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La faim pour défendre la fumée

Publié le 17 mars 2008 par Dalyna

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Il s’appelle Abdel El Ahmer, patron du « Houara Lounge », un salon à narguilé à Paris, et totalisera d’ici quelques jours un mois de grève de la faim. « J’ai quelques vertiges le soir, mais l’essentiel est d’avoir le moral », confie t-il, installé sur une banquette de son salon oriental, où il a élu domicile jusqu’à ce qu’il se fasse entendre. Ses revendications ? Sauver son commerce et défendre la liberté des fumeurs de narguilé en France. En effet, depuis le nouveau décret de la loi anti-tabac qui interdit la possibilité de fumer dans les lieux publics, les patrons des salons à narguilé (et non pas bars car ils ne disposent pas de la licence IV permettant de vendre de l’alcool) n’ont vu s’offrir à eux que deux possibilités : mettre la clé sous la porte, ou transgresser sous peine de récolter des amendes. « Ce type de commerces n’étant pas reconnu, nous n’avons pas droit à des indemnités. Or, j’ai investi des centaines de milliers d’euros que je rembourse par crédit à hauteur de 1 400 euros par mois. Comment vais-je faire pour rembourser ? ».

L’activité du salon, situé dans le XIVème arrondissement, se poursuit. Malgré le risque d’amendes, quelques habitués continuent de venir se détendre en ces lieux. L’un d’eux, Stéphane, 19 ans, soutient Abdel dans son combat. « Je trouve cette loi inadmissible. Des patrons comme Abdel ont travaillé toutes leurs vies pour investir dans ces salons et se retrouvent ruinés au final. Ce sont les PME qui relancent l’économie en France, et au lieu de les aider, on leur met des bâtons dans les roues ».Le jeune homme affirme militer de son côté, notamment en se rendant à des manifestations organisées par l’Union des professionnels du narguilé (UPN), qui tente depuis des semaines d’obtenir un rendez-vous avec le Président de la république. En vain.

Quasiment méconnus il y a dix ans, il existe aujourd’hui près de 800 salons à narguilé dans toute la France, dont la moitié se situe à Paris. « J’ai ouvert ce lieu en 2005. A l’époque, nous ne savions pas que la loi anti-tabac évoluerait de cette manière. Et puis, nous ne nous sentions pas concernés, sachant qu’il s’agit de fumoirs ». Lorsque le nouveau décret fût adopté il y a un an, les salons à narguilé se sont trouvés plongés dans un flou administratif jusqu’au 1er janvier 2008. Suite aux nombreux appels au Ministère de la santé, au commissariat du XIVème arrondissement de Paris ou encore à l’Elysée, Abdel se retrouve avec différents sons de cloches : « On m’a tout dit… M’établir en club privé, fermer les rideaux pour éviter les délations…Et lorsque j’ai finalement décidé de transformer le salon en club privé, on m’a affirmé qu’il fallait 15 ans d’ancienneté pour que cela soit possible ». Une seule solution s’offre à lui : continuer son activité mais sans proposer de chichas aux clients. « Cesser de proposer des narguilés à la clientèle ? Mais ils représentent 90 % de mon chiffre d’affaires ! Sans sa commercialisation, nous en sommes réduits à gagner une vingtaine d’euros par jour. Le mois dernier, j’ai même dû emprunter de l’argent à ma belle-mère pour payer le loyer », ajoute t-il. Christine El Ahmer, épouse d’Abdel, reçoit les clients et leur prépare boissons et narguilés. Elle a démissionné de son poste d’assistante dentaire pour soutenir son mari, qui ne peut plus travailler compte tenu de son état de santé. Malgré le statut quo, Abdel ne perd pas espoir, et ne veut pas envisager une issue autre qu’une négociation avec le chef de l’Etat. « Je suis confiant. Monsieur Sarkozy est un homme de cœur, et je pense qu’il va bouger pour nous ». A bon entendeur.


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