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Par Julien Leray @Hallu_Cine

La musique d’Alexandre Lecluyse fait vigoureusement monter les trémolos. Les cordes des violons saturent l’espace sonore, accélèrent le rythme, augmentent la pression.

Nathalie (Virginie Efira), afin de rembourser à la pègre locale la somme que doit son fils empêtré dans une sale affaire de recel et de trafic de drogues, cherche à fabriquer une imitation d’un sublime collier, pièce-maîtresse de la bijouterie pour laquelle elle officie. La main tremblante, le teint blême, la panique contenue, elle place les pierres les unes après les autres sur la structure de la parure, soutenue par les harmoniques alors à l’unisson de la montée en tension.

Premier bémol, pourtant, et non des moindres : le montage, lui, ne suit à ce moment-là absolument pas le tempo imprimé par le son. Ouvertement sans relief, enchaînant pauvrement les plans, l’approche structurelle choisie par Emmanuelle Cuau, outre sa facture classique, représente à elle-seule ce qui viendra dès lors altérer les enjeux narrés par Pris de Court, son petit dernier : le manque (une nouvelle fois) dommageable de prises de risques.

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Scindé en deux parties distinctes aux réussites contraires, Pris de Court entend traiter de concert drame social et film à suspense, où le destin d’une famille monoparentale, son acceptation au sein d’une ville lui étant étrangère, seront mis à l’épreuve des erreurs de jeunesse commises par Paul, fils aîné de Nathalie et ado en colère, dont les actes ne traduiront pas autre chose qu’une recherche de repères et de sens, perdus depuis la disparition de son père.

Au sein de cette construction narrative bicéphale, Emmanuelle Cuau ne se montre ainsi jamais aussi à l’aise que lorsqu’elle prend le temps de s’attarder sur son trio d’acteurs principaux, Virginie Efira donc, et ses deux fils interprétés par Jean-Baptiste Blanc et Renan Prévot. Justes, à bien des égards touchants, ils traduisent par leur jeu toute la sensibilité de la metteuse en scène vis-à-vis de leurs personnalités, leurs épreuves respectives, et de ce qu’ils auront chacun à leur niveau à affronter.

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On ne pourra certes s’empêcher de penser que Pris de Court représente une énième occasion pour Virginie Efira de démontrer tout son talent d’interprétation en tant que mère courage, mais reconnaissons également que cette dernière apporte, une nouvelle fois, des trésors de nuances bienvenus à un rôle qui aurait aisément pu apparaître convenu.

Armé de dialogues bien vus et nantis d’une belle répartie, le drame social mis en scène par Emmanuelle Cuau, solide d’un point de vue thématique et convenablement tenu visuellement, sait donc souvent se montrer convaincant, à défaut d’être follement original et enlevant.

Une réussite relative dont la partie à suspense, elle, ne peut hélas s’enorgueillir. Outre sa mise en scène d’une platitude désespérante, c’est encore davantage son absence de crédibilité qui en viendrait à devenir exaspérante.

Sans réclamer à cor et à cri un réalisme outrancier, la dissonance manifeste entre la dureté des questions socio-professionnelles (voire familiales) dépeintes, et la menace finalement inoffensive que fait peser la pègre sur Nathalie et ses enfants, fait que l’on ne croit malheureusement pas un seul instant à leur fuite en avant.

Une amorce prometteuse, un développement anonyme bien que satisfaisant, et donc un final manquant singulièrement de mordant : Pris de Court ressemble en fait à s’y méprendre à ces productions qui ne jureraient pas en prime time le mercredi soir sur France Télévisions. Pour le cinéma, en revanche, c’est une tout autre chanson…

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Film vu dans le cadre du Festival Cinemania 2017.


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