Des notes de voyage dans l’Angleterre de George V, écrites par l’auteur de La Guerre des salamandres, et illustrées par lui-même : un petit livre réjouissant de bout en bout. Karel Capek est un modèle de voyageur : cultivé, ouvert, observateur, mais jamais dupe de ce qui lui passe sous les yeux. Et d’une constante drôlerie. Doué d’une écriture à la fois limpide et précise, dépourvue de lyrisme autant que de sécheresse, il croque des scènes et des paysages avec une distance ironique qui n’exclut pas la tendresse pour le pays de Shakespeare et de Dickens. Londres l’ennuie, les clubs l’amusent comme la survivance d’un autre temps, les universités l’impressionnent, les dimanche anglais le terrorisent, la nourriture l’atterre, et l’Ecosse le fascine. C’est d’ailleurs à son ambiance, à son austérité, à l’indicible et séduisante tristesse qui émane de ses ses paysages désolés, que Karel Capek consacre les pages les plus intenses de son livre. Et ses quelques paragraphes sur l’Irlande – qu’il ne verra pas -, quelques années après sa partition et l’indépendance d’une partie du pays, en disent beaucoup sur la façon dont la « mère patrie » reniée considérait son enfant émancipé.
Souvent, curieusement, on a l’impression de dite une suite de chroniques de Vialatte : vives, pétillantes, lucides, débordantes d’humour, et pleines d’une sagesse indulgente et désabusée.
Christophe Mercier
Karel Capek, Lettres d’Angleterre Traduit du tchèque par Gustave Aucouturier La Baconnière/Ibolya Virag, 190 p., 12 €