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Hommage à Pierre Henry, père de la musique concrète

Publié le 06 juillet 2017 par Sylvainrakotoarison

" Dans mon travail, les jeux devant le micro, les rythmes et les cris, tout ce langage expressif parcourt comme un fil la gamme de mes états corporels et sentimentaux au cours de la vie. ".
Hommage à Pierre Henry, père de la musique concrète
Le compositeur de "musique concrète" (électroacoustique) Pierre Henry est mort à 89 ans ce jeudi 6 juillet 2017 dans un hôpital à Paris : " Il est décédé cette nuit. " a annoncé son assistante Isabelle Warnier, proche de la famille, à l'AFP en fin de matinée. L'émotion est là pour une personnalité hors normes qui défiait la loi du temps.
À cause d'une santé défaillante, il avait renoncé à venir à la création de l'une de ses dernières œuvres à Strasbourg le 23 septembre 2016, au Festival Musica. "Chroniques terriennes" fut une œuvre " indicible et secrète " qui était un cadeau au festival. Ce fut Thierry Balasse, ingénieur du son et précieux collaborateur du compositeur, qui le remplaça et qui l'a interprété en même temps que "Dracula" (2002) sur une inspiration de la "Tétralogie" de Richard Wagner. Comme Simone Veil, il n'était pas loin de ses 90 ans.
Je ne sais pas si la nouvelle de sa disparition fera les titres dans les journaux déjà en overdose d'informations avant la pause estivale. Pierre Henry fut un compositeur majeur de la seconde moitié du XX e siècle. Il fut l'élève de Nadia Boulanger et d'Olivier Messiaen, mais son originalité résidait dans sa façon de révolutionner complètement l'idée de musique. Tout son était, chez lui, matière première à œuvre, et cela a pu donner de beaux morceaux parfois en collaboration avec d'autres arts comme la danse ou le cinéma.
J'ai eu la chance d'avoir assisté à trois de ses nombreux concerts parisiens dans les dix dernières années, et il y a deux choses qui m'ont frappé immédiatement. Pierre Henry, malgré l'âge, la maladie, la fatigue, a toujours aimé travailler jusqu'à ses dernières limites. Et autour de lui, autour de moi donc, il y avait un public souvent d'habitués, de connaisseurs, presque de "fans" dans un sens qu'on pourrait l'imaginer "gourou" (il avait en plus la tête de l'emploi, avec son impressionnante figure "patriarchique" de Dieu-le-père), mais dans une secte qui ne pouvait pas l'être puisqu'elle transmettait liberté, créativité, originalité, nouveauté, ouverture sur le monde...
De plus, son petit air "cabotin" était assez plaisant, on voyait qu'il aimait s'ouvrir à son public, se faire aimer et il n'hésitait pas, encore récemment (je n'ai hélas pas eu cette chance d'en être), d'inviter son public à venir l'écouter carrément chez lui, dans sa demeure devenue une sorte de musée vivant et salle de concert privée.
Hommage à Pierre Henry, père de la musique concrète
J'ai déjà eu l'occasion d'évoquer sa musique concrète, ici et .
Comme souvent dans "l'art contemporain", on peut aimer ou ne pas aimer. C'est plus facile de ne pas aimer ou même de vouloir se faire un point d'honneur de rejeter parce que c'est original, singulier, parfois choquant, que de rejeter de "l'art classique" ou même "académique" qui pourrait pourtant paraître parfois "ennuyeux". Face à l'art, la posture n'a d'intérêt qu'au critique professionnel, mais certainement pas à l'amateur bienveillant.
Mais tout art, toute culture a son véritable critère dans l'émotion que peut ressentir le public. Et il faut bien dire qu'en ce qui me concerne, certaines des œuvres de Pierre Henry ont fait sens en moi, au plus profond de mon être, dans le puits intérieur de la petite enfance, sans qu'il me soit facile d'y trouver une explication vraiment satisfaisante, même si d'autres œuvres sont, de mes propres oreilles, très difficiles à écouter, pour ne pas dire inaudibles !
Plutôt que du blabla, plutôt que de la lecture, comme pour chaque artiste musical, il vaut mieux l'écoute de certains morceaux choisis. J'en propose quatre, assez arbitrairement j'en conviens, certains dans des conditions assez originales et peu habituelles.
Comme cette musique est très technologique et artistique, les compositions sont souvent le résultat d'une collaboration fructueuse avec d'autres personnes, ingénieur, chorégraphe, etc. comme Pierre Schaeffer, Maurice Béjart, Michel Colombier, etc.
1. "Messe pour le temps présent" (1967).
2. "Symphonie pour un homme seul" (1949).
3. "Divinités paisibles" dans "Le voyage" (1962).
4. "Dixième symphonie, hommage à Beethoven" (1979).
5. "Le fil de la vie" (2012) : présentation de l'œuvre.
Ce dernier morceau, "Le fil de la vie", fut l'une des dernières grandes œuvres de Pierre Henry. Elle fut créée le 29 septembre 2012 à la Cité de la Musique, à Paris. Elle fut " la décomposition de certaines de mes œuvres ", un " voyage d'introspection ". Une sorte d'autobiographie, de testament musical. Son mot d'ordre était : " Faire une musique qui colle à la durée humaine et vécue avec humour. ".
La France et le monde de la musique ont perdu un très grand compositeur, sorte de dernier dinosaure qui a survécu à tant de vagues au fil du siècle dernier. Il sera probablement difficile d'imaginer un "héritier" tant sa musique était particulière, à la fois technologique et personnelle. Hommage et honneur au musicien, et condoléances à ses proches.
Aussi sur le blog.
Sylvain Rakotoarison (06 juillet 2017)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
Hommage à Pierre Henry (6 juillet 2017).
Le dernier concert de Pierre Henry.
La musique concrète de Pierre Henry toujours à l'honneur de l'été parisien.
Vidéo de "Symphonie pour un homme seul" (Pierre Schaeffer et Pierre Henry).
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Hommage à Pierre Henry, père de la musique concrète
http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20170706-pierre-henry.html


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