Depuis cet été, les guyanais protestent contre le creusement de cette mine de 2,5 km de long pour 400 mètres de profondeur, soit une fosse de la taille de 32 fois le Stade de France prévue à l’horizon 2022.Le collectif « Or de question », regroupant une centaine d’associations nationales et internationales, a multiplié les actions en lien avec les associations de défense des Amérindiens, envahissant notamment un plateau de télévision le jour de l’arrivée du Tour de Guyane, le 27 août dernier. Les chefs coutumiers des peuples autochtones se sont aussi prononcés contre ce plan écologiquement dévastateur.
Un monstre industriel va ravager la forêt primaire amazonienne
Pour Raymond Léost, de France Nature Environnement (FNE), « ce projet va détruire des dizaines de kilomètres carrés de forêt primaire, les gaz à effet de serre vont augmenter. C’est une catastrophe. Cela ne concerne pas que la France mais le monde entier. Les citoyens doivent savoir à quoi ils vont être confrontés ». Cinquante millions de tonnes de boues résultant de l’utilisation de cyanure pour détacher l’or de la roche seraient ainsi générées par cette extraction intensive. La Montagne d’or, terme qui englobe à la fois le nom du consortium et celui du projet de mine géante, a beau promettre en retour 750 créations d’emplois directs, les arguments ne font pas le poids. La majorité des Guyanais voit d’un mauvais œil les ravages sur ce terrain de 12 km², à 300 km de Saint-Laurent-du-Maroni, à l’ouest du territoire, au cœur d’une réserve biologique intégrale.Prenant tout le monde de surprise, le consortium a sorti ensuite du chapeau un autre projet de mine aurifère dans la même zone, mais cette fois-ci de taille beaucoup plus réduite (1 km²). Cette concession, sur le lieu-dit de Bœuf-Mort, abriterait une extraction alluvionnaire du minerai moins invasive pour l’environnement.Si, pour le consortium, Bœuf-Mort et la Montagne d’or sont « deux projets bien distincts », Harry Hodebourg, porte-parole d' " Or de question ", n’a pas du tout la même analyse : « Bœuf-Mort, c’est le cheval de Troie du grand projet de la Montagne d’or, ils avancent masqués pour ensuite mieux nous imposer le mégaprojet industriel, le plus important jamais construit en France. Si Bœuf-Mort se fait, ils pourront avancer leurs pions. Le consortium détient la concession sur l’ensemble du site, propriété de l’État, jusqu’au 31 décembre 2018. Si cette mine plus petite voit le jour, l’État pourrait être incité à renouveler la concession. C’est aussi une manière de mettre un coup de pression… »Pour Christophe Pierre aussi, leader des Jeunesses autochtones, les deux projets aurifères sont liés : « Ce qui nous oppose à ces plans, c’est la défense à la fois de l’environnement et de la terre de nos ancêtres. Ça ne nous convient pas, de la spiritualité jusqu’à l’économie. La mine industrielle utilisera 20 % des ressources énergétiques du territoire. Il faut sortir de ce modèle de développement de la Guyane basé sur l’or, c’est pour cela que nous sommes mobilisés depuis le printemps dernier. »Cette fronde massive contre la destruction d’une partie de la forêt amazonienne commence un peu à porter ses fruits. Saisie par la FNE, la Commission nationale du débat public (CNDP) s’est prononcée favorablement, le 6 septembre dernier, pour l’organisation d’un débat public concernant cette fois-ci le projet de mine géante, « considérant que les enjeux économiques, sociaux et environnementaux du projet et son impact sur l’aménagement du territoire en Guyane sont très importants et qu’il revient à ses habitants de participer à l’élaboration des décisions le concernant ». Ce débat organisé par la CNDP aura lieu au premier semestre 2018.
En attendant, le ministre de la Transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, a longuement insisté auprès d'Emmanuel Macron sur les menaces pour l'environnement de ce plan gigantesque mais le Président de la République s’est prononcé en faveur de ce projet : « Vous avez ici un industriel de rang mondial, exemplaire, qui, sur le plan scientifique, environnemental, social, se comporte de la meilleure façon, fait des investissements et est prêt à aller au bout ».
La digestion est donc de plus en plus difficile pour Nicolas Hulot car la Montagne d’Or s’ajoute au renouvellement du privilège off-shore de Total dans cette même Guyane, à la suppression des aides d'Etat aux paysans bio, à l'autorisation en catimini de deux nouveaux pesticides « tueurs d’abeilles », à la prolongation de l'autorisation du Glyphosate par la commission de Bruxelles…
Au Président et au gouvernement de la FranceMonsieur le Président,
Monsieur le Premier ministre,
Madame la Ministre, Monsieur le Ministre,
L’Etat français semble encourager des multinationales étrangères à lancer de gigantesques exploitations minières en plein coeur de la forêt guyanaise. Parmi elles, le projet « Montagne d’Or » dont le démarrage est prévu pour 2018.
Avec son gisement s'étendant sur 190 km², sa fosse de 2,5 km de long, de 500 m de large et de 400 m de profondeur, il s’agirait alors de la plus grande mine d’or jamais exploitée sur le territoire français. Il signifierait l’industrialisation de la filière aurifère dans la seule forêt tropicale humide de l’Union européenne.
Les mines industrielles d’or ont été et sont encore aujourd’hui à l’origine d’impacts humains et environnementaux graves, souvent irréversibles. Le Brésil, pays frontalier de la Guyane, peut en témoigner avec son « accident » en 2015 considéré comme l'une des pires catastrophes écologiques.
On ne peut accepter de détruire une partie de l’exceptionnelle biodiversité guyanaise et de prendre le risque d’accidents majeurs pour l’extraction d’une substance dont l’utilité sociale et industrielle est négligeable aujourd'hui.
Par la présente lettre, nous souhaitons manifester notre soutien aux revendications du Collectif « Or de question ! ».
Nous vous demandons en conséquence l'arrêt immédiat des divers projets de méga-industrie minière en commençant par celui de la « Montagne d'or » et d'orienter l''économie guyanaise vers un développement écologiquement et socialement soutenable.
Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, Monsieur le Premier ministre, Madame la Ministre, Monsieur le Ministre, l'expression de notre profond respect.
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