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Longévité théâtrale

Publié le 30 mars 2017 par Podcastjournal @Podcast_Journal
Rédacteurs et stagiaires: cliquez sur cette barre pour vous connecter en back-office de la rédaction! Recherche par tags (mots-clés) Recherche d'évènements (agenda) Au Petit Montparnasse, Geneviève Casile fait revivre "Alma Mahler, éternelle amoureuse", dans une pièce de Marc Delaruelle, mise en scène par George Werler. L'auteur retrace l’histoire de l’épouse du compositeur Gustav Mahler. Pour l'interprète "C’est une femme de courage, de conviction. Une passionnée fantastique et surtout une immense amoureuse des hommes, bien sûr, mais surtout de l’art". A presque 80 ans, Geneviève Casile, sociétaire honoraire de la Comédie-Française où elle a tenu pendant plus de 30 ans les plus grands rôles du répertoire, était l'interprète idéale pour faire revivre avec brio cette femme qui, plus d'un demi-siècle après sa mort, fascine toujours et inspire encore biographes et essayistes. Dans la pièce de Marc Delaruelle, Alma âgée de 81 ans vit à New York où elle est revenue après la mort de son troisième mari Franz Werfel à Los Angeles en 1945. Elle y mourra le 11 décembre 1964. Elle vient de terminer ses mémoires et dans son appartement, elle attend l'éditeur pour relire les épreuves. Il arrivera en retard à cause de la pluie, ce qui suscite la colère, l'ironie voire le mépris d'Alma. En attendant, elle boira quelques petits verres de Bénédictine, breuvage dont elle était amateur et qui, précise-t-elle, "ne supporte pas le dé à coudre"...
Née le 31 août 1879 à Vienne, elle est la fille d'Emil Jakob Schindler, peintre paysagiste célèbre. Elle avait toutes les qualités, belle, intelligente, musicienne, compositrice, peintre, et elle fréquente tout ce qui comptait alors dans la capitale de l'empire austro-hongrois où elle fut une personnalité éminente de "l'Apocalypse joyeuse". Elle est courtisée par,le peintre Klimt, le compositeur Alexander von Zemlinsky ou le directeur du Burgtheater Max Burckhard entre autres. Avant d'épouser en 1902 Gustav Mahler de 19 ans son aîné, qui est alors directeur de l'Opéra de Vienne. Elle réalise très vite qu'elle doit servir la gloire de son époux et oublier son projet de grand opéra ainsi que ses tableaux et ses lieder, lesquels restent encore appréciés aujourd'hui. Le ménage n'est pas des plus heureux et Mahler qui mourra le 18 mai 1911, consulte même Sigmund Freud...
Trois acteurs sur scène retracent cette existence. D'abord Geneviève Casile, puis Stéphane Valensi qui interprète tous les hommes qui ont traversé la vie de l'héroïne. Ses maris, Mahler le compositeur, Walter Gropius, l’architecte créateur du Bauhaus, Franz Werfel l’écrivain. Mais aussi ses nombreux amants dont le peintre Oskar Kokoschka et même le père Hollsteiner, théologien réputé... D'où son surnom "la veuve des Quat’Z Arts", la musique, la peinture, l’architecture et la littérature. Et d'après Marc Delaruelle "De tous, elle fut la muse, tantôt inspiratrice, tantôt protectrice, mais toujours fascinée par le talent". Quant à Julie Judd, elle est alternativement Alma jeune et aussi sa fille Anna, née le 15 juin 1904 à Vienne et morte le 3 juin 1988 à Londres. Elle fut un sculpteur reconnu. Une autre fille de Mahler, Maria, mourut à cinq ans. Quant à Manon, fille de Gropius, elle mourut à 18 ans en 1935. Ce qui inspira à Alban Berg son "Concerto à la mémoire d'un ange".

Il est possible d'effectuer cette extraordinaire plongée dans la Mitteleuropa jusqu'au 30 avril 2017, au Petit Montparnasse, 31 rue de la Gaîté dans le XIVe arrondissement de Paris.

Le Lucernaire situé dans le quartier parisien de Montparnasse propose "L'Amante anglaise" de Marguerite Duras. Pièce créée en 1968, salle Gémier du Théâtre national populaire - Théâtre de Chaillot dans une mise en scène de Claude Régy. Madeleine Renaud habillée par Yves Saint Laurent, était Claire Lannes et son mari Pierre Lannes était interprété par Claude Dauphin et l’interrogateur par Michaël Lonsdale. Tout d'abord, Marguerite Duras s'était inspirée d’un fait divers criminel survenu en 1949. Amélie Rabilloud avait tué son mari, l'avait dépecé et depuis un viaduc avait jeté les morceaux sur les trains qui passaient. Défendue par Me René Floriot, lors de son procès en 1952 devant les assises de Versailles, elle n'avait pu expliquer son geste. Marguerite Duras en avait tiré une pièce, "Les viaducs de la Seine-et-Oise", créée en 1960 au Théâtre de la Rue Montgrand à Marseille dans une mise en scène de Roland Monod, puis mise en scène par Claude Régy, en 1963, au Poche-Montparnasse.
N'aimant pas cette pièce, l'auteur reprend l'histoire, en fait un roman "L'Amante anglaise" qui paraît en 1967. Puis la pièce qui est représentée un an plus tard, salle Gémier. La femme du fait divers qui avait assassiné son mari est devenue Claire Lannes qui tue sa cousine Marie-Thérèse Bousquet, sourde et muette, découpe le corps et jette les morceaux dans des trains de marchandises qui passent sous un viaduc peu éloigné de son domicile. Elle a caché la tête. Arrêtée, elle avoue aisément sans toutefois pouvoir expliquer les raisons de ce crime. La pièce a toujours retenu l'attention des comédiennes, notamment celle de Madeleine Renaud, Suzanne Flon ou Ludmila Mikaël. On ne peut pas dire que ce soit à cause du propos policier puisque dès le départ on sait qui a tué. Au Lucernaire, quel que soit le talent du metteur en scène Thierry Harcourt qui dirige habilement Jacques Frantz, le mari et Jean-Claude Leguay, le policier, on ne peut s'empêcher d'attendre avec impatience l'apparition de la lumineuse Judith Magre. A bientôt 91 ans et après une riche carrière où elle a presque tout interprété, au cinéma, au théâtre ou à la télévision, elle aborde "L'amante anglaise" pour la première fois et son interprétation est tout simplement fascinante.
Le titre de la pièce peut sembler curieux, il fait allusion à une façon d'écrire de Claire Lannes, elle a un jardin où il y a de "la menthe anglaise", elle l'interprète comme "l'amante"…

Il est possible de suivre cette affaire jusqu'au 9 avril au Lucernaire, 53, rue Notre-Dame-des-Champs dans le VIe arrondissement de Paris. Du 22 février 2017 au 5 mars 2017, dans le cadre du Festival Singulis, Quatre seuls-en-scène, quatre monologues, Danièle Lebrun faisait revivre brillamment au Studio théâtre de la Comédie-Française "L'envers du music-hall" de Colette. A près de 80 ans, cette ancienne sociétaire de la Comédie-Française, partie puis revenue récemment dans l'auguste maison, en a réalisé l'adaptation, la mise en scène, la conception et en a été l'interprète. Marcel Bluwal était le collaborateur artistique. Colette avait écrit une vingtaine de textes publiés en 1913 "L’envers du music-hall", ensemble inspiré par sa propre carrière de mime où elle nous révèle les coulisses des music-hall du début du XXe siècle. On en retrouve aussi des souvenirs dans "La Vagabonde". Colette a connu les tournées qui l'ont menée de Nice à Bruxelles, Lyon, Marseille ou Tunis, les repas médiocres souvent pris à la va-vite, les salles de spectacles peu accueillantes, les loges qui ne le sont pas moins, le public impitoyable, les nuits dans des hôtels souvent miteux, des départs à l'aube glacée, des voyages fatigants avec d'interminables attentes dans des gares peu confortables. Elle en tire une série de portraits émaillés de dialogues et d'anecdotes qui nous donnent un aperçu haut en couleur des dessous de cette vie d'artiste. Une fois les costumes quittés, les paillettes abandonnées ou les fards effacés. Colette précise: "Nous sommes laids, sans grâce et sans humilité. Pâles de surmenage, ou bien rouges d’un déjeuner hâtif. La pluie de Douai, le soleil de Nîmes, le vent salin de Biarritz ont verdi, roussi ces lamentables "pelures" de tournée, grands manteaux cache-misère qui se targuent d’un genre anglais".
C'est tout cela que Danièle Lebrun, vêtue d’un ensemble rouge très années 1900, restitue avec réaliste et humour, campant à fois l'auteur et les personnages aidée de quelques accessoires.
Sidonie-Gabrielle Colette qui est née le 28 janvier 1873 dans une petite localité bourguignonne, a alors 32 ans quand elle aborde cette période de son existence. Séparée de son premier mari Henry Gauthier-Villars alias Willy, pour qui elle a écrit la série des "Claudine" entre 1900 et 1903, elle étudie le mime avec un artiste célèbre de l'époque Georges Wague. De 1907 à 1913, jusqu'à son remariage avec Henry de Jouvenel, on la verra ainsi dans des spectacles de pantomime, évoquant un faune, une momie égyptienne, une bohémienne ou une chatte amoureuse, parfois dans des tenues plus que légères dégageant alors un parfum de scandale...

Si malheureusement, on n'a pu assister à ces représentations du Studio théâtre, sous la Pyramide du Louvre, on peut essayer de trouver "L'envers du music-hall" paru en 1993 chez Flammarion.

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