Kant disait que l'on est déterminé, mais qu'il faut agir comme si on ne l'était pas. Je crois que la contradiction n'est qu'apparente. Nous faire croire que l'on n'est pas déterminé est une manière de nous déterminer. Et elle conduit à un meilleur résultat que l'hypothèse inverse. Elle crée une angoisse existentielle, favorable au changement.
Car, il me semble aussi que l'homme est indéterminé. Sa vie est faite de "big bangs" qui le changent. Ils sont imprévisibles. Ce sont eux qui font que nous sommes collabos, résistants ou majorité silencieuse. La société joue sans doute un rôle essentiel dans la création des conditions qui permettent le big bang. C'est probablement une conclusion qu'il faut tirer des travaux de E. Durkheim sur le suicide. Cependant, dans les mêmes conditions, deux hommes peuvent ne pas réagir de la même façon. (Cf. étude sur des jumeaux, citée par B.Cyrulnik.) Ce qui est inquiétant, me semble-t-il, est que ce qui détermine leur réaction est au delà de la raison. James March conclut : "décisions happen".