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L'eau, les étincelles, d'Anne Bregani

Publié le 17 juillet 2017 par Francisrichard @francisrichard
L'eau, les étincelles, d'Anne Bregani

Les poèmes du recueil d'Anne Bregani, L'eau, les étincelles, sont accompagnés de gravures d'Armand C. Desarzens. La poétesse, dans une note liminaire, lumineuse, parle, au sujet de ces gravures, de fruit d'un cheminement, dont l'aventure se poursuit

Après avoir lu les poèmes, regardé les gravures, le lecteur ressent intensément ce compagnonnage s'il y prête attention. Car, ici, les poèmes gravent le monde tandis que les gravures le poétisent, si bien qu'aucun des deux n'illustre l'autre: ils se rencontrent.

Anne Bregani met en exergue à son recueil deux poèmes, l'un de Wislawa Szymborska, l'autre de Yannis Ritsos, dont déjà les débuts donnent un aperçu de ses intentions.

La Polonaise demande

Pardon aux grandes questions pour les petites réponses.

Le Grec espère que

Peut-être encore nous défendra

le chant d'un oiseau...

La tâche est en effet immense et la nature (plus forte qu'on ne pense) peut aider à l'accomplir.

Anne Bregani passe en revue poétique les quatre points cardinaux et c'est l'occasion pour elle d'évoquer magnolias et martinets enchanteurs. Ainsi, dans Sud:

Très haut ce matin

le martinet mélange

la  lumière au bleu

De sa royale hauteur

le grand magnolia

distribue l'abondance des fleurs

Et, comme elle vit, au bord d'un lac, elle ne peut que dire ce qu'elle lui doit, dans Nord:

Lac scintillant

ciel aquatique

où passent mes pensées

Dans Au puits du coeur, Anne Bregani s'interroge:

Mais les secrets d'un visage

quel oeil au bout de tes doigts

les percevra jamais

quelle main dans ton regard

saisira

ses lumières et

son ombre changeante

Elle fait appel aux éléments:

La pluie

me donnera

toutes les larmes dont j'ai besoin

et mon souffle

fera palpiter

le coeur océanique

de l'espace

je te dis

que je suis le vent

rien ne m'arrêtera à l'horizon

Elle parle pour les anonymes qui cherchent à émerger de la misère:

Par ma gorge

ils se fraient une piste

jusqu'à l'air libre

par ma voix

ils sont nommés

rendus à leur intime royauté

eux qui marchent

pieds nus sur cette terre

Aux grandes questions, sa réponse est finalement grande, comme son coeur, sa modestie dût-elle en souffrir:

Tout espoir est-il vain?

à l'aplomb de la verticale

subsiste

cette étincelle

ce feu

prêt à nous bouter

vers notre grandeur

Francis Richard

L'eau, les étincelles, Anne Bregani, 108 pages, Samizdat


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