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Street Triple

Publié le 26 juin 2017 par Alexcessif
L’anglaise s’agenouille et soulève sa croupe...
Street TripleDeux doigts sur l’organe sensible du levier, je retarde le freinage. De 90 à 50 Km/heure et 3 rapports rentrés à la volée, l’anglaise s’agenouille et soulève sa croupe. Fourche comprimée, le pneu avant est écrasé par la puissance du ralentissement et l’arrière perd le contact avec le bitume dans le transfert des masses. Les deux gommards fument et couinent à la limite d’adhérence et ma passagère me tombe sur les endosses. La moto glissouille amorçant un léger travers que le contre braquage du guidon oriente vers l’entrée du pif/paf. Un coup à droite, un coup à gauche, sur le coup de rein de l’accélération la roue avant hésite entre la terre et le ciel. L’arrière tortille cherchant, trouvant et mordant le goudron. 100 chevaux, avec la surface de contact équivalant à une carte de crédit, font glisser et vibrer la moto avant de retrouver l’axe de la ligne droite quand les deux roues reprennent contact avec la planète. Dans la culasse, une généreuse giclée de Super 95 arrose la chambre de combustion tandis que la cyprine 5W40 de chez Motul lubrifie les cylindres où les pistons s’en donnent à cœur joie.  De 4000 à 12000 tours/minute la vitesse passe de 50 à vilain, pas bien, voyou, attention les enfants regardent et tu dégrades l’image des motards. Le temps de se dégager du flot des bagnoles et je coupe avec l’espace libre devant, pénétrant le calme de la forêt où seuls quelques écureuils ont sursautés. Quelques micros secondes en zone interdite multipliées par le nombre de roundabout - rond point, mais comme elle est anglaise-et retour à la translation ordinaire. Depuis la loi du communiste Gayssot, ministre des transports, la vitesse est devenue un crime. Par contre, transport dans son acception poétique ne le sera jamais. Un petit 180 sans se faire chopper, il n’y a pas de quoi passer par la case prison et subir, ou profiter, de la sodomie de bienvenu qui accueille le primo délinquant L’anglaise est une petite Street tripeulTripletrois cylindres de 675 CC, un missile sol/sol en vente libre. La fille naturelle des motos vintages qui battirent  des records sur le lac salé et bâtirent la réputation de la marque avec son modèle légendaire : la Bonneville! J’aperçois au loin un groupe de bagnole qui va me pourrir la prochaine courbe à gauche. A 90 la moto à peine inclinée derrière les caisses, c’est zéro sensation! Je compte jusqu’à dix et je vise un trou, là-bas, au fond, où je vais pouvoir glisser ma petite moto et prendre la courbe en couchant la meule sur l’angle comme un goret. L’anglaise ne demande que ça. De l’accélération violente, du rythme et elle aime se coucher à droite ou à gauche dans les grandes courbes et les coins de rue. J’essore la poignée droite et l’affichage digital fait un superbe doigt d’honneur à la maréchaussée. « Dans un éclat de soleil, j’ai vu passer le diable dans son landau aux lampes de cuivre ».  160, 170, 180 ce n’est plus de la conduite, pas vraiment du pilotage mais de la balistique. La moto bien serré entre les jambes et nos corps unis, fusionnant, j’imprime avec le bassin une légère flexion à droite afin de revenir dans la trajectoire puis un déhanchement plus sec, plus nerveux, à gauche dans la trajectoire idéale. Flexion, extension ça passe, Les suspensions comprimées par la vitesse et la force centrifuge, la petite Triumph passe comme une grande, sur un rail. Mais la petite nerveuse en redemande. Espace vide devant elle, elle se redresse et s’envole, orgasmique. Je n’ai rien pu faire. 180, 190, 200, je n’avais pas prévu son extase ici et maintenant et, sans rétrograder la cinq, je suis un peu juste  sur le sixième rapport. Petite cylindrée, j’avais du mal entre doute et certitude et j’ignorais que le septième était à notre portée. Heureusement, je n’avais pas encore tiré la balle en attente dans le canon de mon fusil à un coup et j’étais encore dur. 205, 210, 211, 212, reins en feu, d’une ressource sismique, salvatrice, inespéré et ultime, accroché à ma partenaire, ça passe, on arrive, on vient : 215, 220, 225. Le vent s’engouffre entre nos deux corps et je sens ma passagère s’éloigner sous sa pression.
Je coupe! Le calme apaisant, la tendresse d’après de la forêt du médoc-je-t’aime retrouve ses droits le devoir accomplit. Ne pas perdre! Ne pas LA perdre! Jamais!
Béquillée face au port du Betey, la bête refroidit dans le cliquetis métallique des organes retrouvant leurs dimensions originelles. 

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