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Blade Runner. Quand l'atmosphère prime sur la narration

Par Balndorn
Blade Runner. Quand l'atmosphère prime sur la narration
Blade Runner 2049 sortira ce mercredi. Suite ou remake, on ne sait pas trop encore, mais au vu des nombreuses bande-annonces, le souci de produire une réelle atmosphère cinématographique reste aussi vive chez Denis Villeneuve que Ridley Scott. Qu'est-ce qui fait donc l'atmosphère de Blade Runner ?
Réalisme futuriste
Blade Runner appartient à ce que l'on appelle le hard-boiled thriller, sous-genre du film policier qui explore au détour de l'enquête une réalité sociale généralement invisibilisée. Mais à la différence des films policiers "classiques", Blade Runner se déroule dans un futur proche (2019 pour un film sorti en 1982), dont le spectateur ne connaît pas les codes. Aussi le mélange entre hard-boiled thriller et exotisme temporel donne naissance à une atmosphère curieuse, proche de ce que Freud appelle "l'inquiétante étrangeté", soit le trouble qui naît de la reconnaissance/méconnaissance d'un objet. Car alors que le hard-boiled thriller avance en général par un récit resserré qui s'enfonce de plus en plus profondément dans les tréfonds de la société bourgeoise, le récit exotique, lui, tend à s'éparpiller, afin de présenter les différentes façettes d'un monde inconnu du public. Naît alors une tension entre un récit centripète – l'enquête de Deckard (Harrison Ford) et les scènes d'action - et un récit centrifuge – les nombreuses scènes au cœur du chinatown, les incrustations d'immenses publicités dans le plan.Blade Runner réussit ainsi le pari d'allier réalisme, futurisme et onirisme. Ce qui peut paraître assez ennuyeux dans le récit fait aussi son intérêt. Éclatée dans le temps, mal raccordée de séquences en séquences, la mission de Deckard tient peu en haleine ; en revanche, sa perdition l'apparente à un récit cauchemardesque, à l'immersion dans une zone intermédiaire entre rêve et réalité, égarée dans une mégapole futuriste dominée par un capitalisme déceptif.
Poéthique des traces
Ridley Scott procède ainsi de ce que l'on pourrait nommer une poéthique des traces. Au sens où le récit centrifuge met au premier plan des éléments de la vie quotidienne en 2019 dont il n'explicite pas le sens : par exemple l'omniprésence de la gastronomie asiatique dans les quartiers populaires d'une ville américaine. Sans doute cela a-t-il trait à l'immigration asiatique actuelle sur la côte Pacifique ; mais elle n'explique pas pourquoi la culture asiatique semble à présent imprégner la totalité des classes populaires.Des objets, nous n'avons plus qu'une présence vidée de sens. Une aura de mystère entoure ces présences purement immanentes d'un monde à venir. Dans Blade Runner, la trace – est ce qui fait le lien entre notre présent et ce futur possible. Un saut métaphysique, un court-circuit temporel qui nous laisse contempler les vestiges de ce que nous pourrions être.D'où la forme de l'enquête. De la recherche de preuves, de traces. De la plongée au coeur des objets afin d'y inventer un sens : être ou ne pas être un Réplicant.
Blade Runner. Quand l'atmosphère prime sur la narration
Blade Runner, de Ridley Scott, 1982Maxime

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