La famille Kuma, du secteur de Jôyô-machi ne déroge pas à ce schéma, produisant gyokuro et fukamushi sencha, mais le fils produit aussi des thés noirs. En voici deux, du même producteur, mais pourtant sur bien des points diamétralement opposés. En effet, nous avons un Benifûki du printemps de cette année, encore très jeune donc, et un Benihikari de l'été 2015, ayant donc pris un peu de bouteille.
Si ces deux cultivars (cépages) sont l'un comme l'autre destinés à la production de thé noir, Benifûki est plus récent, enregistré au début des années 90, issu du croisement entre Benihomare (le tout premier cultivar Japonais à thé noir, sélectionné à partir de graines ramenées de Assam à la fin du 19ème) et Cd86 (sélection au centre de recherche de Makurazaki à partir de graines provenant de Darjeeling). C'est aujourd'hui de loin le plus répandu des cépages à thés noirs japonais.
En revanche, enregistré dans les années 60, Benihikari est plus ancien. C'est un croisement entre Benikaori et Cn1 (sélection à partir d'une graine venant de Chine). Avec la libéralisation du commerce international japonais au début des années 70, il n'était plus nécessaire pour les entreprises japonais d'acheter du thé noir produit au Japon pour importer du thé noir étranger, ainsi la baisse drastique de la production nationale empêcha Benihikairi de se développer à l'époque. C'est depuis une dizaine d'année, alors que l'on recommence à produire du thé noir au Japon, plutôt maintenant pour la consommation domestique, avec une recherche de qualité, que l'on commence à revoir Benihikari. Ce cultivar apporte un contrepoids intéressant à Benifûki, par ses arômes très différents.
L'amélioration progressive de la qualité des thés noirs japonais en fait un genre de plus en plus digne d'intérêt sur lequel je voudrais me pencher un peu plus, en espérant que nombre d'entre vous se laisserons séduire par ces thés noirs "exotiques" en quelque sorte. Certains cultivars à thé vert, Kôshun en particulier, donnent des thés noirs très intéressants, mais dans l'ensemble, les "beni" quelque-chose sont une base selon moi inévitable.
On a là un thé noir somme toute assez classique, équilibré, subtilement aromatique, qui, infusé fort pourra être très agréable avec un nuage de lait (c'est quelque chose que je n'ai pas franchement l'habitude de recommander, mais ce Benifûki de Yame s'y prête très bien).
Le Benihikari offre des saveurs très différentes. Le côté menthol, un peu camphré, évoquant aussi la cannelle de ce cultivar est ici présent, mais plutôt en arrière-plan.