Des idées délirantes et un sentiment de persécution qui s'aggrave traduisent une réponse émotionnelle exagérée du cerveau à des signaux non menaçants et non émotionnels. Ces signaux peuvent être considérés comme prédictifs de l'émergence de symptômes psychotiques durant l'adolescence. C'est la conclusion de cette étude de l'Université de Montréal (UdeM) présentée dans l'American Journal of Psychiatry et qui concorde parfaitement avec les hypothèses de la manifestation des premiers symptômes de la psychose.
En effet, explique Josiane Bourque, étudiante au doctorat au Département de psychiatrie de l'Université de Montréal et auteur principal de l'étude, " les idées délirantes et les sentiments de persécution qui apparaissent progressivement sont une forme de défense du cerveau contre une importance émotive exagérée aux signaux non menaçants et neutres de l'environnement " .L'étude a suivi 1.196 jeunes Européens âgés de 14 ans de la cohorte IMAGEN (Imaging Genetics for Mental Disorders). Les chercheurs ont surveillé l'activité cérébrale des jeunes participants durant différentes tâches cognitives, leur sensibilité à la récompense, leur capacité d'inhibition ainsi que leur traitement de visages exprimant des émotions et d'autres pas. Les adolescents ont également renseigné par questionnaire leurs éventuels symptômes psychiatriques de 14 à 16 ans. L'étude montre que :
-A 16 ans, 6% des participants déclarent avoir déjà eu des hallucinations visuelles ou auditives ou des des idées délirantes,
-L'incidence de ces différents signaux combinée à la consommation de cannabis avant 16 ans et à une réponse exagérée du cerveau à des visages neutres à l'âge de 14 ans constitue un mode de détection de symptômes psychotiques à 16 ans.
L'importance d'une identification précoce de cet état de vulnérabilité : en détectant des anomalies dans l'activité du cerveau d'adolescents bien avant l'apparition des premiers symptômes psychotiques, l'équipe canadienne permet cette identification précoce et apporte les moyens de prévenir les comportements à risque, dont l'usage de substances, chez ces adolescents pré-psychotiques. Les chercheurs voudraient même aller plus loin, et déterminer s'il est possible de modifier cette réponse exagérée aux signaux non menaçants.
En conclusion, il est possible de détecter la vulnérabilité à la psychose dès l'adolescence. Ce mode de détection ouvre ainsi une fenêtre précieuse d'intervention pour prévenir les comportements à risque mais peut-être aussi les processus clés à l'origine de la maladie. A partir de là, l'équipe réfléchit à de nouvelles stratégies d'intervention pour les très jeunes identifiés avec cette vulnérabilité à la psychose. Peut-être des programmes d'exercice physique ?
American Journal of Psychiatry, 21 mars 2017 DOI: 10.1176/appi.ajp.2017.16080897 Functional Neuroimaging Predictors of Self-Reported Psychotic Symptoms in Adolescents