Mon voyage d’une quinzaine de jours en Roumanie riche en péripéties ne m’a pas conquise. Ce que j’en ai vu est loin des gentilles cartes postales que mettent en avant les voyagistes spécialisés dans cette destination et qui font faire à leurs clients le tour de la Roumanie en car en une semaine et demie.
Le gigantisme du Parlement à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
De l’Europe centrale, je connaissais Budapest et Szeged, en Hongrie, Prague en République Tchèque, Bratislava en Slovaquie, Ljubljana en Slovénie, Subotica et Palics en Serbie, Cracovie en Pologne et Oradea, en Roumanie, dans un secteur qui faisait autrefois partie de la Hongrie. Des découvertes toujours heureuses qui m’ont fait revenir dans certaines de ces villes. C’est donc avec un bel enthousiasme que j’ai préparé mon voyage en Roumanie. Quinze jours pour le circuit suivant : Bordeaux/Bucarest en avion, séjour à Bucarest du 7 au 13 juin, départ en avion de Bucarest vers Cluj Napoca le 13 juin, location de voiture à l’aéroport de Cluj Napoca, destination la Bucovine et ses monastères peints du 13 au 17 juin. Retour avec arrêt à Targu Mures du 17 au 18 juin, halte du 18 au 20 juin à Cluj Napoca après avoir rendu la voiture et retour à Bucarest pour une nuit du 20 au 21 juin avant de revenir à Bordeaux. Comme j’aime m’imprégner de l’atmosphère des villes, j’avais prévu de rester à Bucarest plus que la plupart des touristes.
Bucarest, une capitale dévastée
Capitale d’un pays européen, Bucarest offre un spectacle de désolation. Ceausescu, le « génie des Carpates » a détruit des quartiers entiers pour construire la Maison du peuple qui porte si mal son nom et de grands immeubles en béton. Certains pourraient être intéressants d’un point de vue architectural mais très souvent mal entretenus, ils ne font qu’agresser le regard. Les beaux immeubles du XIXème siècle qui sont restés en place sont très souvent abandonnés, dégradés. Le mieux côtoie le pire. Les rouleaux de fils électriques pendent sur les façades en écheveaux désordonnés, les compteurs électriques sont agrafés dans le plus grand désordre et aggravent le massacre. Des balcons sont sur le point de s’écrouler. J’ai vu un petit panneau, indiquant de ne pas se garer dessous, en raison du risque de chute de pierre. Des immeubles portant la marque des Monuments historiques ne sont pas mieux traités. (Voir les photos de l’article, Bucarest, le meilleur et le pire). En se promenant, il faut être vigilant, regarder devant pour ne pas se tordre les chevilles sur les trottoirs. Par temps de pluie, de grandes flaques se forment sur la chaussée. Il vaut mieux raser les maisons pour éviter une douche à l’eau boueuse. Quand je visite un pays, je me refuse à polémiquer sur sa politique mais j’essaie de comprendre son histoire pour mieux l’appréhender. Les pays d’Europe centrale que j’ai visités jusque là sont sortis du communisme au début des années 90 et, au fil du temps, ont opté pour des gouvernements de couleurs politiques variées. La Roumanie n’a pas fait exception avec des élections libres le 20 mai 1990. Mais que s’est-il passé pour que ce pays soit actuellement dans cet état alors que ses voisins ont réussi à reprendre un nouveau souffle, du moins en apparence. Des manifestations récentes montrent que la population n’est pas satisfaite de la situation et que l’argent dont dispose la Roumanie n’est pas utilisé au profit du pays et de ses habitants. La corruption semble aller bon train.
Mes visites à Bucarest
La Maison du peuple ou palais du Parlement construit entre 1984 et 1989 par Ceaucescu qui n’en a pas profité fait partie des incontournables. Le bâtiment est immense avec ses 45 000 m² mais la visite est relativement courte car on n’en voit qu’une partie minime. Il semble qu’il y ait différents types de visite mais le dispositif est assez incompréhensible. J’avais demandé des renseignements au service de presse qui n’a pas daigné me répondre et qui bien évidemment ne m’a pas précisé qu’il était fermé en raison de manifestations officielles pendant une partie de mon séjour. Renseignement qui n’avait pas été diffusé auprès des hôtels pour touristes.
Quelques vues de l’intérieur du Parlement à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Nous avons donc fait une première tentative et nous avons été refoulés. Le marbre et les dorures abondent. Le guide nous expliqué que, pendant la construction, que, en Roumanie, tout le marbre était réquisitionné pour la Maison du peuple. Petite légende, Micheal Jackson se serait penché au grand balcon pour lancer à la foule en anglais « Bonjour Budapest », d’autres célébrités auraient fait la même confusion. Dans ce registre, je n’ai pas voulu manquer l’ancienne demeure des Ceausescu (50 boulevard Primaverii) qui se visite depuis peu de temps.
Entrée de la villa des Ceausescu à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Cette vaste villa, comble du mauvais goût d’arrivistes amoureux de dorures en tous genres, offrait un confort certain à ses occupants avec ses spacieuses salles de bains, sa salle de cinéma et son immense piscine intérieure.
Salle de cinéma, dressing et mosaïques de la piscine et du jardin d’hiver de la villa des Ceausescu à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Les dressing rooms montrent que le couple Ceausescu ne se privait de rien en matière de vêtements et autres accessoires. Le lit du couple est encore fait. Pyjama et chemise de nuit leur ayant appartenu sont disposés sur les draps. Modernes et colorées les mosaïques dont celles de la piscine et du jardin d’hiver tranchent sur cet intérieur kitch et chargé. Elles seraient l’œuvre d’Olga Porumbaru et de Florin Parvulescu au talent incontestable.
Mon parcours à Bucarest
La Vieille ville est dotée de belles églises orthodoxes telles que l’église princière de l’ « Annonciation » « Saint-Antoine », la plus ancienne de Bucarest construite en 1559 et restaurée en 1847.
L’église de l’Annonciation à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
L’l’église Stavropoleos avec ses colonnes et ses entourages de fenêtre en dentelle de pierre donne sur un monastère restauré en style néo-roumain par Ion Mincu ou l’église de la « Nativité de la Vierge Marie » des maîtres orfèvres.
Le travail sur les colonnes à l’entrée du monastère Stavropoleos est remarquable.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Cloître du monastère Stavropoleos à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Le célèbre passage Macca-Villacrosse est charmant.
Le passage Macca Villacrosse, lieu de vie et de promenade à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Le palais des voïvodes dont il ne reste que quelques murs avait été renforcé au XV ème siècle par Vlad Tepes, qui inspira le personnage de Dracula.
Les restes du palais des Voïvodes à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
La rue Victoriei est un axe très vivant le long duquel s’égrènent de belles constructions dans un état variable. Au-delà de la place Victoriei, les grandes avenues qui partent vers l’Arc de Triomphe et leurs rues adjacentes, comme la rue Paris sont aérées et résidentielles.
L’Arc de Triomphe de Bucarest, il ne vous rappelle rien ?
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Au cours de mes pérégrinations, j’ai aimé quelques belles constructions comme la maison Assan (9 Piata Lahovari), le Cercle militaire (1 rue Constantin Mille) dont la façade est en cours de rénovation, l’école d’Architecture construite par Ion Mincu (35 rue Biserica Enei), l’école de filles de Ion Mincu (3-5 rue Icoanei) dont je n’ai pu voir que l’extérieur ou l’étonnant immeuble.
Façade de la maison Assan à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
A l’arrière de la maison Assan un somptueux escalier à double révolution.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Le cercle militaire de Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
L’école d’architecture de Bucarest construite par Ion Mincu.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
L’école des filles dessinée par Ion Mincu à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Le siège de l’Union des architectes de Roumanie, une construction moderne, se dresse sur les ruines de l’ancien bâtiment de la Securitate.
Au fond, l’immeuble de l’Union des architectes.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Le groupe de 16 sculptures en bronze de Ioan Bolborea intitulé « Caragialiana », inauguré en 2000 est saisissant, plein de vie et de fantaisie avec ses personnages de 4 mètres de haut qui renvoient aux héros de l’écrivain et dramaturge roumain, Ion Luca Caragiale, qui a donné son nom au Théâtre national tout proche.
L’extraordinaire ensemble de Ioan Bolborea à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
C’est aussi sur cette place du 21 décembre 1989 que se trouve la borne 0 de Bucarest.
Borne 0 de Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Les musées de Bucarest
Doté d’une belle collection de bijoux anciens et plus modernes, le musée National d’histoire de la Roumanie, dans l’ancien hôtel des postes, mérite une visite.
Entrée du musée National d’Histoire de Roumanie avec la louve de Rome.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Je ne sais pas si le musée national d’art de Roumanie est intéressant. L’immeuble, l’ancien palais royal construit par Paul Gottereau au XIXème siècle est très beau mais le personnel a été plus désagréable qu’il n’est permis et j’ai préféré en rester là.
L’ancien palais royal à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
J’ai, en revanche, apprécié le musée Zambaccian. Cette demeure très agréable est celle du mécène Krikor Zambaccian qui l’a léguée à l’Etat avec sa collection de peintures roumaines et internationales.
L’extérieur du musée Zambaccian à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Très plaisant pour se promener et s’instruire, le musée Satului.
Ancienne église, reconstruite à Satului à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Créé en 1936 près du lac Haraustru, le musée du village roumain accueille maisons, églises, granges ou moulins anciens, démontés et remontés sur place pour présenter les constructions des différentes régions de Roumanie.
Ensemble de bâtiments ruraux à voir à Satului à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Je rêvais de visiter le musée George Enescu, célèbre musicien roumain, qui vécut dans ce palais construit entre 1901 et 1902 par Ioan D.
Façade du musée Cantacuzino à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Berindei pour Gehorge Grigore Cantacuzino. J’avais vu des photos de ce merveilleux bâtiment Belle Epoque avec ses somptueuses marquises et il faisait partie de mes priorités. Certes, le bâtiment qui a obtenu le label Patrimoine européen en 2007 est magnifique et les trois pièces qu’on peut visiter sont merveilleuses, notamment la salle de musique avec la fresque aérienne de son plafond.
Plafond très travaillé du musée Cantacuzino à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Mais comment peut-on laisser un tel joyau se dégrader à ce point. L’un des gigantesques portails en fer forgé tient grâce à des filins pour qu’il ne s’écrase pas sur le trottoir, les verres des marquises sont cassés et crasseux, des fils électriques sont accrochés autour du bâtiment et pendent lamentablement, une parabole a été plantée sur le toit, des climatiseurs disgracieux s’agrippent aux murs.
Détails merveilleux mais aussi grand abondon et maltraitance du musée Cantacuzino à Bucarest. Quelle tristesse !
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
La pierre a été largement trouée pour laisser passer des gaines, la porte du rez-de-jardin à l’arrière est bouchée par des cartons ou du contre-plaqué et la plus grande partie du bâtiment est louée en bureaux.
Mes adresses à Bucarest
La librairie Carturesti Carusel, dans le vieux Bucarest est un lieu magique. Cette librairie concept de 1 000 m² occupe un bâtiment du XIX ème siècle autrefois propriété des banquiers Chrissoveloni. Il semble qu’il ait connu une période un peu difficile sous le communisme. Il a été racheté par Jean Chrissoveloni en 1990 qui l’a entièrement restauré. Légèreté et grâce des volumes, piliers anciens mis en valeur, verrière lumineuse en guise de plafond, parquets blonds et peinture blanche, on passerait des heures dans cette librairie concept qui organise aussi des expositions et où a été aménagé un espace restauration au dernier étage.
Les très beaux volumes de Carturesti à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Sabion (68-70 rue Victoriei) est une galerie d’art qui présente notamment des bijoux de créateurs. Dans ce cas particulier, j’ai trouvé que l’écrin était encore plus beau que les objets qu’il renferme avec ses mosaïques d’or, son escalier en fer forgé sculptural dont la rampe se termine par une phénoménale flamme en verre qui fusionne avec le plafond.
La boutique Sabion à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Mes cafés à Bucarest
Rien de bien original, j’ai voulu tester le fameux Hanul Lui Manuc avec sa grande cour ceinturée par des galeries en bois et le Caru Cu Bere, café autrefois rendez-vous des intellectuels au cadre néogothique. Rien de spécial sur les produits servis mais le personnel est franchement désagréable dans ces deux hauts-lieux touristiques.
La cour intérieure de Hanul Lui Manuc à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Un exemple tout simple, nous avons voulu de la chantilly avec notre chocolat chaud à Caru Cu Bere. D’emblée c’est non. Il fallait juste payer un supplément, ce qui ne posait aucun problème. A Hanul Lui Manuc, les tables très nombreuses du jardin intérieur étaient pour la plupart vides.
L’ambiance feutrée de Caru Cu Bere à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Nous demandons si nous pouvons nous installer. Automatiquement, c’est non alors que la table n’est pas réservée. En insistant, nous avons fini par nous asseoir où nous voulions. Et pendant que nous avons déjeuné, les tables environnantes ne sont pas remplies. Visiblement, dire « non » avec agressivité est un principe de la maison.
Mon hôtel à Bucarest
J’avais été attirée par le Grand Boutique Hôtel, un très bel immeuble construit en 1893 et qui avait appartenu à une famille de banquiers : colonnes, vitres biseautées, fer forgé, beaux volumes, rideaux drapés, tout est là pour rendre l’ensemble fastueux.
Belle façade magnifiquement rénovée du Grand Boutique Hôtel de Budapest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Magnifiquement rénové et non dénaturé, le Grand Boutique Hôtel donne sur une rue calme et est protégé en outre par son jardin de façade. Il est tout près de la vieille ville. Bien significatif de l’état de Bucarest, ce superbe petit hôtel fait face à une ruine qui empeste l’urine de chats.
Hall d’entrée du Grand Boutique Hôtel à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
J’ai testé deux chambres au rez-de-chaussée, le numéro 4 en façade avec son grand coffre qui est resté en place et la numéro 10 toujours au rez-de-chaussée. Moins fastueuse, la seconde est plus rationnelle car le numéro 4 n’offre pas de rangements suffisants : la penderie est très courte pour les pantalons, les robes ou les vestes et il n’y a pas de meuble complémentaire pour ranger sous-vêtements et tee-shirts. En outre, au bout de quelques jours on aspire au silence alors que le concert de jazz bat son plein pour ceux qui dînent dehors.
Glaces biseautées pour isoler le bar du Grand Boutique Hôtel à Bucarest.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Petit-déjeuner varié et plaisant mais le personnel charmant a du mal à faire face pour amener le café ou le lait. L’hôtel n’a pas d’ascenseur, ce qui est bien compréhensible car il aurait massacré le cadre, mais le personnel aide pour les valises. Petite anecdote déplaisante, nous avons dîné le dernier soir à l’hôtel et, pour simplifier les comptes, nous avons payé en cash. Le lendemain matin, on nous a demandé de régler à nouveau. Il a fallu parlementer, menacer, demander la direction pour régler le problème. Accident ou habitude, à voir.
Aller à Bucarest
Une liaison directe a été créée en juin entre Bordeaux et Bucarest par Blue Air, une compagnie roumaine à bas coût mais qui offre un confort certain.