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300. La fête du slip et du sang

Par Balndorn
300. La fête du slip et du sangGros pectos, lances phalliques buvant le sang des ennemis, barbares décadents, monstrueux et pédés, femmes-objets sexuels, paysages sublimement kitsch... 300, le film fasciste par excellence. Et Zack Snyder, le Leni Riefenstahl américain.
L'histoire des Thermopyles est déjà en elle-même un mythe de la liberté luttant jusqu'à la mort victorieuse contre l'oppression de la tyrannie. Mais la représentation qu'en fait le film accentue et aggrave cette morale en schématisant les deux camps.
D'un côté, les Spartiates, les mêmes qui tuent les pas beaux et réduisent leurs voisins en esclavage, sont les hérauts et les héros de la liberté et de la démocratie ; de l'autre, les Perses, soudainement devenus Noirs, Chinois, Arabes et ninjas – vive la géographie orientaliste – sont des gros vilains méchants asservis aux pieds qu'ils lèchent de leur dieu-roi.
D'un côté, les vrais mecs, les durs – merci la voix-off de nous le répéter à chaque scène, on n'avait pas compris –, ceux qui marchent pieds nus dans la neige – en Grèce –, tuent des loups géants – en Grèce ––, escaladent des montagnes gigantesques à mains nues – en Grèce –, et qui sont tellement musclors qu'ils se battent en slip ; de l'autre les gays, les femmelettes, les dégénérés, dont le corps même s'est dégradé, devenant homme-bouc, homme-avec-des-lames-à-la-place-des-mains, homme-Orc dépourvu de parole.


Bref, le film opère une relecture populiste et manichéenne de l'Histoire, faisant de celle-ci la fable éternelle du Bien contre le Mal. Dans le camp du Bien, les gentils Grecs/Occidentaux/Américains, qui ont le droit de tuer de massacrer de ne pas être humains. Dans le camp du Mal, les méchants Perses/Orientaux/Iraniens, bref, tout ce qui n'est pas blanco de peau est suspect, surtout quand ça se croise entre hommes et animaux. Ah si, il y a aussi quelques traîtres à Sparte : mais ce sont toujours des bossus ou des conseillers, donc pas des vrais hommes, pas des soldats, quoi.
Voilà ce qu'est une chanson de geste nationaliste, fasciste et machiste au XXIe siècle.
Donc si l'on veut devenir un gros connard, que peut-on suivre comme règles esth-éthiques ?
- 1° : transformer l'autre en Orc : légitimer un massacre d'hommes – du genre une guerre en Irak ou un conflit potentiel avec l'Iran – en prétextant une chasse aux choses.
- 2° : se transformer en caractère stéréotypé : définir une norme sociale et morale – comme une virilité qui a peur de se faire castrer par les revendications féministes – qui sublime les élus divins et autorise le meurtre des faibles.
- 3° : narrer une histoire héroïque : transformer en récit et en discours des images déjà bien chargés – parce que c'est bien connu, le spectateur est con et a besoin d'une leçon.
- 4° : épurer le décor : parce que dans un monde d'ors inhumains, les hommes-dieux peuvent tuer les dieux-rois sans souci d'une éthique existentielle.
Voilà un bien beau carcan pour tisser de belles histoires pleines de bruits et de fureurs !
Et si l'on ne veut pas ?
Si l'on veut rester femme et homme ?
Si l'on veut aider l'autre et s'aider à bâtir un monde meilleur ?
Voir les héros de Donzelli, Eastwood, Dolan ou encore Refn : des femmes et des hommes qui deviennent des héroïnes et des héros sans se nier eux-mêmes et sans nier l'autre. Unir l'épique et le lyrique.
Pour que nous devenions héroïnes et héros, il faut tuer les demi-dieux. 
300. La fête du slip et du sang
300, de Zack Snyder
Maxime

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