Magazine Finances

Le retour à la télévision d'Etat...

Publié le 28 juin 2008 par Raphael57

Le retour à la télévision d'Etat...
Tout d'abord, petit rappel des faits : suite à la décision, annoncée le 8 janvier par Nicolas Sarkozy, de supprimer la publicité sur les chaînes publiques, une commission "pour une nouvelle télévision publique" a été créée. Présidée par Jean-François Copé et composée de vingt-six membres (parlementaires et professionnels de l'audiovisuel, en précisant que les parlementaires de gauche ont décidé de quitter la commission le 4 juin), cette commission avait pour bout de trouver un financement adéquat pour les chaînes publiques qui ont été subitement privées de la manne publicitaire...
Après quatre mois de travaux (ça travaille si dur que ça ?), la commission a rendu son rapport de 50 pages, qui s'articule autour de quatre chapitres correspondant aux ateliers mis en place au sein de la commission. Les voici, avec à cahque fois, les principales idées qui en ressortent :

*modèle de développement

France Télévisions doit s'adapter au nouvel environnement numérique (ADSL, TMP, câble, satellite…) qui transforme le paysage audiovisuel français, et devenir, par conséquent, un "média global". Rien de bien nouveau dans ce chapitre, puisque France Télévision n'a de toute évidence pas vraiment le choix au vu de la concurrence des opérateurs Internet et télécoms.

*modèle culturel et de création

Concernant l'information, les rédactions seraient maintenues au sein de chaque unité mais la commission demande une mutualisation des moyens techniques. Concernant France 3, la commission préconise que la chaîne soit réorganisée en sept régions au lieu de treize, qui renforceront le nombre de décrochages locaux. Une mesure qui permettrait une réduction des coûts. Evidemment, cela a créé la panique dans les rédaction de France 3  qui craignent des licenciements...

*modèle de gouvernance

La commission propose que le PDG soit désigné par le conseil d'administration et non plus par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). Ce dernier proposerait seulement une liste de trois noms au nouveau Conseil d'administration composé de douze membres. Les parlementaires n'y siégeraient plus. Le PDG serait nommé pour cinq ans, et la durée du contrat d'objectifs et de moyens (COM) négocié avec l'Etat serait calée sur celle du mandat du PDG. Déjà là on se dit que quelque chose à l'air curieux... mais notre omniprésident a immédiatement clarifié la situation : "Je vais prendre mes responsabilités", a annoncé M. Sarkozy en recevant le rapport de Jean-François Copé sur la réforme de la télévision publique. "Je ne vois pas pourquoi l'actionnaire principal de France Télévisions, en l'occurrence l'Etat, ne nommerait pas son président"  (sic!). Là, c'est carrément la panique dans le Landerneau audiovisuel ! L'exécutif cherche à revenir à une mise sous tutelle très forte de la télévision, qui n'est pas sans rappeler l'ORTF de 1964 et le Service de liaison interministériel pour l’information (SLII). Pour mémoire, le SLII avait été créé pour rassembler les informations émanant des services des différents ministères pour en faire bénéficier en exclusivité l'Actualité télévisée et l'Information radiodiffusée. Or, entièrement contrôlé par le ministère de l'Information via ses hauts fonctionnaires placés à des postes clés, on comprend que le SLII se soit rapidement transformé en chambre d'enregistrement des volontés ministérielles.

*modèle économique et financier

Selon la commission, la compensation pour la suppression de la publicité durant la période transitoire (2009-2012) s'élèverait à 450 millions d'euros par an ! Où trouver l'argent ? La commission jesaistout préconise l'indexation de la redevance sur l'inflation, avec une assiette élargie aux nouveaux supports de réception (ordinateurs, téléphones portables capables de recevoir la télévision), une taxe de 0,9 % sur le chiffre d'affaires des opérateurs Internet et de téléphonie mobile, ainsi qu'une taxe sur les recettes publicitaires supplémentaires des télévisions privées, sans qu'aucun pourcentage ne soit recommandé. Par ailleurs, les redevances destinées à RFI (60 millions d'euros) et à l'INA (80 millions) ainsi que celle sur les "fréquences radioélectriques" (100 millions) seraient reversées à France Télévisions.
Là c'est aussi un programme fou qu'on nous propose : prélever une taxe sur des opérateurs Internet et télécoms privés pour financer le secteur public ! En dehors du caractère contestable de la mesure (cela s'apparente à de l'extorsion de fonds...), cela risque surtout de se traduire par une hausse de l'abonnement téléphonique ou de l'abonnement Internet. A ce sujet, Jean-Louis Missika, sociologue et adjoint au maire de Paris chargé de l'innovation, rappelle que "0,9 % sur leur chiffre d'affaires, c'est facilement 4 à 5 % sur leur marge brute, et 10 à 20 % sur leurs bénéfices. Cette taxe doit être payée même si la société est en perte, c'est pourquoi cette taxe est considérée comme un impôt".
Après tout ce que je viens de d'écrire, je crois que le lecteur aura compris combien cette réforme de l'audiovisuel est mal ficelée et précipitée. Mais ma plus grande crainte (et ma plus grande tristesse) est de voir les médias mis au service du pouvoir politique. La France a déjà connu de pareils épisodes peu glorieux...
Je ne résiste pas à l'envie de citer ces quelques mots de Voltaire qui concerne la presse, mais qui s'applique parfaitement à tous les médias : "Soutenons la liberté de la presse, c’est la base de toutes les autres libertés, c’est par là qu’on s’éclaire mutuellement".

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Raphael57 947 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine