Magazine France

Une offre raisonnable

Publié le 26 juin 2008 par Malesherbes
Mercredi 25 juin, le Sénat a adopté la loi sur les «offres raisonnables d'emploi». Je ne parviens pas à comprendre comment des gens a priori raisonnables peuvent voter des lois sans s’interroger sur leurs possibilités d'application. Si j’étais sénateur, ce dont je me garde bien, j’eus posé au cours du débat, à condition naturellement qu’il y ait eu débat, quelques questions.
Qu’est-ce qu’une offre « compatible avec ses qualifications » ? Comment détermine-t-on les qualifications d’une personne ? S’agit-il d’examiner ses diplômes, de considérer ses emplois antérieurs, de procéder à un entretien d’embauche ? Dans cette dernière hypothèse, le personnel de ce futur service national de l’emploi aura-t-il reçu une formation et vécu une expérience le qualifiant pour ce type d’entretien ?
Que veut dire compatible ? Est-ce à dire que les qualifications du demandeur d’emploi seront bien utilisées ou bien qu’il devra accepter d’exercer un emploi qui le déqualifiera ? Je souligne au passage qu’il est fort difficile à un salarié, une fois au travail, de trouver un emploi qui correspondrait mieux à ses capacités, pour des raisons évidentes de disponibilité, et ce d’autant plus que son niveau de formation est peu élevé. Ou bien entend-t-on par compatible un emploi avec des exigences inférieures à ses qualifications, sans autre limitation à l’infériorité que l’étendue de la baisse de salaire ?
Qu’est-ce que le salaire perçu ? S’agit-il du salaire mensuel, ou bien du salaire annuel divisé par douze ? Et si le chômeur avait la chance de bénéficier d’une partie des milliards de revenu distribués par la grâce d’heures supplémentaires, comment l’inclut-on dans le salaire antérieur ? Et quid de l’intéressement et de la participation si généreusement octroyés par nos valeureuses entreprises ?
Qu’est-ce que le temps de trajet en transport en commun entre le domicile et le travail ? S’agit-il de la durée figurant sur les horaires de l’entreprise de transport ? Prend-t-on en compte les temps d’attente liés à la fréquence des dessertes ? Néglige-t-on de considérer les durées de porte à porte ? Comment évalue-t-on ces durées ? Lorsqu’il s’agit du trajet pratiqué auparavant par le salarié, un relevé mensuel des temps observés permet de déterminer une durée moyenne mais ces données sont absentes dans le cas d’un nouvel emploi potentiel. Et comment procède-t-on en l’absence de transports en commun ?
Toutes ces questions démontrent qu’à l’évidence on ne dispose pas des outils permettant de juger si une offre est raisonnable. Le chômeur se trouvera livré à l’arbitraire de ceux dont la raison d’être est de lui trouver un emploi correct et qui masqueront leur incapacité en le privant de ses droits. Rappelons que ce n’est pas l’Etat qui paie les chômeurs, ils sont indemnisés grâce aux cotisations versées par les salariés et les entreprises. Tout en privant de ressources des personnes sans travail que l’on s’évertue à stigmatiser, ces agissements ont également pour effet d’améliorer les chiffres de l’emploi, pour la plus grande gloire de nos gouvernants.

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Malesherbes 59 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte