"Vu l'article 1382, devenu Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, suivant acte reçu par M. X... avec la participation de M. Y... (les notaires), la SCI Réussite (la SCI) a acquis de Mme Z... un ensemble immobilier au sein d'une Attendu que, pour rejeter la demande de dommages et intérêts de la SCI, l'arrêt retient que les notaires n'ont commis aucune faute en ce qui concerne la désignation du lot n° 3 dans l' 1240 du code civil ;
Attendu que les notaires sont tenus d'éclairer les parties et d'appeler leur attention de manière complète et circonstanciée sur la portée et les effets ainsi que sur les risques des actes auxquels ils sont requis de donner la forme authentique et de veiller à la pleine efficacité des actes qu'ils instrumentent ;
copropriété sise à Rouen, correspondant aux lots n°s 3 et 9 pour une surface respective de 326,71 m² et de 76,80 m² selon certificat dressé par le cabinet Immodiag ; qu'il s'est ultérieurement avéré que la superficie du lot n° 3 était inférieure de 84,42 m² à celle mentionnée à l'acte de vente, le surplus faisant partie du lot n° 21, sis en façade sur rue, venant en enhachement dans le lot n° 3 et non séparé de ce dernier ; que la SCI a acquis du tiers propriétaire le lot n° 21 et obtenu une réduction du prix de vente du lot n° 3 ; qu'elle a assigné les notaires en responsabilité civile professionnelle et indemnisation ;
acte authentique par eux reçu, s'agissant tant de sa consistance matérielle, au regard de l'enhachement du lot n° 21, que de l'indication de sa superficie ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations qu'existait un doute sur la consistance du bien vendu, qui n'était pas matériellement séparé du lot n° 21, de nature à les conduire à effectuer des recherches complémentaires afin que l'acte instrumenté produise toutes les conséquences attendues par les parties, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 avril 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen, autrement composée ;
Condamne MM. X... et Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne in solidum à payer à la SCI Réussite la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Delvolvé et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société Réussite
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté la SCI REUSSITE de ses demandes tendant à voir constater l'existence d'une faute de Me Y... et Me X... et, en conséquence, les voir condamner à lui verser une somme de 35.112,32 euros à titre de dommages et intérêts,
Aux motifs propres que la SCI REUSSITE, qui recherchait la responsabilité délictuelle des notaires, soutenait qu'ils avaient commis une double faute, d'une part en ne s'assurant pas de la consistance matérielle exacte du lot n° 3, d'autre part en ne remarquant pas que ce lot avait une superficie inférieure à celle mentionnée dans l'acte ; qu'en particulier elle faisait valoir, en premier lieu, que le règlement de copropriété mentionnait dans la partie désignation et division de l'immeuble que le lot n° 21 faisait " enhachement dans le lot n° 3 ", de telle sorte que les notaires étaient en mesure de savoir qu'aucune séparation n'existait entre les deux lots ; que toutefois, l'existence d'un enhachement n'impliquait pas, par elle-même, l'absence de séparation entre les deux lots ; qu'en tout état de cause, le fait que les deux lots ne fussent pas matériellement séparés n'impliquait pas qu'une erreur ait pu être commise sur la superficie de l'un d'entre eux, ni n'obligeait par elle-même à une vérification particulière sur ce point et moins encore en se rendant sur place, d'autant que le règlement de copropriété ne contenait aucune mention relative à la superficie des lots ; que la SCI REUSSITE mettait en exergue, en deuxième lieu, le fait que la mention, dans le courriel échangé entre notaires, selon laquelle " seule la partie entourée de jaune fait l'objet de la vente " ne se rapportait qu'au seul lot n° 4, de telle sorte que le plan du lot n° 3 contenu dans ce courriel ne pouvait lui permettre de comprendre que ce lot n° 3 était amputé de la superficie du lot n° 21 ; qu'elle précisait que le fait que la SCI REUSSITE avait acquis le lot n° 3 pour ce plan permettait de constater que le lot 3 s'étendait sur tout le rez-de-chaussée de l'immeuble ; qu'elle faisait valoir également la lettre du 25 octobre 2010 adressée par Me Y... aux cabinets immobiliers concernés par la vente ; qu'en réalité, un courriel du 26 avril 2010 adressé par Me X... à l'office de Me Y... faisait état de l'envoi du " plan du lot 3 et du lot 4 (dont seule la partie entourée de jaune fait l'objet de la vente) "; que par ailleurs, dans une lettre du 25 octobre 2010 adressée aux cabinets immobiliers concernés, Me Y... les informait de la survenance du problème objet du litige et indiquait que " contrairement à ce qui est indiqué sur les plans, ce n'est pas la totalité du rez-de-chaussée qui a été vendu mais qu'une partie. La partie n'appartenant pas à Madame A... et qui pourtant figure sur le plan annexé au compromis que vous avez négocié et établi est de 82,90 m² " ; que la lettre adressée par Me Y... aux cabinets immobiliers se bornait à faire état du caractère erroné des indications fournies lors du compromis, mais sans qu'il puisse s'en déduire que les notaires auraient, au moment de la rédaction des actes, eu connaissance de ce caractère erroné, ou même seulement qu'ils auraient été en mesure d'acquérir une telle connaissance ou qu'il aurait été de leur devoir de le faire puisqu'aucun élément, à défaut de toute cote ou mesure figurant sur le plan, ne leur permettait d'apprécier l'excès de superficie attribué par erreur au lot n° 3 ; qu'ils n'avaient, dès lors, aucune raison d'effectuer des vérifications particulières sur ce point ; qu'enfin, la SCI REUSSITE relevait que le numéro du lot mesuré n'apparaissait pas sur le document établi par le cabinet IMMODIAG qui avait procédé à la mesure, puisqu'il était intitulé " local commercial portant le n° (NC) du règlement de copropriété ", de telle sorte que les notaires auraient dû demander un état de surface privative mentionnant le lot mesuré ; que ce fait était exact, mais il n'en résultait aucune faute à la charge des notaires dès lors que ce document définissait avec précision la composition des lots vendus (rez-de-chaussée et premier étage) sans qu'aucun élément, intrinsèque ou extrinsèque, puisse laisser seulement présumer que ces indications ne se rapportaient pas aux lots n° 3 et 4 objets de la vente ; et aux motifs éventuellement adoptés que dans le courant de l'année 2010 la SCI REUSSITE avait souhaité acquérir un local commercial situé 3 et 7 rue du Vieux Palais à ROUEN; qu'elle avait procédé à la visite de ce local en compagnie de l'agent immobilier chargé de la vente; qu'un compromis de vente avait été établi et avait été signé courant mai 2010, la superficie du local ayant été indiquée conformément à l'attestation d'un cabinet IMMODIAG datée du 9 octobre 2008; que la vente avait été réitérée le 16 septembre 2010 selon acte émanant de Me X... avec la participation de Me Y..., propre notaire de la SCI REUSSITE; que par cet acte, la SCI REUSSITE avait acquis de Mme Z..., propriétaire des lots n° 3 et 9 dans l'immeuble considéré, ces mêmes lots d'une superficie respective de 326,71 m² et de 76,80 m² ; que par la suite, la SCI REUSSITE s'était aperçue qu'une partie de ce qu'elle croyait être le lot n° 3 n'appartenait pas à Mme Z... mais à un tiers, Mme B..., et constituait en fait le lot n° 21 de l'immeuble; qu'elle avait dès lors acquis cette partie également en désintéressant un tiers qui bénéficiait d'une promesse de vente sur ce lot n° 21 ; qu'elle indiquait que l'erreur était née du fait qu'il n'existait aucune séparation matérielle entre les lots n° 3 et 21 et que le cabinet IMMODIAG avait mesuré l'ensemble de ces deux lots au lieu de ne mesurer que le lot n° 3 ; que le lot n° 3 ayant une superficie inférieure de 79 m² par rapport à ce qui avait été mesuré par le cabinet IMMODIAG, la SCI REUSSITE avait obtenu du vendeur une somme de 100.840,66 euro à titre de réduction de prix ; que la SCI REUSSITE imputait diverses fautes à Me X... et à Me Y... qui auraient dû s'apercevoir de l'anomalie indiquée ci-dessus et qui- auraient dû vérifier la qualité de propriétaire du vendeur, auraient dû comparer la consistance du lot n° 3 appartenant à Mme Z... avec celle d'un plan du lot n° 3 en leur possession, auraient dû s'apercevoir qu'un escalier faisant prétendument partie du lot n° 3 donnant accès au lot n° 9 faisait en fait partie du lot n° 21 de sorte que la SCI REUSSITE se retrouvait sans accès privé entre les lots n° 3 et n° 9 et auraient dû obtenir le règlement de copropriété de l'immeuble permettant de déceler l'anomalie; qu'il n'appartenait pas au notaire instrumentaire chargé de la vente d'un bien immobilier de se rendre sur place ou de contrôler le travail du métreur; que s'agissant de la vérification de la qualité de propriétaire du vendeur devant être effectuée par les deux notaires, Mme Z... était bien propriétaire des lots n° 3 et n° 9 qui avaient fait l'objet de l'acte de vente du 16 septembre 2010 ; que la question ne portait pas sur la propriété de ces deux lots mais sur leur consistance matérielle en l'absence de séparation entre les lots n° 3 et 21 ; que sur ce point et formellement, le moyen soulevé par le demandeur manquait en fait; que s'agissant de la comparaison de la consistance du lot n° 3 avec le plan du lot n° 3, le moyen se fondait sur la pièce n° 10 de la SCI qui était un courrier électronique émanant de Me X... et adressé à Me Y... par l'intermédiaire d'un de ses collaborateurs, Mme C... ; que ce courrier faisait état de pièces jointes consistant notamment en un plan des lots destinés à être vendus, étant précisé que ce courrier mentionnait que " seule la partie entourée de jaune fait l'objet de la vente " ; que toutefois la pièce jointe envoyée en même temps que ce courrier n'était pas produite et que le document-qui pourrait sans doute s'en rapprocher le plus est le plan annexé à l'acte de vente et repris (en agrandissement) en pièce n° 7 par les notaires; que ce plan n'était pas coté et ne comportait l'indication d'aucune mesure, de sorte que les notaires ne disposaient d'aucun moyen pour déceler l'anomalie portant sur la consistance matérielle du lot n° 3 et une différence significative de superficie ; que s'agissant de l'obtention du règlement de copropriété par les notaires, il résultait d'une stipulation de l'acte de vente du 16 septembre 2010 (page 15), qu'une copie de ce règlement avait été remise à la SCI REUSSITE ; que cette dernière n'expliquait pas pourquoi les notaires, qui n'étaient pas allés sur les lieux, auraient pu relever une anomalie de consistance qu'elle-même n'avait pas pu relever alors qu'elles les connaissait pour les avoir visités ; qu'il n'apparaissait pas que les notaires eussent commis une faute quelconque en établissant l'acte de vente du 16 septembre 2010 alors que, ne s'étant pas rendus sur place et n'ayant pas à le faire, ils ne pouvaient déceler l'anomalie portant sur la consistance exacte du lot n° 3 qui était vendu à la SCI REUSSITE ; que le lot n° 3 n'avait jamais fait l'objet d'une vente depuis l'entrée en vigueur de la loi Carrez ; que les notaires ne disposaient dès lors d'aucun point de comparaison relatif aux superficies mesurées,
Alors que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions récapitulatives (conclusions p. 6, § 7 à 9) la SCI REUSSITE avait invoqué à l'encontre de Me X... et Me Y... un manquement à leur devoir d'assurer l'efficacité de leur acte ; qu'en se bornant à apprécier la responsabilité des notaires à l'aune de leur devoir de conseil, sans répondre au moyen dirimant tiré du défaut d'efficacité de l'acte de vente litigieux, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile,
Alors, en toute hypothèse, que le devoir d'efficacité qui pèse sur le notaire lui impose de dresser des actes qui réalisent exactement les buts poursuivis par les parties et dont les conséquences sont pleinement conformes à celles qu'elles en attendent ; qu'à ce titre, il lui incombe de vérifier la nature des biens cédés et s'assurer que le copropriétaire vendeur ne cède que sa propriété ; qu'en l'espèce, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la désignation du local commercial stipulée à l'acte de vente englobait par erreur le lot privatif d'un autre copropriétaire ; qu'il s'en déduisait nécessairement un défaut d'efficacité de cet acte ; qu'en écartant néanmoins toute faute professionnelle des notaires à cet égard, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquence légales de ses propres constatations et a violé l'article 1382 du code civil,
Alors, en outre, que le devoir de conseil qui pèse sur le notaire lui impose d'attirer l'attention des parties sur toutes les circonstances de fait qui peuvent compromettre l'efficacité de son acte et les informer de manière précise sur les limites et insuffisances éventuelles de l'acte projeté ; qu'en l'espèce, selon les propres constatations de l'arrêt attaqué, le règlement et les plans de la copropriété litigeuse révélaient un lot de copropriété n° 21 enhaché dans le lot n° 3, seul promis à la vente, sans que ces lots ne fussent matériellement séparés ; que cette imprécision était de toute évidence de nature à semer le doute sur la consistance et la superficie du lot vendu ; qu'en écartant néanmoins toute obligation de vérification ou d'alerte des notaires quant à la consistance de ce lot, la cour d'appel a méconnu l'étendue du devoir de conseil du notaire et violé le même texte,
Alors, enfin, que le devoir de conseil qui pèse sur le notaire lui impose d'attirer l'attention des parties sur les lacunes du certificat de mesure établi en application de la loi n° 96-1107 du 18 décembre 1996 dite loi Carrez dont il pouvait se convaincre par lui-même ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que l'espace destiné à la désignation du lot figurant sur le certificat de mesure établi par le cabinet IMMODIAG, produit par le vendeur, n'avait pas été renseigné et ce, en contravention aux dispositions de la Loi Carrez, de sorte que ce certificat n'était pas conforme aux dispositions légales et impropre à établir avec certitude la consistance et la superficie des lots vendus; qu'en écartant néanmoins tout manquement des notaires à leur obligation d'alerter les acheteurs sur la non-conformité de ce certificat, au motif inopérant que ce document définissait avec suffisamment de précision les locaux vendus indépendamment de la désignation des lots, la cour d'appel a de nouveau méconnu l'étendue des devoirs professionnels du notaire et violé le même texte, ensemble l'article 46 de la loi du 10 juillet 1965."