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Lucila Guerrero et son fils Luka - crédit photo Lucila Guerrero
Les couleurs de l'autisme est une initiative pour faire connaître et briller les différentes couleurs, toutes uniques, de l'autisme, pendant le mois d'avril. Après l'histoire de Maëlle et d'Édouard, d’Antoine et de Poulet, voici celle de Lucila Guerrero, d'origine péruvienne, ainsi que celle de son fils, Luka, tous les deux autistes.
Le flou d’où je viens
Je suis née au Pérou. Ma vie, entre la rentrée à l'école et devenir une analyste-programmeuse et une femme mariée, s'est déroulée à Piura, une ville sur la côte nord, près de l'Équateur.
Enfant "modèle", très calme, très silencieuse, très bonnes notes, sans créer du trouble. Quelques pleurs forts à la maison, parfois, bien que je ne m’en souvienne pas beaucoup. C'est à l'adolescence que je me suis rendu compte de ma différence par rapport aux autres filles de mon âge. Je me sentais seule et je ne savais pas qui responsabiliser. Je me suis dit: "ça doit être de ma faute, alors il serait mieux si n'existais pas".
J'ai pensé beaucoup à cela
J'ai pensé beaucoup à cela. Beaucoup. À ce qui est irrémédiable.
Anorexie et dépression suivies d'un désir désordonné d’indépendance ou de mort sont arrivées. En même temps, mon entrée dans le monde universitaire, ma première relation de couple avec une personne qui se montrait adorable pour exercer après sa violence verbale et physique, en privé et publique. Cette relation a duré plusieurs années qu’heureusement se terminent avant le pire : un mariage avec lui.
J'ai été exploité plusieurs fois
J'ai trébuché çà et là, en cherchant à être aimée, être comme les autres, être acceptée, un endroit où je cadrerais bien. J'ai vécu d'autres formes de violence, harcèlement et humiliation comme femme. Une époque difficile jusqu'à la rencontre avec une personne qui riait avec moi de mes différences. Nous rions tellement que nous nous sommes mariés pour continuer à rire toute la vie.
Dans la même époque, je travaillais et j'étais informaticienne. J'aimais mon travail jusqu'au point de pouvoir travailler sans rémunérations. Je le disais oui à tout le monde même à mes chefs. Devinez quoi ? Oui, j'ai été exploité plusieurs fois.
Nous avons commencé à zéro
En 2001, mon mari et moi avons décidé de quitter notre pays et de nous installer à Montréal, au Canada. Nous avons commencé à zéro. J'avais confiance en l'avenir, avec lui tout était bien, tout était facile, j'avais juste à le suivre, me laisser aller et continuer à rire.
Tout à coup, la nature a fait son œuvre en moi en me faisant devenir maman. Et moi qui ne pensais jamais à la maternité ni aux enfants. Moi, qui étais la plus indifférente, je suis devenue la plus heureuse des mères quand j'ai eu mon bébé dans les bras.
Seule avec mon fils
Mon fils était ma priorité. Ce n’était pas bien perçu. Surtout qu'il avait besoin de beaucoup d'attention et que ma vie a changé. Les gens qui se sentent importants quand ils offrent des conseils gratuits me faisaient savoir leurs commentaires : «fais ceci, ne fais pas cela». Je n'ai pas écouté. Mon mari ne riait plus et il est parti. Je suis restée seule. Sans ami proche. Seule avec mon fils. Dans ma solitude, j'ai découvert que j'avais des capacités. Ma passion pour l'art était de retour, encore présente.
Seule avec mon inspiration. Seule sans être jugée. Le pas suivant était de sortir dans le monde une autre fois, mais cette fois-ci avec attention, en choisissant chaque personne qui rentrerait dans ma vie. Seulement le positif. Ce n’était pas facile. J'ai pleuré. Je n'ai pas dormi. Cela m'a fait mal. Mais les transformations font mal. C'est le prix. C'est ainsi que j'ai pu continuer à grandir.
Nous sommes autismes
Entre 2008 et 2010, j'ai découvert que nous sommes autistes. Mon fils et moi.
Tout avait commencé quand mon fils, à l'âge de 2 ans et demi, a voulu qu'on l'appelle «Tren Azul» (Train bleu) au lieu de son vrai prénom. Ce changement a duré 20 mois. Je n’avais jamais noté quelque chose d’inquiétant en lui parce que je trouvais qu'il me ressemblait. Je me suis dit que c'était tout simplement sa personnalité. Pour être certaine, je suis allée consulter et après une période de rencontres avec des spécialistes, j'ai reçu la confirmation : Asperger.
Une époque intense à faire de l'introspection pour mieux me connaitre.
J'ai compris que je suis une personne belle intérieurement, telle que je suis. Que j'ai des qualités. Des valeurs. Que j'ai le droit à vivre d'accord à ma façon naturelle d'être. J'ai commencé à voir les horreurs qu'on peut commettre en essayant de normaliser les gens. J'ai pleuré de voir autant d'injustice et les humiliations contre d’autres personnes comme moi.
Alors je suis devenue sensible et engagée avec la cause du respect de la diversité humaine.
Maintenant, je suis une artiste professionnelle. Je suis aussi l'auteure de « Lundi, je vais être Luka ». Je donne des conférences et je suis l'initiatrice de divers projets pour proposer des réflexions sur la neurodiversité, sur la condition autistique et sur la fierté d'être la personne que nous sommes.
Pour la reconnaissance positive de l’autisme
Je suis cofondatrice d’Aut'creatifs, un mouvement de personnes autistes pour notre reconnaissance positive. Je m’implique pour l’éducation comme cofondatrice de la Coalition de parents d’enfants à besoins particuliers du Québec. Je collabore avec d'autres organismes en art et autisme. «Aimer dans l’imbroglio», mon dernier projet est une exploration de l'amour, dans toutes les formes, manifestations et gestes, chez les personnes autistes.
Ma vie est loin d'être rose. Il y a de malentendus, tristesses, incompréhension. Je dois batailler contre le système non inclusif. Je dois batailler pour moi et les autres. Je dois respirer fort devant chaque porte qui se ferme devant moi et me dire que peut être la prochaine s’ouvrira. Je veux aider à construire un chemin pour que la vie de mon fils et de tous les autistes soit moins difficile que la mienne. Et c'est justement ce qui donne un sens à ma vie. Finalement. Après m'avoir autant questionnée sur le sens de vivre.
«Si tu ne t'aimes pas, personne ne va t'aimer»
Une personne positive, trouvée dans mon chemin m'a dit un jour : «si tu ne t'aimes pas, personne ne va t'aimer». Elle avait raison. Pour être aimée, j'ai dû m'aimer avant et m'accepter comme je suis. Maintenant, je ne suis pas seule. Et je suis en paix. Par mon implication, j’essaye de contribuer à ouvrir le chemin pour nos enfants et les générations futures. Je remercie la générosité de tous ceux qui dans la mesure de leurs possibilités peuvent donner et aider.
Je vous invite à visiter mes liens et être en contact avec moi.Lucila Guerrero, auteure et artiste
Découvrez Lucila Guerrero en visitant son site web et ses pages Facebook, LucilaGuerreroArtiste, Autcreatifs, Projetaimer
Et vous, quelle est votre couleur?
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- Nous remercions Valérie Bouchard, deMinimo motivation ludique pour le logo.
Catherine, Nadia et Julie, cofondatrices
Les couleurs de l’Autisme