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L’éveil à la vie

Par Balndorn
L’éveil à la vie


« Tu sais que t’avances, tu connais le chemin. Mes parents m’ont emmené au théâtre, en vacances, c’était super… Mais y a un truc qui manque. Y a pas de créativité, y a pas de génie. Y a pas juste la possibilité de regarder la mer et de se dire : wahou, c’est ça le tableau. »Louise, ex-travailleuse du secteur de la communication à Paris reconvertie dans la permaculture, a les mots justes pour dire le mal-être qui frappe une bonne partie de la jeunesse : le sentiment d’avoir inconsciemment emprunté une autoroute qui file à grande vitesse vers le confort de la consommation.Face à ce destin social, L’Éveil de la permaculture propose les portraits de citoyen.nes qui ont décidé avec courage de jouir de chaque sentier qu’ils rencontrent.

Permaculture des sensations
Les premiers plans du documentaire d’Adrien Bellay frappent par leur caractère poétique : comme immergée dans une jungle, la caméra tremblante observe les mouvements délicats qui agitent les feuilles, les insectes, les arbres. On pourrait se croire dans un documentaire animalier magique, à l’image de Microcosmos : Le Peuple de l’herbe (Claude Nuridsany et Marie Pérennou, 1996) ; mais l’irruption d’une voix douce, puis d’un cahier aux dessins presque enfantins, enfin du visage d’un jeune reconverti à la permaculture, dément notre sentiment premier. Nous ne sommes pas dans une forêt vierge : nous contemplons la richesse d’une nature-culture, fruit du génie de l’homme et des énergies naturelles.S’il explique bien entendu les bienfaits d’une production agricole qui laisse libre cours aux puissances du végétal, L’Éveil de la permaculturene se réduit pas à un objet scientifique et technique. « La permaculture est une autre culture, une autre manière de vivre », dit avec justesse l’un des professeurs interrogés. À l’image de ces producteurs d’un nouveau genre, Adrien Bellay nous invite à changer de point de vue sur ce que l’on appelle « nature » : celle-ci n’est pas un espace radicalement séparé du monde humain, mais un territoire riche d’enseignements et de beautés, où il faut se plonger pour jouir de sensations qui modifient notre perception de la vie.
Humilité des mots, lumière des images
Le film ne suit pas une narration d’ordre didactique, à la différence de Demain (Cyril Dion et Mélanie Laurent, 2015), très semblable sur le fond, qui déroule la révolution structurelle à effectuer pour changer le monde. À l’inverse, L’Éveil de la permaculture avance par à-coups, au fur et à mesure d’interviews qui, si elles paraissent se répéter en surface, confirment en profondeur un même désir de changer de mode de vie, pour retourner au plus près du plaisir quotidien.  
De ce point de vue, le film apparaît beaucoup plus humble que Demain. À la parole des experts que privilégie ce dernier, le film d’Adrien Bellay, qui a lui aussi son lot d’experts, ajoute la parole des reconverti.es, de celles et ceux qui ont fait le choix d’abandonner une carrière toute tracée en direction de l’élite sociale.  
Des paroles simples, qui vont de paire avec une simplicité de la mise en scène. Souvent tremblotant, le cadre baigne dans une atmosphère douce et solaire. Un paradis sur terre, qui existerait déjà, à condition qu’on s’y engage. C’est la grande différence avec Demain : là où Cyril Dion et Mélanie Laurent dessinent le chemin vers une révolution écologique et sociale en s’appuyant sur des exemples concrets, Adrien Bellay se cantonne à ces exemples existants pour en montrer le bonheur de vivre. Un autre monde a déjà cours.
L’éveil à la vie
L’Éveil de la permaculture, d’Adrien Bellay, 2017
Maxime

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