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Patrick Modiano, Effort de mémoire

Par Obadia


« Nous sommes restés seuls dans le salon, quelques minutes, et je fais un effort de mémoire pour rassembler le plus de détails possible. Les portes-fenêtres qui donnaient sur le boulevard étaient entrouvertes à cause de la chaleur. C’était au 19 du boulevard Raspail. En 1965. Un piano à queue tout au fond de la pièce. Le canapé et les deux fauteuils étaient du même cuir noir. La table basse, en métal argenté. Un nom comme Devez ou Duvelz. La cicatrice sur la joue. Le chemisier dégrafé. Une lumière très vive de projecteur, ou plutôt de torche électrique. Elle n’éclaire qu’une parcelle d’un décor, un instant isolé, laissant le reste dans l’ombre, car nous ne saurions jamais la suite des événements et qui étaient, au juste, ces deux personnes.

Nous nous sommes glissés hors du salon et, sans même refermer la porte, nous avons descendu l’escalier. Tout à l’heure, nous avions pris l’ascenseur, mais il n’était pas rouge, comme celui dont avait parlé Gisèle T. »
Patrick Modiano, Fleurs de ruines, p.23-24, ed du Seuil,1991


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