleil couchant. Des passants étirés en ligne de fuite, des platanes alignés comme dans un code barre et la chevauchée des Walkyrie jouée par les orgues de Staline des quatre pots d’échappement en guise de bande son, histoire de se sortir du village à l’arrache.
Retour à Bordeaux en solo évitant les motos en convoi par les chemins de traverse au cas où…
Parce que dans six mois je serai papa de mon premier né et va falloir arrêter les conneries

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